L'agent secret (Секретный агент)
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— Retirez-vous, madame, je vous entendrai tout `a l’heure.
— Mais o`u faut-il que j’aille ?
— O`u vous voudrez, au diable, hurla le commissaire.
— Eh bien, c’est pas pour dire, r'etorqua la vieille femme, tout commissaire que vous ^etes, vous ^etes rudement mal embouch'e…
Et la tante Palmyre ajouta :
— Dire que personne de vous n’y a pens'e encore, j’m’en vas aller jusqu’au coin chercher des fleurs.
***
Il faut croire que les fleuristes 'etaient rares, car la vieille femme avait sans s’arr^eter travers'e toute la ville.
Elle 'etait d'esormais devant la gare et, comme elle consultait l’horloge :
— Bigre ! je n’ai que le temps, murmura-t-elle.
La m'eg`ere traversa la salle d’attente, fit poinconner son billet, un coupon de retour, et acc'eda au quai au moment pr'ecis o`u un employ'e criait :
— Les voyageurs pour Paris, en voiture !…
La tante Palmyre s’installa dans un compartiment de seconde, r'eserv'e aux dames seules…
Un inspecteur contr^olait les billets `a l’arr^et de Ch^ateau-Thierry.
— Pardon, monsieur, fit-il en r'eveillant un voyageur qui s’'etait assoupi, mais vous ^etes dans les dames seules !
L’homme se frotta les yeux.
— Je vous demande pardon, fit-il, je vais changer de place…, c’est une erreur…
Par le couloir, le voyageur gagna un autre compartiment, y transportant un ballot de v^etements envelopp'e d’un ch^ale multicolore…
Une heure apr`es, le train de Ch^alons arrivait `a Paris. Le gros voyageur regarda sa montre :
— Onze heures quarante-cinq, j’ai encore le temps.
Il sauta dans un taxi et dit au m'ecanicien :
— Rue Saint-Dominique, au minist`ere de la Guerre.
***
Peu apr`es le d'epart inopin'e du colonel Hofferman, Juve avait quitt'e le sous-secr'etaire d’'Etat, mais, au lieu de quitter le minist`ere il 'etait mont'e au Deuxi`eme Bureau de l’'Etat-Major et s’'etait fait annoncer au commandant Dumoulin.
Bien que se connaissant fort peu, le commandant Dumoulin et Juve sympathisaient.
Juve 'etait mont'e `a tout hasard, esp'erant que peut-^etre il apprendrait du nouveau, mais le commandant Dumoulin ne savait rien ou ne voulait rien dire, et Juve, apr`es une conversation banale, allait se retirer, lorsque la porte s’ouvrit.
Le colonel Hofferman entra.
Le colonel avait les yeux brillants, l’air radieux.
Le colonel, ayant apercu Juve, le salua d’un sourire 'enigmatique.
— Ah ! par exemple, monsieur, je ne m’attendais pas `a vous retrouver ici… mais puisque vous y ^etes, vous me saurez gr'e de vous donner des nouvelles !…
Juve ouvrait des yeux interrogateurs. Le colonel continua :
— J’ai rendu hommage `a votre perspicacit'e tout `a l’heure et je reconnais encore que vous avez fort bien pronostiqu'e en nous annoncant que le capitaine Brocq avait une ma^itresse ; malheureusement ce n’'etait pas du tout celle que vous croyez. Ce n’'etait pas non plus une femme du monde, tout au contraire…
— Avez-vous l’intention de me la faire conna^itre ?
— Mais bien certainement, monsieur !… Cette ma^itresse, c’est une fille… une chanteuse de caf'e-concert, une nomm'ee Nichoune… de Ch^alons !
— Vous en avez la preuve ?
Le colonel tendit au policier un paquet de lettres :
— Voici, dit-il, la correspondance que le capitaine adressait `a cette fille. Un de mes collaborateurs vient de la saisir chez elle…
Juve consid'era les documents :
— C’est curieux ! observa-t-il `a mi-voix, 'evidemment ! co"incidence f^acheuse !… mais pas une fois le nom de Nichoune ne figure dans ces lettres !…
— Il n’y figure aucun autre nom, observa le colonel… par cons'equent, vu l’endroit o`u ces lettres ont 'et'e trouv'ees… nous devons conclure…
Juve questionna encore :
— Ces lettres n’'etaient pas accompagn'ees d’enveloppes ?
— Ma foi, non ! s’'ecriait le colonel, mais qu’importe !
Juve hocha la t^ete :
— Bizarre ! fit-il tout bas.
Puis, haussant la voix :
— Mon colonel, je suppose que votre… collaborateur, avant de s’emparer de ces lettres, a fait causer la personne qui les avait recues… En a-t-il obtenu des renseignements ?…
— Monsieur l’inspecteur, je vais vous 'etonner encore une fois : mon collaborateur n’a pas pu faire parler la personne en question, lorsqu’il est arriv'e chez elle, il l’a trouv'ee morte.
— Morte ! cria Juve.
— Comme je vous le dis…
— Eh bien !
— Un conseil, Juve, laissez-nous les affaires d’espionnage… et vous, pourchassez donc Fant^omas. Il y a de quoi vous occuper.
11 – LA CAGOULE DE FANT^OMAS
Accoud'e `a la barre d’appui de sa fen^etre, J'er^ome Fandor s’occupait, en apparence, `a surveiller les all'ees et venues des passants qui remontaient lentement du centre de Paris.
Il fuma cigarette sur cigarette, pestant, jurant presque et ne quittant pas des yeux les trottoirs de la rue.
— Je me suis peut-^etre tromp'e ? pensa encore le journaliste… pourtant, malgr'e tout, j’imagine que ce gamin de quatorze ans, quinze ans au maximum, ce p^ale voyou qui m’a fil'e dans le m'etro, puis qui a pris le m^eme tramway que moi, puis que j’ai retrouv'e place de la Concorde, n’'etait pas l`a tout `a fait par hasard. Sept heures et demie… je ne sais si l’autorit'e militaire respecte les prescriptions l'egales et peut effectuer une arrestation pass'e le coucher du soleil ?…