L'Arrestation de Fant?mas (Арест Фантомаса)
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H'el`ene avait 'et'e avare d’explications.
— Bah, ne vous faites pas de mauvais sang. Tout s’est tr`es bien arrang'e. On a reconnu que j’'etais innocente. On m’a remise en libert'e. En libert'e provisoire, et vous le voyez, je me suis h^at'ee de vous suivre `a la piste, pour reprendre ma place dans la roulotte.
— Mais ma pauvre petite, c’est que pendant l’hiver on ne peut pas t’employer. Nous avons juste, le p`ere et moi, de quoi ne pas mourir de faim.
Par bonheur, l’esprit inventif du p`ere Zizi avait trouv'e moyen d’arranger les choses.
Il savait que la jeune fille 'etait travailleuse, il savait aussi qu’elle avait besoin de gagner sa vie, il n’avait pas h'esit'e `a lui proposer une place :
— Allons, j’ai assez de relations pour pouvoir te caser. Ici, vois-tu, ma fille, nous sommes au centre des installations de biffins. C’est bien le diable si je n’en trouve pas un qui veuille t’engager.
La fille de Fant^omas avait accept'e d’enthousiasme, et, deux heures plus tard, en effet elle 'etait
***
— Chauffeur, vous me m`enerez `a la porte de Saint-Ouen.
Juve qui venait de sauter dans un fiacre et de donner cette adresse vague, s’enfonca sur la banquette de la voiture, s’accouda, parut profond'ement r'efl'echir.
— De plus en plus bizarre, murmurait le policier, d’un air pr'eoccup'e, c’est `a n’y rien comprendre, et je me demande si jamais je renouerai les fils rompus de cet extraordinaire 'echeveau. O`u est le portefeuille ? Nikita m’'ecrit qu’il ne trouve rien. Diable, cela c’est le plus grave de tout. Mais il y a mieux. Qu’est devenu Fandor ? Lui me t'el'egraphie que la fille de Fant^omas est arr^et'ee, puis ne me donne plus de nouvelles. Pourquoi ? Qu’est devenue m^eme la fille de Fant^omas ? « D'etenue dans la prison de Brest », m’a t'el'egraphi'e Fandor. Je t’en fiche, `a la prison de Brest, il y a bien eu, en effet, une jeune fille r'epondant au signalement d’H'el`ene, mais elle a trouv'e le moyen de s’enfuir, avec l’aide probable d’un jeune chirurgien-dentiste. Un complice de Fant^omas ? C’est possible, mais ce n’est pas certain. Et puis o`u a 'et'e H'el`ene ? Ah, nom d’un chien de nom d’un chien, il faudrait pourtant que j’arrive `a comprendre quelque chose avant que ca commence `a se g^ater.
Juve avait raison de s’inqui'eter.
Non seulement il n’avait pas de nouvelles de Fandor, ce qui, 'etant donn'e leurs conventions, ne devait pas le tourmenter outre mesure, mais encore il n’avait pas la moindre id'ee de ce qu’avait pu devenir le portefeuille.
Quand Fandor et lui l’avaient cach'e dans le creux de la falaise, se rendant compte qu’ils n’avaient aucun moyen de l’emporter en s'ecurit'e jusqu’`a Paris et qu’il valait mieux le laisser en lieu s^ur pour d'etourner sur eux l’attention de Fant^omas et laisser au lieutenant Nikita le temps de venir le chercher, Juve avait 'et'e persuad'e que nul n’avait pu le voir dissimuler le pr'ecieux document. Nikita cependant n’avait rien trouv'e dans la cachette. Quelqu’un l’avait donc pris ?
— Fant^omas, songeait Juve, nous a attaqu'es, Fandor et moi, `a la petite gendarmerie, o`u il a tu'e le malheureux Pancrace. C’est la preuve certaine que Fant^omas ne se doutait pas, ne pouvait pas se douter de ce qu’'etait devenu le portefeuille. Il croyait `a ce moment-l`a que nous l’emportions, Fandor et moi. Il ne soupconnait nullement que nous avions cach'e l’objet. Rien n’a pu le faire changer d’opinion. Rien n’a pu lui faire d'ecouvrir notre cachette. Or, l’explication est la m^eme pour Sonia Danidoff et Ellis Marshall. Ils nous poursuivaient, donc ils croyaient que nous poss'edions le portefeuille. Donc ce ne sont pas eux comme ce n’est pas lui qui sont all'es le reprendre. Qui, alors ?
Juve, de r'eflexion en r'eflexion, de d'eduction en d'eduction, en 'etait arriv'e `a se demander s’il ne fallait pas croire qu’une seule personne avait pu voler le portefeuille rouge, une personne qui n’'etait autre que la fille de Fant^omas.
— Elle, songeait Juve, ne nous a jamais poursuivis. J’ignore ce qu’elle a fait depuis le naufrage du Skobeleff. Ne serait-il pas `a supposer qu’embusqu'ee derri`ere un rocher, elle ait pu nous voir, Fandor et moi, en train de dissimuler le portefeuille ? D`es lors, pourquoi ne l’aurait-elle pas retir'e de sa cachette ? pourquoi ne l’aurait-elle pas vol'e, soit pour le remettre `a son p`ere, soit par haine de la police, soit encore pour s’en faire une arme terrible contre quiconque – agents russes ou agents francais – voudrait attenter `a sa libert'e ?
Donc, il fallait le retrouver. Comment ? Fandor le bec dans l’eau, H'el`ene 'evad'ee, restaient les Zizi.
La fille de Fant^omas a 'et'e boucl'ee par surprise, elle n’a pas d^u avoir le temps de prendre ses pr'ecautions, se disait Juve, n’est-il pas possible qu’ayant le portefeuille rouge en main, l’ayant cach'e `a l’int'erieur de la roulotte quelque temps avant son arrestation, elle n’ait pas eu le loisir depuis de revenir le prendre ?
***
Il faisait nuit noire, quand le policier parvint en vue de la roulotte.
— Ah, ah, s’'ecria Juve, qui, mal v^etu, grim'e en terrassier avec un pantalon de velours bouffant maintenu par une ceinture rouge, dont le pan flottait derri`ere une petite veste bleue courte de compagnon, ne paraissait nullement d'eplac'e dans le quartier, oh, oh, je crois que le hasard me favorise. On jurerait qu’il n’y a personne.
Personne, en effet, dans la roulotte, puisque le p`ere et la m`ere Zizi, tout heureux du succ`es de leurs affaires au march'e aux oiseaux, s’'etaient rendus chez un mastroquet voisin.
Sans le moindre scrupule, Juve s’introduisit dans la roulotte par une des petites fen^etres mal close, et imm'ediatement il se livra `a une perquisition des plus minutieuse.
Cela dura une bonne heure. Juve, h'elas, ne trouva rien. Le policier, toutefois, ne se d'ecourageait pas pour si peu.
— Eh bien, monologuait-il, je n’ai v'eritablement pas de chance. Tout me dit que le portefeuille doit ^etre l`a, `a c^ot'e de moi, et je ne peux pas mettre la main dessus.
— Si le portefeuille n’est pas dans la roulotte, se r'ep'etait-il, o`u peut-il ^etre ?
Juve, apr`es avoir minutieusement examin'e le voisinage et n’avoir rien apercu dans l’ombre propice qui f^ut de nature `a l’inqui'eter, sortit de la roulotte. Il jeta un regard indiff'erent `a Papillon, qui, tranquille, ruminait le nez dans sa mangeoire, puis se glissa sous la roulotte.
Juve ne s’'etait pas tromp'e.
Entre les quatre roues du pauvre v'ehicule se trouvait une grande caisse de bois. Elle 'etait remplie des mat'eriaux les plus extraordinaires. L`a voisinaient de vieilles assiettes cass'ees et des piquets destin'es `a la tente de toile. Une cage d'emolie s’enfoncait sous le poids d’un fourneau portatif de cuisine. Des monceaux de vieux journaux, des bouteilles vides voisinaient avec de vieilles couvertures de lit. Cette caisse en bois 'etait le d'ebarras de la famille Zizi.