L'?vad?e de Saint-Lazare (Побег из Сен-Лазар)
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— Le Bedeau, s’il vous pla^it ? c’est-y par l`a qu’est sa carr'ee ?
Il ne recut pas de r'eponse. J'er^ome Fandor renouvela sa question, puis se d'ecida :
— Ca ne doit pas ^etre son 'etage. Voyons plus haut.
Au cinqui`eme, dans un corridor qui, `a midi devait ^etre obscur et qui, en ce moment, o`u il 'etait neuf heures du soir, n’'etait 'eclair'e par aucune installation de gaz, J'er^ome Fandor appela encore :
— Le Bedeau, s’il vous pla^it, la compagnie ? c’est-y par l`a qu’il g^ite ?
`A la cantonade, de loin, une voix de femme s’informa :
— Qui c’est qu’on demande ? et pourquoi ?
— Le Bedeau. Je cherche apr`es mon poteau. C’est-y par ici ?
Sa voix devait ^etre rassurante, il devait avoir imit'e de facon satisfaisante le parler faubourien, car on lui cria `a travers une porte ferm'ee :
— Au-dessus, la porte du fond.
Cette fois, J'er^ome Fandor 'etait parfaitement document'e. En guise de remerciement il cria, lui aussi :
— Ca va, la bourgeoise, ca colle.
Et, tra^inant les pieds, d’un pas lourd qui imitait la d'emarche d’un ouvrier fatigu'e, J'er^ome Fandor monta au sixi`eme.
Toutefois, tandis qu’il gravissait l’'etage, le journaliste, tout en affectant un laisser-aller parfait, prenait en r'ealit'e des pr'ecautions s'erieuses.
— Mauvais, se disait-il, je viens d’^etre oblig'e, par trois fois, de crier le nom du personnage, l’oiseau pourrait bien s’^etre envol'e.
Et, pour 'eviter d’^etre apercu de l’escalier, J'er^ome Fandor monta en se collant `a la muraille.
La maison remuait d’ailleurs. De toutes parts, les portes s’ouvraient, des femmes, parfois une honn^ete m'enag`ere, le plus souvent des pierreuses ou de terrifiantes m'eg`eres, descendaient pour appeler les gosses qui ne semblaient avoir nul souci de remonter se coucher dans la chambre o`u le p`ere, en guise de bienvenue et de bonsoir, allait, comme d’habitude, leur administrer la racl'ee.
J'er^ome Fandor se h^ata. Au sixi`eme, on voyait un peu plus clair dans le corridor car il donnait de plain-pied sur le toit d’une maison avoisinante.
J'er^ome Fandor tourna sur la droite, chercha la chambre du Bedeau. Il la heurta d’un coup de poing :
— T’es l`a, l’Bedeau ? commenca-t-il d’une voix qu’il voulait avin'ee.
Le Bedeau ne devait pas ^etre dans la chambre. J'er^ome Fandor n’entendit aucune r'eponse, aucun bruit.
— D'ecid'ement, j’ai de la veine, pensa-t-il.
Et, en professionnel expert, profitant d’un moment o`u le couloir 'etait d'esert, J'er^ome Fandor introduisit un passe-partout dans la serrure, fit jouer la g^ache, ouvrit brusquement la porte.
Il ne s’'etait pas tromp'e, la chambre 'etait vide.
— De mieux en mieux, se d'eclara Fandor.
Et, sans aucun scrupule, J'er^ome Fandor, ayant p'en'etr'e dans la mansarde, referma tranquillement la porte sur lui. Au surplus, il n’y avait pas `a s’y tromper. Il 'etait bien chez le Bedeau. `A un clou, une d'efroque pendait qui suffisait `a lui enlever tout doute `a cet 'egard, car il reconnaissait la veste que portait la veille m^eme, chez le p`ere Pioche, le sinistre Bedeau.
La chambre d’ailleurs 'etait 'epouvantablement sale, sale `a faire reculer. Dans un coin, pr`es d’un grabat, d’une paillasse jet'ee `a m^eme le sol et sur laquelle des v^etements 'etal'es en d'esordre figuraient les couvertures, se trouvait une chaise 'eventr'ee. Plus loin, sur une vieille table dont les pieds 'etaient cass'es et consolid'es par des planches, se trouvait une cuvette remplie d’eau sale, un pot `a eau encombr'e d’une serviette encore tremp'ee.
C’'etait l`a tout le mobilier.
Fandor apercevait encore un journal 'etendu sur le sol sur lequel 'etaient amass'es des bouts de cigarettes recueillis dans les rues, aux terrasses des caf'es et constituant 'evidemment les provisions de tabac de l’apache.
Aux murs enfin, avec quatre 'epingles tordues, une grande affiche rouge, qui commencait par les mots :
Mais tout ce pauvre et ignoble d'esordre 'etait bien indiff'erent `a Fandor qui ne perdit pas de temps `a le consid'erer.
— H'e, h'e, monologua le journaliste, il s’agit de faire vite, si je ne veux pas que mon homme me tombe dessus et me fasse passer le go^ut du pain.
J'er^ome Fandor, tout en parlant, s’agenouilla, tapa du poing sur les briques formant le carrelage du plancher. Il 'etait venu en effet beaucoup moins avec le d'esir de rencontrer le Bedeau qu’avec l’intention de rattraper le coffret que Fant^omas avait confi'e `a la garde de son complice. Ce coffret, `a coup s^ur, le Bedeau avait d^u l’emporter dans sa chambre, dans cette chambre o`u, pr'ecis'ement Fandor venait perquisitionner. Qu’en avait-il fait par exemple ? o`u avait-il pu le cacher ? Et J'er^ome Fandor n’avait pas h'esit'e longtemps, vu l’absence de meubles, `a deviner qu’un trou devait ^etre pratiqu'e dans le carrelage et que, dans ce trou, le coffret devait ^etre dissimul'e. Le journaliste ne se trompait pas.
Comme il tirait `a lui la paillasse, il d'ecouvrit en effet qu’un des carreaux rouges, formant le plancher, branlait l'eg`erement dans son alv'eole. Introduire une lame de canif sous ce carreau, le faire sauter, lever aussi les carreaux avoisinants, d'ecouvrir le coffret fut l’affaire d’une seconde.
— Ma parole, murmura Fandor, je crois que je n’aurai pas perdu ma soir'ee.
Pourtant, en soulevant le coffret, Fandor 'eprouva une vive surprise. Il 'etait 'etonnamment l'eger.
— Ah c`a, commenca le journaliste, est-ce que par hasard, le voleur que je suis, en ce moment, serait vol'e ? est-ce que l’argent ne serait plus l`a ? C’est ferm'e, murmura-t-il tout d’un coup, par une serrure `a secret. Quel peut ^etre le secret de Fant^omas ? Tiens, une id'ee.
Fandor fit jouer la combinaison permettant d’ouvrir l’intrigante petite bo^ite, il amena les lettres H.E.L.E.N.E.
— « H'el`ene », se disait le journaliste. `A coup s^ur Fant^omas doit avoir pris le nom de sa fille comme combinaison.
Le journaliste, une fois encore, venait d’^etre bien inspir'e. `A peine avait-il form'e le nom que la serrure rendit un petit craquement, la patte formant le cadenas se souleva d’elle-m^eme, un ressort poussa le couvercle, le coffre s’ouvrit, il 'etait vide.