L'?vad?e de Saint-Lazare (Побег из Сен-Лазар)
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Ce n’'etait ni Mme Granjeard ni Paul Granjeard qui pouvaient protester.
La m`ere, en effet, 'etait sans cesse retenue, paralys'ee par cette pens'ee que c’'etait son fils, Paul, qui avait tu'e Didier et, d’autre part, Paul avait acquis, croyait-il du moins, la certitude absolue que le meurtrier de son fr`ere n’'etait autre que celle qui lui avait donn'e le jour.
La m`ere et le fils se tordaient les bras, absolument d'esesp'er'es, convaincus que, d’un instant `a l’autre, Juve allait leur annoncer qu’u 'etait venu les voir, officiellement, de la part de la justice, et qu’il allait `a nouveau proc'eder `a leur arrestation.
Robert Granjeard semblait, lui aussi, d'esol'e. Il 'etait plong'e dans les plus sombres r'eflexions, assis dans un angle de la pi`ece, le visage dissimul'e derri`ere ses mains.
Le faux Juve, estimant que ces gens 'etaient au paroxysme de l’'emotion, insinua alors :
— Il n’y aurait pour vous qu’un moyen de vous tirer d’affaire et ce moyen je vous l’apporte.
Les trois Granjeard, avec surprise et espoir, consid'eraient l’imposteur. Celui-ci poursuivit :
— Pour vous innocenter il faut un coupable. Or, ceux sur lesquels, jusqu’`a pr'esent, vous avez jet'e vos vues vous ont 'echapp'e d’une facon ou d’une autre. Il en reste un, c’est Fandor, et Fandor est dispos'e `a assumer, dans une certaine mesure, la lourde responsabilit'e dont il vous d'echargerait. Il veut bien dispara^itre. Il veut bien partir, sa fuite l’accusera. Y consentez-vous ?
Le policier ne pr'ecisait pas, n’achevait pas autrement sa phrase, mais elle avait n'eanmoins un sens tr`es net, les Granjeard ne s’y tromp`erent pas.
Paul et sa m`ere demand`erent ensemble, cat'egoriquement, en gens habitu'es `a traiter avec pr'ecision les affaires de toute nature :
— Combien ?
Sans h'esitation, Fant^omas r'epliqua :
— Cette fois, pas moins d’un million !
Il y eut un instant de silence. Mme Granjeard 'etait devenue toute p^ale, Paul Granjeard laissait 'echapper un profond soupir :
— 'Ecoutez, Monsieur…, commenca-t-il.
— Ne discutons pas, je vous en prie, fit-il, je me fais l`a, b'en'evolement, l’interm'ediaire d’une cause excessivement d'elicate `a plaider. J’agis dans votre int'er^et. Personnellement je n’en tire aucun avantage, je n’ai qu’une chose `a vous dire : c’est un million ou l’arrestation, un million tout de suite.
Mme Granjeard attira Juve `a part, elle s’approcha avec lui de la fen^etre :
— Monsieur, demanda-t-elle en 'etouffant le son de sa voix, sur tout ce que vous avez de plus sacr'e, jurez-moi que vous m’avez dit la v'erit'e lorsque vous avez accus'e mon fils Paul.
Imperturbable et cynique, Fant^omas r'epondit :
— Je vous le confirme, Madame, c’est votre fils Paul qui a tu'e Didier.
— C’est bien, monsieur, dit Mme Granjeard. Je veux que cette affaire-l`a s’arrange, qu’elle s’arrange `a tout prix, vous aurez cet argent, monsieur, je m’en occupe imm'ediatement.
Mme Granjeard fit signe `a son fils Robert, de quitter la pi`ece, Paul Granjeard restait en t^ete `a t^ete avec le faux policier :
— Que vous a dit ma m`ere ? interrogea Paul d’un ton plein d’anxi'et'e.
Fant^omas n’en n’'etait pas `a un mensonge pr`es :
— Mme Granjeard parle de se tuer, elle est affol'ee `a l’id'ee que, peut-^etre, on va s’apercevoir, d'ecouvrir que c’est elle qui, dans un moment de folie a frapp'e mortellement votre fr`ere Didier et elle veut que je paie ce qu’il faut pour acheter les silences, pour d'esorienter la Justice.
— Ah Monsieur, murmura Paul Granjeard, faites cela, je vous en conjure. Merci. Merci.
Paul Granjeard, `a son tour, s’'eclipsa, mais il revint au bout d’un instant, d’un geste suppliant, il s’adressa `a Juve :
— Monsieur, fit-il, le temps de r'ealiser la somme importante qu’il faut et elle est `a votre disposition.
Fant^omas fronca le sourcil :
— Ne pouvez-vous pas la donner aujourd’hui ?
— Demain seulement, fit Paul Granjeard inquiet, mais demain, je vous le jure. Viendrez-vous la chercher ?
Le bandit r'efl'echissait, il 'etait perplexe, ennuy'e :
— Demain, fit-il, c’est bien long. J’aurais pr'ef'er'e… j’ai peur pour vous.
Mais, Fant^omas comprenait que les Granjeard r'eellement n’avaient pas l’argent disponible et que, par cons'equent, il serait parfaitement inutile d’insister, il accepta :
— Toutefois, fit-il, nous ne savons pas si nous ne sommes pas surveill'es les uns et les autres, il importe de d'etourner les soupcons : voulez-vous, nous nous verrons ailleurs que dans votre domicile ? Demain, pr'ecis'ement, je fais une filature aux environs de Montrouge, voulez-vous que nous nous rencontrions `a huit heures pour d^iner au restaurant de L’'Epervier, rue Froidevaux, derri`ere le cimeti`ere Montparnasse ? Ma pr'esence, dans ce lieu ne surprendra personne, et la v^otre passera inapercue.
Les deux hommes prenaient rendez-vous pour le lendemain `a huit heures au restaurant de L’'Epervier.
***
— `A qui ai-je l’honneur de parler ?
M. Havard, directeur de la S^uret'e, venait de poser cette question `a un homme d’une trentaine d’ann'ees, correct, distingu'e, tout v^etu de noir et qui avait demand'e `a ^etre introduit aupr`es de lui pour une affaire importante, disait-il, et de la plus grande urgence.
Conform'ement `a son habitude, M. Havard qui tenait toujours `a faire le plus de choses possibles par lui-m^eme avait recu l’inconnu, et maintenant qu’il se trouvait en t^ete `a t^ete avec lui, dans son cabinet, o`u le visiteur n’avait pas `a craindre d’indiscr'etions, le chef de la S^uret'e l’invitait `a se nommer.
L’inconnu ob'eit :
— Je suis, d'eclara-t-il, Monsieur Robert Granjeard.
M. Havard hocha la t^ete avec un geste poli, n’ayant pas l’air du tout de se souvenir de ce nom qui, depuis quelque temps avait d'efray'e la chronique judiciaire de tous les journaux et provoqu'e les commentaires les plus divers et les plus vari'es.
— De quoi s’agit-il, Monsieur Robert Granjeard ? demanda le chef de la S^uret'e.
— Eh bien voil`a, fit le jeune homme : ma famille, monsieur, est la victime d’un chantage, d’un odieux chantage qu’on exerce contre elle, actuellement, et dont il faut que nous sortions `a tout prix. Ma m`ere est affol'ee depuis la mort de mon fr`ere Didier. Mon fr`ere Paul a des h'esitations incompr'ehensibles. Moi seul conserve un peu de sang-froid dans cette affaire. C’est pour cela que je viens vous parler.