Le magistrat cambrioleur (Служащий-грабитель)
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Pendant ce temps, le voiturier avait attach'e son cheval `a un arbre. Maintenant, il s’emparait de l’un des falots de la voiture, il revenait en courant vers le marquis de Tergall.
— Marchons, dit-il, nous sommes trois, nous sommes de taille `a nous d'efendre, et il faudra bien que le pays cesse d’^etre un coupe-gorge. Depuis quinze jours, tout de m^eme, ce qu’il y en a des aventures.
Marchant presque `a t^atons, prenant garde de faire le moindre bruit, se glissant entre les arbres, s’arr^etant pour 'ecouter le silence, les trois hommes, le voiturier, le marquis de Tergall et Fant^omas p'en'etr`erent dans la for^et.
— Par ici, soufflait de temps `a autre le marquis de Tergall, je reconnais cet arbre. J’ai pass'e l`a.
Ils avanc`erent ainsi pendant une dizaine de minutes, puis, brusquement, alors qu’`a peu pr`es perdus, ne reconnaissant plus rien dans l’obscurit'e de la nuit, `a l’endroit de la for^et o`u ils se trouvaient, le voiturier et le marquis allaient proposer de battre en retraite, Fant^omas poussa un cri :
— Nom de Dieu, je viens de tr'ebucher dans quelque chose, dans un paquet.
Il se baissa, t^ata dans le noir l’obstacle qui avait embarrass'e ses pas. Soudain il appela :
— Le falot, vite, passez-moi le falot.
Le voiturier s’empressa d’ob'eir, dirigea la lueur de la lanterne sur Fant^omas qui venait de s’agenouiller.
Et alors, d’un m^eme mouvement, les trois hommes se rejet`erent en arri`ere.
— Mon Dieu, dit le marquis de Tergall.
— Ah, bougre de tonnerre de chien, grommela le voiturier.
Pour Fant^omas, il ne disait rien.
Sinistre, p^ale, un mauvais pli au coin des l`evres, il contemplait le corps d’un homme 'etendu tout de son long sur le sol, et dont la t^ete fracass'ee lui 'etait totalement inconnue.
Le marquis de Tergall, cependant, le premier sentiment d’horreur pass'e, se rapprochait du cadavre. Il se pencha sur la face grimacante du mort, puis, se relevant, il dit d’une voix 'etrange :
— Mais, c’est M. Chamb'erieux, mon ennemi.
Et le voiturier r'ep'eta :
— C’est Chamb'erieux. Pourtant, c’est vrai. Ah, sapristi, qu’est-ce que cela veut dire ?
D’un mouvement instinctif, le brave homme leva la lanterne qu’il tenait toujours `a la main, en dirigea la lueur tout autour de lui sur les massifs limitant la sorte de clairi`ere o`u gisait le cadavre.
— M. Chamb'erieux assassin'e, poursuivit le voiturier, trouv'e mort. Ah, par exemple. Ce n’'etait donc pas sur vous qu’on tirait, monsieur de Tergall ?
Le voiturier ne laissa le temps de r'epondre, au marquis.
— Tiens, dit-il, en 'etendant le bras et en d'esignant, `a quelque distance, un petit massif de ronces, regardez, voil`a pour s^ur l’arme avec laquelle on a fait le coup.
Le marquis de Tergall, comme Fant^omas, tourna la t^ete, apercut un fusil de chasse abandonn'e l`a, ouvert, avec dans le tonnerre les douilles percut'ees de deux cartouches.
Et tandis que Fant^omas, s’agenouillait encore une fois, retournait le corps, constatait que l’homme avait d^u tomber, atteint par derri`ere, que la mort avait d^u ^etre instantan'ee, le ch^atelain d'eclarait :
— Il faut aller pr'evenir la gendarmerie. Il faut avertir tout de suite. C’est un horrible malheur.
— Ah oui, alors, ajoutait le voiturier. C’est un rudement grand malheur qu’il vient d’arriver, monsieur de Tergall. Voyez-vous, M. Chamb'erieux, tout le monde l’aimait dans le pays. Il 'etait bon garcon et pas fier pour un sou.
Fant^omas ne disait rien. Toujours pench'e sur le cadavre, il r'efl'echissait.
Fant^omas voyait devant lui un horizon de formalit'es, d’interrogatoires, de t'emoignages `a donner.
La d'ecouverte de l’assassinat n’'etait pas en effet de nature `a simplifier le r^ole du bandit. M. de Tergall s’impatientait :
— Allons pr'evenir la justice ? disait-il. Allons d’urgence `a la gendarmerie ?
— 'Evidemment, disait le voiturier, en multipliant les clins d’oeil `a l’endroit de Fant^omas, il faut aller `a la gendarmerie. Bien s^ur, monsieur de Tergall, nous n’allons pas vous laisser tout seul sur la route, vous venez avec nous, n’est-ce pas ?
M. de Tergall, naturellement, se tourna vers Fant^omas :
— Venez, monsieur le marquis, lui dit Fant^omas, venez.
Les trois hommes alors, abandonnant le cadavre dans la nuit, refirent lentement le chemin qu’ils avaient parcouru quelques minutes auparavant.
Fant^omas s’installa `a c^ot'e du voiturier, le marquis de Tergall derri`ere la banquette, assis sur la valise marqu'ee C. P.
— 'Etrange histoire, murmurait le malheureux ch^atelain, 'epouvant'e. Chamb'erieux, Chamb'erieux assassin'e, cela c’est encore plus incompr'ehensible que tout. D’ailleurs, j’aime autant vous l’avouer tout de suite, monsieur : quand on a tir'e, quand j’ai entendu les coups de feu et que je les ai crus dirig'es contre moi, et bien, figurez-vous, oui, figurez-vous que j’ai tout de suite pens'e `a Chamb'erieux. Le malheureux. Ah, c’est abominable tout de m^eme. Et dire que c’'etait pr'ecis'ement sur lui que l’on tirait. Que c’est lui qu’on tuait. Mais qui donc a pu faire ca ? oui, qui ?
Brusquement, le marquis de Tergall interrompit ses lamentations.
— Je perds la t^ete en ce moment, fit-il, mais il y a de quoi. Vous devez comprendre, monsieur, mon 'emotion, apr`es ce que je viens de vous dire ? Au fait, vous allez ^etre, vous aussi, m^el'e `a ces aventures. Vous serez t'emoin. Vous aurez m^eme `a r'ep'eter la facon dont je suis venu vous appeler `a l’aide, comment vous avez d'ecouvert le corps. Vous ^etes pour longtemps `a Saint-Calais ? Vous appartenez probablement `a une maison de commerce ? Vous ^etes voyageur ? Non ?