Le Voleur d'Or (Золотой вор)
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— Je n’ai rien `a dire `a M me Drapier, je veux voir M. Drapier !
— Mais enfin, qu’avez-vous `a lui dire ?
— Des choses importantes et graves. Assurez-lui qu’il ne regrettera pas de m’avoir vu et recu.
Subjugu'ee par l’ascendant de cet homme, Caroline se d'ecidait `a aller trouver son ma^itre.
Le visiteur la rappela.
— Dites `a M. Drapier, fit-il, qu’il s’agit de l’affaire de Firmain.
— Bien, monsieur !
Quelques instants apr`es, dans sa chambre `a coucher o`u il achevait de se v^etir, M. Drapier voyait entrer un homme qui n’'etait autre que le visiteur auquel Caroline avait tout d’abord d'eclar'e que son ma^itre ne recevait pas, puis qu’elle avait annonc'e ensuite.
Tout en enfilant sa jaquette, Drapier, se tournant vers le nouveau venu, lui demanda d’un air rogue :
— Vous ^etes ce M. Mix qui m’a fait passer sa carte `a l’instant ?
L’homme s’inclina l'eg`erement.
— Je suis ce M. Mix qui vous a fait passer sa carte `a l’instant.
— Votre insistance est peut-^etre un peu exag'er'ee, monsieur, ce qui fait que je vous recois, contrairement `a mes habitudes.
— Contrairement `a mes habitudes, monsieur, r'etorqua l’individu, j’ai sollicit'e de vous voir alors qu’en temps ordinaire c’est moi qui suis suppli'e de recevoir les visiteurs !
— Qu’est-ce `a dire, monsieur ? Et quel r^ole remplissez-vous donc ?
L’individu esquissait un l'eger sourire.
— Je suis Mix.
— Je ne pr'etends pas le contraire !
— Il ne manquerait plus que ca ! Et cela ne vous dit donc rien ?
— Cela ne me dit rien ! Votre nom m’est inconnu, monsieur Mix !
Le myst'erieux visiteur souriait toujours.
— J’aurais d^u m’en douter, en effet, car jusqu’`a pr'esent vous n’avez jamais eu affaire `a la justice.
— Et j’esp`ere, interrompit L'eon Drapier, que je n’aurai pas affaire `a elle de longtemps !
L’interlocuteur du directeur de la Monnaie reprocha d’un air scandalis'e :
— Vous avez une m'emoire d'etestable, monsieur, car vous avez pr'ecis'ement affaire `a la justice en ce moment… et il est `a craindre pour vous que vous ayez affaire `a elle pendant longtemps encore !
— Que savez-vous donc ? s’'ecria L'eon Drapier.
— Tout ! fit l’homme. Ou rien… `a votre go^ut !…
De plus en plus, L'eon Drapier 'etait interloqu'e et il se demandait `a qui il avait affaire. Il balbutia, consid'erant fixement son interlocuteur :
— Je ne vous comprends pas du tout, monsieur. Que signifie ce
Enfin, l’homme paraissait dispos'e `a fournir des explications.
Il posa son chapeau sur un coin de table, prit place dans un fauteuil sans y ^etre invit'e, croisa ses jambes l’une sur l’autre et, regardant le plafond comme pour s’inspirer, il commenca, s’exprimant avec 'el'egance, faisant entendre une voix harmonieuse et s'eduisante.
— Vous allez comprendre, monsieur Drapier !
« Vous avez devant vous un personnage… mettons une personne, un monsieur. Ce monsieur s’appelle Mix, et il exerce la profession de policier, disons, pour ^etre plus exact, de d'etective, car en France, ce qualificatif qui d'esigne `a l’'etranger les professionnels de la police, s’applique chez nous aux policiers priv'es.
« Ce Mix, c’est-`a-dire moi, c’est donc un policier priv'e. Je vis de ma profession, monsieur, et comme je pr'etends en bien vivre, je ne donne point mes conseils et ma protection pour rien ! Par contre, lorsqu’on me paie, et vous ^etes capable de bien me payer, j’accorde ma protection tout enti`ere `a mes clients.
« De l`a ma devise : “Tout ou rien”, c’est simple comme vous le voyez !
L'eon Drapier fr'emissait.
— Tr`es simple, en effet, monsieur Mix. Si je crois bien comprendre, vous ^etes une sorte de ma^itre chanteur. Vous avez appris les ennuis que j’'eprouve actuellement et vous venez me menacer !
M. Mix se leva :
— Je ne menace jamais, monsieur. Je fais quelquefois des promesses qui se r'ealisent toujours. Quant `a vous faire chanter, non, monsieur ! Cela n’est point mon r^ole. Et pour parler net, pour r'esumer, je viens vous offrir simplement ceci :
« Vous m’avez accord'e cinq minutes d’attention, vous r'efl'echirez cinq minutes `a ce que je vais avoir l’honneur de vous dire, et cinq minutes apr`es, vous m’aurez sign'e un engagement de trois mois `a raison de mille francs par mois, en 'echange duquel je m’engage `a vous d'ebarrasser de tous les soucis que vous 'eprouvez `a l’heure actuelle et `a vous donner tous les 'el'ements de votre innocence dans l’affaire Firmain comme dans l’affaire de la fille Poucke. Cela fait au total un quart d’heure. Il est maintenant, si j’en crois votre pendule, huit heures et demie du matin, `a neuf heures moins un quart nous en aurons termin'e !
L'eon Drapier voulut placer une parole, son interlocuteur l’en emp^echa :
— Inutile ! fit l’homme, je commence. Notez l’heure, je vous prie, huit heures trente et une !
L’individu, d`es lors, s’installait `a nouveau dans le fauteuil qu’il venait d’abandonner. Il sortit de sa poche un 'etui `a cigarettes, en offrit une `a L'eon Drapier qui refusa et, nullement vex'e, se mit `a fumer.
— R'esumons les faits, d'eclara cet homme 'etrange.
« Dans la nuit du 26 au 27, le valet de chambre que M. et M me Drapier ont engag'e de la veille est myst'erieusement assassin'e dans le cabinet de travail de son ma^itre.