Le Cadavre G?ant (Гигантский кадавр)
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Ils restaient ainsi, serr'es l’un contre l’autre, sans songer `a s’arracher `a cette douce 'etreinte.
Leurs larmes se confondaient, et ils 'echangeaient de tendres paroles :
— Ma m`ere !
— Fandor !…
— Charles !… Charles !…
— Maman !…
Puis, M me Rambert, doucement, 'ecartait Fandor de sa poitrine. Elle appuya ses mains tremblantes sur les mains du jeune homme.
— Laisse-moi te regarder, dit-elle, Fandor.
Fandor, sans mot dire, reculait, fixait sa m`ere, qui ne se lassait pas de le contempler.
— Oh ! murmura-t-elle de sa voix grave et harmonieuse, comme je te reconnais bien, mon petit ! Je te retrouve tel que tu 'etais autrefois, avec tes boucles blondes en moins ! Regarde, mon petit Charles, regarde ce portrait…
Et levant sa main vers le mur `a c^ot'e de son lit, M me Rambert d'esignait `a Fandor une petite photographie, toute pass'ee, tr`es jaunie, le portrait d’un b'eb'e de quatre ou cinq ans, dans lequel le journaliste avait grand’peine `a se reconna^itre, lorsqu’il 'etait enfant.
M me Rambert levait les yeux au ciel, elle soupira profond'ement.
— Mon existence, fit-elle, a 'et'e terrible, affreuse. Tu sauras tout ce que j’ai souffert. Mais peu importe, du moment que je te retrouve, que tu es vivant, que tu es beau, et que tu es digne de ton nom. Car je sais, J'er^ome Fandor, articulait-elle avec un sourire, que tu es un h'eros !
H'elas ! M me Rambert p^alissait soudain.
Elle portait les mains `a sa poitrine.
— Ma m`ere… ma m`ere, interrogeait Fandor alarm'e, qu’avez-vous donc ?
M me Rambert balbutiait quelques paroles inintelligibles, puis, exhalant une l'eg`ere plainte, elle retombait en arri`ere.
— Mon Dieu ! hurla le journaliste…
Et, d`es lors ses yeux s’'ecarquillaient, ses cheveux se dressaient d’'epouvante sur sa t^ete.
Il se pr'ecipitait vers sa m`ere inerte.
Il lui t^atait le pouls.
— Elle est 'evanouie ! Que faire ?
Sur un gu'eridon voisin du lit, Fandor apercut une ordonnance de m'edecin.
Il regardait l’ordonnance, voyait un num'ero de t'el'ephone. Le journaliste cherchait autour de lui. Encore qu’il f^ut effroyablement troubl'e, il ne perdait point son sang-froid, il d'ecouvrait un appareil t'el'ephonique `a l’extr'emit'e de la pi`ece ; il d'ecrocha le r'ecepteur :
— Le 7, donnez-moi le 7, `a Dom`ene ! demanda-t-il.
C’'etait le num'ero qu’il avait vu sur l’ordonnance.
On r'epondait presque aussit^ot.
— All^o ! c’est vous, docteur ? fit Fandor.
Une voix inconnue du journaliste r'epondit, `a l’autre bout du fil :
— C’est moi. Qui m’appelle ?
— Venez d’urgence, hurla Fandor, chez M me Rambert…
Mais le journaliste se reprenait :
— Je veux dire chez M me Verdon !…
— Eh bien, docteur ?
— Eh bien, monsieur, ce ne sera rien. Mais cependant la situation est grave ; depuis quelques jours, M me Verdon, qui est d’une sant'e d'elicate et qui supporte mal les 'emotions, vient d’avoir son existence singuli`erement troubl'ee, par le fait de diverses all'ees et venues de personnes 'etrang`eres dans sa maison.
» Je n’ai pas `a juger l’attitude de M me Verdon qui recoit qui elle veut, mais j’estime que cette agitation lui est tr`es nuisible.
» Voil`a la deuxi`eme crise cardiaque dont elle est victime en deux jours, et il ne faut pas qu’une troisi`eme survienne. Puisque vous ^etes de sa famille, monsieur, je vous recommande le plus formellement de lui 'eviter la moindre 'emotion !
Le docteur avait parl'e au moment o`u il quittait la chambre `a coucher de celle qu’il prenait pour M me Verdon. L’interlocuteur auquel il s’adressait, et qui le reconduisait en silence jusqu’au bas de l’escalier, c’'etait Fandor.
Le journaliste remonta lentement vers sa m`ere ; il soupira profond'ement.
— Ce docteur vient de la sauver, fit-il, mais je me rends compte qu’il dit vrai et que la moindre 'emotion pourrait la tuer.
» Mon Dieu ! mon Dieu ! faites qu’il ne survienne rien qui soit de nature `a lui faire du mal !
Le journaliste, non sans inqui'etude, songeait `a l’avenir !
Il rentra dans la chambre, M me Rambert, d'esormais remise de sa crise, lui souriait tendrement.
— Mon enfant, dit-elle d’une voix repos'ee, presque joyeuse, un bonheur n’arrive jamais tout seul, tu viens de m’^etre rendu ; or, je viens d’entendre le bruit des grelots d’une voiture qui m’est famili`ere, et qui ram`ene quelqu’un que j’aime, que tu aimes 'egalement…
Fandor frissonna sans comprendre.
M me Rambert lui annoncait :
— Charles, mon enfant, dans un instant tu vas…
M me Rambert s’arr^etait de parler mais ses yeux se tournaient instinctivement dans la direction de la porte qui venait de s’ouvrir.
M me Rambert, dont le visage s’animait et se colorait par moments, regardait 'egalement dans la direction de l’entr'ee.
La porte de la chambre qui s’'etait ouverte, quelques instants apr`es l’arriv'ee de la voiture, livrait passage `a un homme aux 'epaules vo^ut'ees, `a la grande barbe blanche, que Fandor au premier abord, estimait ne point conna^itre.
Ce personnage, qui s’avancait, s’arr^eta net, en apercevant le journaliste et parut tressaillir.
Toutefois, apr`es ce court moment d’h'esitation, il continua `a se rapprocher du lit dans lequel 'etait 'etendue M me Rambert.