Le Cadavre G?ant (Гигантский кадавр)
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Juve s’'ecartait du groupe, prenait Fandor `a l’'ecart.
Le journaliste sugg'erait :
— Il s’est suicid'e ?
Mais Juve hochait la t^ete.
— Suicid'e ? J’en doute ! Les gens de l’esp`ece de Gauvin ne se tuent pas, car il faut avoir du courage pour se donner volontairement la mort…
— Alors, Juve ? demanda Fandor.
— Alors, poursuivit le policier, je me demande s’il ne s’agit pas l`a d’un nouveau crime de Fant^omas !
Puis le policier ajoutait :
— Je le saurai d’ailleurs d’ici une heure !
— Juve ! Juve ! s’'ecria Fandor, vous deviez me conduire jusqu’aupr`es de ma m`ere ?
— Mon devoir, r'epondit Juve, est de ne pas perdre une minute, et de courir sur les lieux o`u l’on a trouv'e le cadavre du malheureux notaire, afin de me renseigner sur les causes de sa mort…
» Quant `a toi, Fandor, poursuivit Juve, ta m`ere t’attend, pr'eoccup'ee, il importe que tu ailles imm'ediatement la rassurer sur ton sort.
» Il faut, en outre, que tu sois l`a, aupr`es d’elle, afin de la prot'eger lorsque Fant^omas reviendra, furieux de n’avoir pu prendre la fortune qu’il convoitait depuis si longtemps, et qu’il se croyait sur le point de voler…
» Va Fandor ! `A tout `a l’heure…
Fandor avait compris que la d'ecision de Juve 'etait irr'evocable, et, au surplus, le journaliste se r'ejouissait `a l’id'ee que d'esormais, sans perdre un instant, il allait pouvoir courir jusqu’`a Dom`ene, et y retrouver enfin cette m`ere que depuis si longtemps le hasard et le mauvais sort tenaient 'eloign'ee de lui…
— Entrez ! fit une voix douce et faible.
Fandor avait la main sur le bouton de la porte, il crut d'efaillir en entendant cette parole.
Le journaliste, apr`es avoir quitt'e Juve, avait trouv'e sur la place de Grenoble un taxi automobile auquel il donnait, d’une voix angoiss'ee, l’adresse de M me Verdon, `a Dom`ene.
Lorsqu’il arrivait dans la propri'et'e, le journaliste sonnait en vain `a la grille du jardin.
Nul ne lui r'epondait, `a l’exception des aboiements du gros chien Dick qui, malgr'e ses efforts, ne parvenait pas `a se lib'erer de la cha^ine qui le retenait attach'e `a sa niche.
Fandor n’attendait pas longtemps.
Inquiet de n’avoir point de r'eponse, il enjambait la grille, au risque de s’empaler sur les pointes de fer qui la surmontaient.
Il traversait en courant le petit parc, arrivait au perron de la maison.
La porte 'etait entreb^aill'ee, Fandor la poussa, s’introduisant dans le vestibule.
Il jetait un coup d’oeil `a droite et `a gauche, apercevait un salon simplement meubl'e, de bourgeoise apparence, puis une petite salle `a manger confortable ; plus loin il reconnaissait la porte de l’office et des cuisines.
Fandor, dont le coeur battait `a se rompre, montait rapidement au premier 'etage, plusieurs portes se trouvaient de part et d’autre du palier, il frappait `a l’une d’elle, au hasard, et c’est alors qu’une voix douce et lointaine, nullement m'efiante, lui avait doucement r'epondu : entrez !
Fandor, cependant, n’osait pas tourner le bouton de la porte…
Au surplus, il 'etait incapable d’agir, de remuer.
Il lui semblait que soudain une 'emotion trop violente venait de le paralyser, de l’immobiliser sur place.
Qui donc avait r'epondu ?
Qui donc allait-il voir ?
Fandor n’osait se dire qu’une mince cloison, d'esormais, seulement, le s'eparait de celle qui lui avait donn'e le jour !
Fandor se demandait s’il devait entrer…
Il ne savait pas… Il ne savait plus… Il ne comprenait qu’une chose, c’est qu’il 'eprouvait une folle envie de se jeter aux genoux de sa m`ere, et il n’avait pas la force de faire un mouvement !
Dans le silence de la maison, qui semblait vide, Fandor, `a nouveau, entendit :
— Entrez ! Entrez donc !
Le journaliste fit un effort supr^eme sur lui-m^eme : il eut l’impression qu’il bondissait, et d`es lors, poussant la porte, comme furieusement, il se pr'ecipita dans la pi`ece, et il s’arr^eta net au milieu…
En face de lui se trouvait un grand lit, dans lequel 'etait couch'ee une vieille dame, aux cheveux blancs comme de la neige.
Tout d’abord, en voyant cette brusque apparition, il avait sursaut'e : les yeux au vif regard, `a l’expression si douce, s’'etaient fix'es dans les yeux de Fandor.
Et d`es lors, le journaliste s’'etait senti remuer jusqu’au plus profond de son ^etre.
Qu’elle 'etait cette digne et noble vieille femme, aux mains diaphanes, au visage pur, aux traits beaux et distingu'es ?
Le journaliste sentit des sanglots lui 'etreindre la gorge, des larmes br^ulantes lui monter aux yeux.
Il avait enlev'e son chapeau d’un geste machinal, il joignait les deux mains, s’avancant lentement et tombant `a genoux au chevet du lit, il articula d’une voix indistincte, ces mots simples :
— Ma m`ere !… ma m`ere !… ma m`ere !
Mais au m^eme instant, Fandor sentait que deux bras ti`edes se nouaient autour de son cou, puis il entendit `a nouveau cette voix si douce et si touchante, qui murmurait sur le ton d’une indicible 'emotion :
— J'er^ome Fandor !… Charles !… mon petit Charles !… mon enfant !
Une seconde ne s’'ecoulait pas que l’enfant embrassait sa m`ere, que la m`ere 'etreignait dans ses bras son enfant.