La fille de Fant?mas (Дочь Фантомаса)
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D'ej`a ils s’'etaient jet'es dans les bras l’un de l’autre.
— Juve !
— Fandor !
C’'etaient en effet Juve et Fandor qui, par le fait des circonstances les plus ahurissantes, se trouvaient r'eunis sur cette locomotive lanc'ee `a toute allure `a travers la campagne.
Ainsi les deux amis se retrouvaient. Apr`es s’^etre pendant des semaines couru l’un apr`es l’autre, ils 'etaient enfin en pr'esence.
Que s’'etait-il donc pass'e ?
***
Tandis que Juve tr'epignant d’impatience, et seul sur sa locomotive, attendait que les hommes d’'equipe vinssent accrocher le wagon cellulaire, o`u se trouvait Fandor, `a la locomotive, voici la s'erie d’'episodes qui s’'etait d'eroul'ee.
Le chauffeur dont l’absence avait paru inexplicable 'etait en effet all'e rechercher un marteau oubli'e dans la r'eserve `a charbon.
Or, comme il venait de retrouver l’outil qui lui 'etait indispensable et, au moment o`u il se disposait `a rejoindre son poste, il avait 'et'e l^achement frapp'e par derri`ere d’un coup de poignard qui lui avait perfor'e le poumon.
Le malheureux, vomissant des flots de sang par la bouche et les narines, s’affaissa sur le sol, saupoudr'e de charbon, sans un mot, sans un geste, foudroy'e. Le crime avait 'et'e commis avec une adresse, une dext'erit'e inimaginables. Il avait, en outre, 'et'e ex'ecut'e sans t'emoin, et le meurtrier, une fois ce forfait accompli, s’'etait rapidement enfui, laissant son arme plant'ee entre les deux 'epaules de sa victime. Cet homme aussit^ot avait couru en direction du wagon cellulaire, il avait pass'e au ras de la locomotive, et apr`es avoir jet'e un coup d’oeil narquois `a Juve qui, toujours sur sa plate-forme ne l’apercevait pas, il s’'etait introduit dans la voiture o`u Fandor 'etait seul avec son jeune gardien. Ce dernier, surpris par la brusque irruption de l’inconnu, avait mis l’arme au poing :
— Que voulez-vous ?
Le nouvel arrivant, avec une surprenante rapidit'e s’'etait jet'e `a la gorge du factionnaire, lui avait enserr'e le cou entre deux mains noueuses et robustes. Le malheureux ge^olier 'etait tomb'e 'etourdi. Quelques instants plus tard, il mourait 'etouff'e.
L’assassin, alors, s’'etait redress'e, ses yeux brillant d’un 'eclat 'etrange, et quiconque l’aurait vu `a ce moment, le visage contract'e, la bouche mauvaise anim'ee d’un rictus f'eroce, n’aurait pas manqu'e de reconna^itre le bandit l'egendaire dont le nom seul fait tressaillir les hommes : Fant^omas.
C’'etait Fant^omas, en effet, qui venait de commettre en l’espace de quelques instants ces deux assassinats.
Toutefois, si le meurtre du chauffeur s’'etait effectu'e sans t'emoin, quelqu’un avait vu Fant^omas 'etrangler le ge^olier… et ce quelqu’un en assistant `a ce drame horrible 'etait devenu livide car il se doutait bien qu’il allait `a son tour ^etre la victime du monstre et que rien ne pourrait lui permettre d’y 'echapper : il 'etait hors d’'etat de se d'efendre avec des menottes aux mains, et les chevilles entrav'ees. Ce t'emoin n’'etait autre que Fandor.
Pour la premi`ere fois depuis le d'ebut de sa sinistre odyss'ee, Fandor revoyait Fant^omas.
Fant^omas cependant s’'etait jet'e sur le journaliste, mais loin de le frapper, il s’'etait 'evertu'e `a lui rendre sa libert'e.
En un clin d’oeil, l’extraordinaire bandit avait fait sauter les menottes, avait d'etach'e la cha^ine qui entravait les jambes du jeune journaliste.
— Fandor, s’'etait 'ecri'e Fant^omas, je vous rends votre libert'e, fuyez.
Le monstre saisit le jeune homme aux 'epaules et celui-ci abasourdi, ob'eit, c'edant `a la pouss'ee brusque qui le jetait hors du compartiment cellulaire, sur la voie du chemin de fer.
Le journaliste, hagard, regardait le bandit sans comprendre.
Fant^omas avait insist'e :
— Cette locomotive est pr'epar'ee pour vous. Montez-y, d'eclenchez le tiroir d’admission de vapeur. La premi`ere poign'ee `a votre gauche. La locomotive partira. Tout est pr'epar'e.
— Quoi ?
Mais le bandit, riant d’un rire sardonique, s’'etait content'e d’ajouter :
— Ob'eissez, et souvenez-vous, Fandor, que vous devez la vie `a Fant^omas.
Cela, au milieu d’un tapage infernal, dans le brouhaha que faisait la locomotive haletante au moment pr'ecis o`u les cylindres se purgeaient. Mais Fandor, avait hurl'e :
— Fant^omas, Fant^omas, je n’accepte pas.
— Acceptez, ordonna Fant^omas, ou alors…
— Je n’accepte pas, r'ep'etait Fandor.
Fant^omas avait bondi sur la voie et empoign'e Fandor, qu’il d'eposa sur la locomotive. Puis, il tira la barre de mise en marche pendant que Fandor, abasourdi, incapable de r'esister, se laissait tomber sur la plate-forme `a c^ot'e du foyer.
Cependant que la locomotive se mettait en marche, Fant^omas, rest'e sur la voie, se rapprochait de la voiture cellulaire et d'echargeait son revolver, non sans avoir au pr'ealable, salu'e le d'epart de la machine de ces paroles aussi cruelles qu’'enigmatiques :
— Je vous ai promis, Juve et Fandor, de vous r'eunir… car je me suis jur'e de vous faire p'erir ensemble.
Puis, comme le coup de feu avait attir'e du monde dans le voisinage de la voiture cellulaire, et que les gens qui accouraient manifestaient leur surprise de voir partir la machine, Fant^omas avec une assurance inou"ie, un aplomb admirable, hurlait pour les renseigner :
— Au secours… au secours… le prisonnier vient de s’'echapper de sa cellule et il a assassin'e son gardien.
***
La locomotive trouait l’espace, lanc'ee `a travers la campagne, br^ulant les signaux, passant en trombe dans les petites stations de la banlieue et des faubourgs de Durban. Juve et Fandor ne s’apercevaient de rien, tant ils 'etaient `a la fois surpris et satisfaits de se trouver ensemble. Tous deux parlaient `a la fois, s’interrogeaient sans ordre, se questionnaient sans 'ecouter leurs r'eponses. Ils avaient, en effet, de quoi ^etre passablement interloqu'es. Juve retrouvait Fandor libre et miraculeusement sauv'e. Fandor se trouvait en pr'esence de Juve qu’il croyait encore en Europe.