La fille de Fant?mas (Дочь Фантомаса)
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— Un petit temps de course, songea-t-il, me r'echauffera.
Jupiter avait tant couru la nuit pr'ec'edente qu’il ne pouvait 'evidemment s’effrayer d’avoir encore `a courir quelques instants.
Le bon noir pr'ecipita sa marche, tout en sifflant et en chantonnant l’air boer bien connu :
« O, Miefje, jy es toch so lief en jy is toch so soet » (Oh ! Manon, tu es si gentille et tu es si douce aussi…)
C’est que Jupiter 'etait d’excellente humeur.
Ne tenait-il pas, en effet, dans sa main droite le portefeuille si myst'erieusement d'ecouvert et dans lequel il avait eu la joie de retrouver les cent billets de mille francs qui lui avaient 'et'e vol'es quelque temps auparavant ?
— Mme Laetitia, songeait Jupiter, va en ^etre stup'efaite.
Et `a cette pens'ee Jupiter marcha encore un peu plus vite…
Le noir, en effet, `a peine sorti de sa presqu’^ile, avait d'ecid'e, avec la spontan'eit'e qui est particuli`ere `a ceux de sa race, d’aller mettre tous ses amis et connaissances, au courant des heureux incidents de la nuit.
La vieille Laetitia 'etait pour lui une intime, car Laetitia bien souvent lui avait rendu service, c’'etait chez elle qu’il irait montrer d’abord le portefeuille retrouv'e.
H'elas, le brave Jupiter ne s’attendait pas `a l’horrible spectacle qu’il devait trouver `a la ferme !
`A peine avait-il ouvert la porte de la grande salle que son portefeuille lui 'echappa des mains, cependant que, hurlant de frayeur, il s’'elancait vers un coin de la pi`ece…
L`a, gisait, demi-morte, r^alante, le corps agit'e de soubresauts convulsifs, la vieille Laetitia.
Jupiter, fou de terreur, se pencha sur elle, criant :
— Mais qu’est-ce que li a ? qu’est-ce que li a ?
Le noir fit tant de vacarme que bient^ot des b^atiments de la ferme o`u des domestiques habitaient, d’une ferme voisine m^eme, on accourut.
Jupiter, entendant que l’on venait, se releva et, naturellement chercha des yeux sur le sol le portefeuille qu’il avait laiss'e choir dans son premier moment de stup'efaction…
Or ce portefeuille que Jupiter avait parfaitement vu rouler contre la muraille n’'etait plus l`a. Il avait disparu. Il s’'etait 'evanoui.
Quand Jupiter 'etait entr'e, il avait tir'e sur lui la porte, il en 'etait certain et pourtant, cette porte 'etait ouverte, grande ouverte maintenant.
Le pauvre Jupiter toutefois, avait `a peine le temps d’'eclater en sanglots et de commencer `a se lamenter, que les 'ev'enements, encore une fois se pr'ecipit`erent.
Jupiter fut bouscul'e par la foule de ceux que ses cris avaient attir'es. Les arrivants avaient apercu Laetitia, couverte de sang, relev`erent la vieille femme, ils la questionn`erent :
— Mais qu’est-ce que c’est ?
— Que vous est-il arriv'e ?
— Qui vous a fait cela ?
Et `a moiti'e folle de douleur, Laetitia r'epondit :
— `A l’assassin, c’est lui, lui, arr^etez-le.
Certes, Laetitia ne se rendait point compte de l’affreuse erreur qu’elle commettait.
Ceux qui la tenaient encore dans leurs bras se h^ataient, en effet, de la d'eposer sur le grand lit de sa chambre, puis, d’un m^eme mouvement, sans avoir eu besoin de se concerter, ils se pr'ecipitaient dans la grande salle, o`u Jupiter, toujours affol'e, hurlait…
Le noir vit arriver sur lui tous ces gens dont les traits respiraient la col`ere, et dont les uns hurlaient :
Et Jupiter, d'esireux avant tout d’'eviter un sort qu’il ne devinait que trop, bondit hors de la pi`ece, claqua la porte sur lui, s’en fut, courant `a perdre haleine, droit devant lui, sur la route de Durban.
Et derri`ere lui, les gens, fous de rage, 'epouvant'es par l’horreur du drame qu’ils lui imputaient, haineux contre le noir par cela seulement qu’il 'etait noir, prirent la chasse, hurlant :
— `A l’assassin. `A mort. Arr^etez-le.
15 – LE TRONC D’ARBRE MYST'ERIEUX
Il n’'etait que huit heures du soir, mais tout d'ej`a semblait dormir dans Diamond House. Aux deux larges fen^etres sans contrevents, aucune lumi`ere ne brillait et le silence le plus complet r'egnait sur la maison comme dans le jardin.
La nuit aurait 'et'e profonde sans quelques rayons de lune qui, 'eclairant la facade et les massifs d’une lueur ind'ecise, animaient de reflets d’argent la masse sombre des bosquets et semaient des perles brillantes dans la vasque d’un petit jet d’eau.
Ces jeux de lumi`ere donnaient au jardin de Hans Elders, un peu triste d’habitude, un air de f'eerie. On aurait 'et'e surpris de ne pas voir, sur un des nombreux bancs install'es aux pieds des arbres, un couple d’amoureux r^eveurs.
Mais non, il n’y avait personne, le jardin 'etait d'esert, silencieux, le sommeil avait d'ej`a envahi au moins depuis quelque temps le cottage du riche chercheur de diamants.
Une ombre l`a-bas, au pied d’un arbre ? Une combinaison bizarre de feuilles qui dessinait ainsi sur le sol, dans cette large raie de lumi`ere, un profil humain ? Non… on avait remu'e. C’'etait un homme.
L’ombre qui rampait sur l’herbe songeait :
« Hans Elders doit empiler des 'ecus dans son coffre-fort et la belle Winie r^ever `a ses amours. La belle Winie, comme elle m’intrigue cette jeune fille. Si j’en croyais ses regards transparents et son sourire paisible, ce serait la personne la plus insouciante du monde. Mais h'elas, c’est aussi la fille de son vieux coquin de p`ere, et bon chien chasse de race. Alors je ne sais que croire. Elle a parfois des allures myst'erieuses qui donnent `a penser. Co^ute que co^ute, il faut que je sache ce qui en est. Quand je devrais rester sous ses fen^etres jusqu’`a demain matin, je me rendrai compte de la facon dont elle va passer la nuit. Si je ne m’abuse, sa chambre est ici, au premier 'etage. Il va me suffire de monter jusqu’`a la premi`ere branche de ce baobab et je me trouverai `a une hauteur suffisante pour voir chez elle.