La gu?pe rouge (Красная оса)
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Les choses avaient chang'e. L’amant de la grande dame 'etait devenu plus cruel, plus sanguinaire, mais il 'etait rest'e aim'e. Lady Beltham s’'etait d'egrad'ee pour lui, et folle de cet ^etre, avait d'ecid'e d’en faire sa victime.
Car lady Beltham 'etait toujours convaincue que son assassin, c’'etait Fant^omas.
Et d`es lors, dans son coeur de femme 'eprise, 'etait n'ee une haine irr'eductible qui s’aggravait d’un sentiment effroyable de jalousie. Si Fant^omas avait voulu la tuer, c’est parce qu’il en aimait une autre et, depuis ce moment, depuis qu’elle avait miraculeusement 'echapp'e `a la mort, lady Beltham ne songeait plus qu’`a une chose : se venger du tra^itre, avant d’expirer.
Lady Beltham, soudain tressaillit. Un bruit se faisait entendre dans le jardin. Un bruit de pas. La grande dame pr^eta l’oreille.
— Mon Dieu, balbutia-t-elle, que votre volont'e s’accomplisse.
Lady Beltham sentit, devina plut^ot, que l’heure solennelle avait sonn'e. D’une main qui ne tremblait pas, elle arma son revolver et attendit.
Les bruits de pas s’'etaient att'enu'es, puis, sur le perron de la maison, lady Beltham vit para^itre quelqu’un : une seule personne.
C’'etait une femme, Sarah Gordon.
Lady Beltham la reconnut et son coeur se serra, une violente douleur l’'etreignait, pareille `a une morsure.
N’avait-elle pas d'esormais, devant elle, la femme qu’elle croyait ^etre la ma^itresse de Fant^omas ? Ne l’avait-elle pas vue s’enfuir, il y avait de cela une dizaine de jours, entra^in'ee par l’homme `a la cagoule, alors qu’elle se trouvait dans cette maison, alors que lady Beltham elle-m^eme ne pouvait s’'elancer sur leurs traces, oblig'ee qu’elle 'etait de se d'efier de Fandor et de fuir devant les recherches que le journaliste faisait dans sa maison ?
Si lady Beltham n’avait 'ecout'e que sa jalousie, elle aurait tir'e l^achement sur la silhouette de l’Am'ericaine, qui se pr'ecisait de l’autre c^ot'e de la porte, se rapprochait d’elle peu `a peu.
Mais lady Beltham se dominait. Avant d’agir, elle voulait savoir la v'erit'e tout enti`ere, avant de se venger. Il lui fallait acqu'erir la certitude qu’elle 'etait trahie de toutes les facons.
Et lady Beltham d'ecida de parler `a cette femme, de l’interroger, d’obtenir ses aveux.
Mais soudain, Sarah Gordon, qui s’avancait, recula dans l’ombre du jardin. On venait d’entendre ronfler dans l’avenue une automobile, dont trois hommes descendaient. La lueur des phares de la voiture permettait `a lady Beltham de les voir dans la nuit. Elle poussa un cri de d'esespoir. Ces hommes marchaient se tenant par le bras, semblait-il, en r'ealit'e ils 'etaient deux, plac'es de part et d’autre d’un troisi`eme personnage qu’ils soutenaient 'etroitement, la main sous les aisselles.
Or, ce troisi`eme personnage 'etait drap'e dans un grand manteau noir, il avait une cagoule sur le visage.
Lady Beltham crut reconna^itre Fant^omas.
Elle ne douta pas un instant de ce qui 'etait arriv'e : on amenait Fant^omas chez elle, mais Fant^omas arr^et'e, ligot'e. Et d`es lors, il lui semblait qu’un vide immense se faisait dans son coeur, que tout s’'ecroulait autour d’elle. Fant^omas arr^et'e, Fant^omas r'eduit `a l’impuissance, Fant^omas prisonnier. Non, cela n’'etait pas possible. Et pourtant…
Ses yeux s’'ecarquillaient. Il n’'etait pas possible de douter de ce qu’elle voyait. Les trois hommes s’approchaient de la maison tragique, avec l’intention bien nette d’y p'en'etrer.
Tandis qu’ils gravissaient le perron, lady Beltham reculait et, lorsque la porte forc'ee par une fausse cl'e s’ouvrit, lady Beltham, par la sortie de derri`ere, gagna le jardin de la maison. Elle voulait voir sans ^etre vue, elle cherchait `a comprendre ce qui allait se passer, ce que signifiaient ces pr'esences.
Alors qu’elle contournait sa tragique demeure, et s’avancait avec pr'ecaution, une autre personne, dissimul'ee derri`ere un massif aupr`es du perron, avait vu elle aussi l’arriv'ee des trois hommes, et cette femme qui les regardait anxieusement, c’'etait Sarah Gordon.
L’Am'ericaine s’attendait `a l’arriv'ee de Fant^omas, ainsi qu’`a celle de Dick. H'el`ene ne lui avait-elle pas annonc'e la venue des deux adversaires `a cette maison ? Sarah chercha des yeux H'el`ene qui, jusqu’alors, l’avait accompagn'ee. La jeune fille avait disparu.
Sarah Gordon, au bout d’un instant, ne songeait plus `a sa compagne. Elle regardait les trois hommes et poussa un cri de surprise.
Certes, elle ne voyait pas les traits de Fant^omas sous sa cagoule, mais elle voyait ses mains, sortant des plis de son grand manteau noir. Elles 'etaient toutes blanches, elles avaient une teinte de cire, ces mains sur lesquelles se fixait le regard de Sarah Gordon. L’Am'ericaine poussa un cri. `A l’un des doigts de l’homme `a la cagoule qui paraissait bless'e, brillait un diamant : le diamant d’une bague que Sarah Gordon avait donn'ee `a Dick.
Une crainte affreuse s’emparait d’elle. Les trois hommes venaient d’entrer dans le vestibule. Ils avaient fait asseoir sur un fauteuil l’homme que lady Beltham avait cru ^etre Fant^omas. L’homme `a la cagoule, l^ach'e par ses deux compagnons, demeurait inerte. Sarah se pr'ecipita. Elle parvint jusqu’au myst'erieux personnage, elle souleva le masque cachant le visage. Un cri d’'epouvante s’'echappa de ses l`evres. L’homme qu’elle avait pris pour Fant^omas, c’'etait Dick, mais un Dick blafard, un Dick portant `a la gorge une effroyable blessure : Dick l’acteur 'etait mort.
Sarah Gordon chancela, tomba sur le corps de son amant. Elle 'etait folle. Elle le serrait contre elle, voulant hurler sa douleur.
Ses l`evres, simplement, balbutiaient :
— Dick ! Dick !
Et elle s’'ecroula.
Du fond du jardin, lady Beltham avait vu cette sc`ene, mais sans la comprendre. Elle ne s’'etait pas apercue de l’extraordinaire substitution qui avait eu lieu et elle ne retenait qu’une chose, c’est que Fant^omas 'etait l`a dans cette maison, et qu’une femme s’'etait pr'ecipit'ee sur lui, qu’elle le couvrait de baisers, follement 'eprise.