L'assassin de lady Beltham (Убийца леди Бельтам)
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Et aussit^ot, il d'eclara, apercevant l’inspecteur de la S^uret'e :
— Je vous fais toutes mes excuses. Je vous demande bien pardon d’agir aussi brutalement, mais il fallait que je vous voie `a toute force.
Le policier venait de regarder fixement son interlocuteur :
— Vous ^etes, dit-il, si je ne me trompe, M. Dick, l’acteur du Th'e^atre Ornano, le premier prix du Conservatoire, qui, d'edaignant la Com'edie-Francaise, pr'ef`ere jouer dans les 'etablissements de quartier ?
— Je vous en prie, interrompit l’artiste – car c’'etait lui en effet – ne jugez pas ma carri`ere dramatique, mais 'ecoutez-moi, renseignez-moi :
— De quoi, s’agit-il, fit Juve, qui, d'esignant Fandor du geste de la main, ajouta : vous pouvez me parler, monsieur, monsieur est mon ami, J'er^ome Fandor.
Dick s’inclina, cependant qu’un l'eger sourire ironique errait sur ses l`evres :
— Je connais M. Fandor, murmura-t-il.
Puis, il s’interrompit pour reprendre, en se tournant vers Juve :
— Monsieur, fit-il, en se passant la main sur le front, vous voyez devant vous un homme troubl'e, tr`es troubl'e. Je suis immens'ement 'epris d’une femme.
— Passez, monsieur, je sais, nous savons qu’il s’agit de miss Sarah Gordon, l’Am'ericaine.
— Comment le savez-vous ?
— Je le sais, parce que je le sais, r'epliqua Juve, et l’essentiel, c’est, n’est-ce pas, que je le sache. En quoi cela peut-il, d’ailleurs, nous int'eresser ?
— Ah, monsieur, ne raillez pas ma douleur… Sarah a disparu, subrepticement, depuis hier. Mes efforts pour la retrouver ont 'et'e vains. Je viens m’adresser `a vous, monsieur, car je vous sais le plus subtil, le plus adroit des policiers.
Juve se leva :
— J’ai horreur des compliments, monsieur, et je vous remercie, par avance, de tout ce que vous comptiez me dire. J’avais d’ailleurs pr'evu votre visite, je vous attendais.
— Ah vraiment, pourquoi ?
— Parce que, r'epliqua Juve, 'etant donn'e que vous cherchiez miss Sarah Gordon, il 'etait naturel que, ne l’ayant pas d'ecouverte, vous veniez demander o`u elle se trouvait `a la seule personne qui soit capable de vous renseigner.
— Et cette personne, monsieur ? interrogea Dick.
— Cette personne, c’est moi. J’ajoute que vous n’avez rien `a craindre pour miss Sarah Gordon, et que…
Juve s’interrompit encore. Jean venait d’entrer dans la pi`ece, contrairement `a ses habitudes, car jamais il ne d'erangeait son patron. Il d'eclara d’une voix myst'erieuse :
— Il y a encore un monsieur, qui attend dans l’antichambre et qui veut `a toute force vous parler. Je lui ai r'epondu, comme d’ordinaire `a tous ceux qui viennent de la sorte, que vous n’'etiez pas l`a, que vous ne receviez jamais, mais il a insist'e de telle facon, et cet homme a un regard si extraordinaire, que je me suis dit qu’il fallait vous pr'evenir.
De plus en plus imperturbable, Juve interrogea son domestique.
— A-t-il remis sa carte, Jean ? A-t-il donn'e son nom ? Un nom quelconque, tout au moins ?
— Non, patron, il ne veut pas se nommer, et d'esire ^etre recu quand m^eme.
— Eh bien, d'eclara Juve, qu’il entre.
Sit^ot que Juve eut donn'e sa r'eponse au domestique, il demeura silencieux, immobile au milieu de ses deux interlocuteurs, et ceux-ci se turent 'egalement.
Le silence dura quelques secondes, il ne se rompit point, lorsque l’inconnu fit son entr'ee.
Il arrivait par une porte, face `a la fen^etre, et d`es lors, son visage 'etait 'eclair'e en pleine lumi`ere.
C’'etait un homme robuste, au visage 'energique et distingu'e. Il 'etait glabre, `a ses tempes quelques cheveux grisonnaient, sa bouche 'etait bien dessin'ee, son nez l'eg`erement arqu'e, ses sourcils bien trac'es et sous ses paupi`eres p'etillaient de grands yeux noirs, desquels sortait une flamme sombre.
L’homme s’inclina l'eg`erement devant Juve :
— Qui ^etes-vous ? demanda enfin le policier qui, apr`es avoir fix'e longuement le nouveau venu, 'etait oblig'e de se cramponner, non point parce qu’il avait peur, mais pour dissimuler le tressaillement nerveux que provoquait chez lui l’apparition soudaine de cet homme.
Et ses yeux se fixaient particuli`erement sur la chevelure, une chevelure blonde et mate, sans brillant, sans reflet, une chevelure bizarre, 'etrange. L’homme cependant r'epliqua d’une voix grave et harmonieuse :
— Je suis, monsieur, quelqu’un qui vient vous demander justice.
— Parlez, fit Juve, cependant que Fandor qui s’'etait lev'e, regardait, avec une anxi'et'e profonde, aussi bien le policier que son interlocuteur.
— Une femme que j’aime, d'eclara cet homme, a 'et'e myst'erieusement, l^achement assassin'ee, une autre que j’affectionne profond'ement a disparu, en outre mes amis ont 'et'e trahis sans que je puisse savoir par qui.
— Et alors monsieur ? interrogea Juve.
— Alors, poursuivit l’inconnu, je viens vous demander votre appui.
Il sembla que cette d'eclaration faisait sur le policier, sur Fandor et m^eme sur l’acteur Dick, une impression extraordinaire.
Juve r'ep'eta :
— Qui ^etes-vous ? Qui ^etes-vous ?
Et alors, brusquement, l’homme s’avanca d’un pas au milieu de la pi`ece. D’un geste rapide, il arracha sa perruque, puis la foulant `a terre, sous ses pieds, il poursuivit :
— `A quoi bon cette com'edie, Juve ? elle est indigne de nous. Voil`a cinq minutes que vous m’avez reconnu et vous savez fort bien que devant vous se trouve Fant^omas.
Le policier n’avait pas sourcill'e.
— Je le sais, en effet, fit-il, j’attendais que vous ayez jug'e bon de me le dire.
Le claquement sec d’une arme fit se retourner Juve et Fant^omas. L’acteur Dick venait de tirer un revolver de sa poche :
— Fi donc, monsieur, articula Fant^omas, laissez cela. Juve aurait pu me br^uler la cervelle il y a d'ej`a quelques instants, de m^eme que j’aurais pu le tuer moi-m^eme si je l’avais voulu. Laissez-nous en paix je vous en prie, il est 'evident que nous avons `a causer.