La disparition de Fandor (Исчезновение Фандора)
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Il se pr'ecipita sur le seuil de la maison et, se haussant sur une borne, il parvient `a voir `a l’horizon la mer qui se profilait au lointain.
Mais soudain, Domenico poussa un cri de joie d'elirante :
— Ils avaient raison, hurla-t-il, et c’est moi qui me trompais, Matteo, mon coll`egue, est bien rest'e au phare et me remplace r'eellement puisque je vois les feux qui tournent autour de leurs fen^etres.
Et, en effet, des grands faisceaux lumineux, des pinceaux de lumi`ere pale passaient r'eguli`erement au-dessus de la t^ete de Domenico qui, d'esormais rassur'e, rentrait dans l’auberge.
— Encore `a boire, criait-il d’une voix que l’ivresse rendait p^ateuse.
Puis il appela la Recuerda :
— Viens ici, la belle, t’asseoir sur mes genoux.
Mais l’Espagnole 'eclata de rire, fit un pied de nez `a l’ivrogne ;
— Tu plaisantes, cria-t-elle, Domenico, j’ai dans'e devant toi, tout `a l’heure, parce que l’on m’avait pay'ee pour cela, mais ma mission est termin'ee et je ne m’assois pas sur les genoux de ceux que je n’aime pas. Adieu, ganache.
La Recuerda se sauva.
Abasourdi, Domenico demeurait dans l’auberge, d'esormais vide et silencieuse.
Domenico s’'etendit sur le sol, commenca `a dormir. 'Etait-il seul ?
Non.
Au moment o`u les premiers ronflements du gardien du phare assuraient qu’il avait perdu conscience de ce qui se passait autour de lui, un des hommes 'etendus sur les banquettes se releva doucement. Il vint consid'erer de pr`es Domenico, puis gagna la porte, cependant qu’il grommelait tout bas :
— Que signifie toute cette histoire ? Pourquoi Fant^omas paye-t-il maintenant des danseuses pour emp^echer des fonctionnaires de l’'Etat de rejoindre leur poste et pourquoi a-t-il fait conduire par B'eb'e, lady Beltham au phare qui commande l’entr'ee de l’Adour ?
L’homme qui se posait cette question 'etait un chemineau `a la barbe rousse, toute embroussaill'ee : c’'etait Bouzille.
21 – L’AMATEUR
— Venez, nous avons `a causer.
Dans le poste de police de Biarritz, Juve avait pris par le bras Timol'eon Fargeaux qui n’avait nullement pens'e `a r'esister, tant il 'etait surpris, atterr'e aussi, par la nouvelle que le policier venait de lui communiquer.
Que Martial Altar`es f^ut mort, certes, ce n’'etait pas pour le mari de Delphine Fargeaux un chagrin bien cuisant. Il n’adorait pas son beau-fr`ere, tout au contraire, et son d'ec`es n’'etait pour lui qu’un 'ev'enement `a peu pr`es insignifiant. Mais ce qui terrifiait Timol'eon Fargeaux, c’est que le jeune spahi e^ut 'et'e assassin'e et assassin'e `a l’aide d’un boulet de canon, dont pr'ecis'ement on venait de lui rendre un morceau.
Les aventures se succ'edaient pour le gros homme avec une telle rapidit'e, que, n’ayant point l’esprit tr`es d'eli'e, il s’y perdait. Tout s’embrouillait dans sa pens'ee, tout se confondait. Il avait encore le sentiment tr`es net de la peur, mais sa peur devenait instinctive et il e^ut 'et'e incapable de pr'eciser s’il avait peur pour lui ou s’il avait seulement peur de ce qui 'etait d'ej`a arriv'e. Juve, de son c^ot'e, n’'etait pas moins troubl'e.
Au sortir de l’'egout, le policier s’'etait pr'ecipit'e au poste avec la pens'ee bien nette de faire arr^eter Timol'eon Fargeaux, qui devait ^etre coupable. Or, au poste, Timol'eon y 'etait mais bien volontairement, pour porter plainte, tout comme e^ut fait le plus honn^ete homme.
— Pourtant, songeait Juve, tandis qu’il entra^inait le n'egociant, je ne puis pas m’y tromper, que diable. Il y a dans tout cela des co"incidences qui deviennent des charges terribles. Cet homme doit savoir comment est mort son beau-fr`ere.
Juve, d'ej`a, ne pensait plus : cet homme doit avoir fait tuer son beau-fr`ere.
Le policier qui, par l’exhibition de sa carte d’inspecteur de la S^uret'e, avait suffisamment stup'efi'e les gardiens de l’ordre de Biarritz pour que ceux-ci, dans leur propre poste, n’aient 'elev'e aucune protestation au moment o`u Juve arr^etait en quelque sorte un plaignant, se h^ataient d’appeler une voiture et d’y faire monter Timol'eon Fargeaux.
— Conduisez-nous `a la gare, ordonna Juve au cocher.
Le policier se jeta `a l’int'erieur du coup'e, il ne souffla mot jusqu’`a la gare. Il prit deux billets `a destination du ch^ateau de Garros. Le hasard favorisait Juve. Dans le train o`u il montait quelques instants plus tard en compagnie de son prisonnier, le policier d'ecouvrit un compartiment vide. Il s’y installa, naturellement, avec Timol'eon Fargeaux, et tout de suite, Juve commenca `a
— Monsieur Fargeaux, il est inutile de vouloir ruser plus longtemps avec moi. Que savez-vous de la mort de votre beau-fr`ere ?
— Mais je n’en sais absolument rien. Vous venez de me l’apprendre.
— Alors, pourquoi avez-vous pay'e vingt-cinq mille francs l’'eclat d’obus que vous tenez encore ?
— Mais ce n’est pas cela que j’ai pay'e vingt-cinq mille francs. On devait me rendre les papiers vol'es, `a l’Imp'erial H^otel.
— Allons donc ! S’il s’'etait agi des papiers vol'es, vous auriez pr'evenu la police, qui e^ut sans doute fait arr^eter le ma^itre chanteur.
— Ou qui l’aurait manqu'e. Non, j’aimais mieux payer et rentrer en possession de mes documents. En tout cas, je vous assure, Monsieur, que je ne m’attendais nullement `a ce que l’on me rem^it un 'eclat d’obus.
Tout cela 'etait si parfaitement vraisemblable que Juve 'etait presque tent'e de le tenir pour vrai.
Il 'etait parfaitement possible, en effet, que Timol'eon Fargeaux f^ut venu au rendez-vous qu’on lui avait donn'e par lettre, dans l’espoir de rentrer en possession de ses documents disparus.
Rien n’emp^echait que le ma^itre chanteur, l’homme qui s’'etait enfui devant Juve, e^ut, au contraire, dans le but d’'egarer les soupcons de la police, remis au malheureux n'egociant, non pas ses papiers, mais l’'eclat d’obus dont Juve s’'etait empar'e et qu’il avait, en ses lieu et place, offert `a Timol'eon Fargeaux…
Mais, si cette explication 'etait plausible, elle 'etait 'etrange, et Juve, depuis longtemps, tenait pour certain qu’il importait de se m'efier toujours, en tout cas, des explications pr'esentant une apparence de vraisemblance, mais des d'etails extraordinaires.
Apr`es quelques instants de r'eflexion, le policier, qui venait d’avoir une de ces petites quintes de toux qui trahissaient chez lui de profondes perplexit'es, rompit `a nouveau le silence :
— Monsieur Fargeaux, commencait Juve, je ne vous crois pas. Je ne vous crois pas du tout, et m^eme… je suis persuad'e que vous ^etes pour quelque chose dans la mort de votre beau-fr`ere. Et, par cons'equent.