L'?vad?e de Saint-Lazare (Побег из Сен-Лазар)
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— Fant^omas ? Fant^omas 'etait ici ?
— Voil`a son manteau, fit-il, quant `a l’homme…
M. Havard l’interrompit pour dire d’un air d'esesp'er'e :
— L’homme, parbleu, il est loin. Fant^omas s’est 'echapp'e, mais Juve est sur ses traces.
28 – LE VERTIGE QUI SAUVE
— Qu’est devenu Fant^omas ? Mal'ediction, o`u est-il pass'e ? Fouillez les caves. Fouillez les greniers. Il faut qu’on le retrouve.
Tandis que M. Havard hurlait des ordres `a ses agents et que cette fois, contrairement `a son habitude, il perdait un peu la t^ete, tandis que Fandor grimpait l’escalier de l’immeuble sinistre, forcait les portes, vocif'erait des jurons 'epouvantables, Juve, plus sage, plus rassis, n’avait pas h'esit'e. Juve, au moment m^eme o`u les bandits s’'echappaient par la fen^etre, avait tranquillement ouvert la porte, et sans m^eme trop se presser, gagn'e la rue. Les trottoirs 'etaient d'eserts, l’ombre clignotante des r'everb`eres ne r'ev'elait aucun passant suspect. Juve n’avait pas perdu courage pour si peu.
— Parbleu, avait imm'ediatement estim'e le policier, ces gens-l`a ne se sont pas 'evanouis, ne sont pas mont'es au ciel. Qui s’'echappe par la fen^etre doit forc'ement atterrir quelque part. Or, la rue o`u nous nous trouvons, cette lugubre rue Froidevaux, est compos'ee d’importants p^at'es de maisons qui ne comportent gu`ere de jardins, donc, fatalement, par o`u qu’ils aient pass'e, mes individus vont ^etre oblig'es `a un moment quelconque, de sauter sur la chauss'ee et de s’enfuir. Le tout est de se trouver au bon endroit.
Juve raisonnait, tr`es calme. Peu lui importait les ordres qu’il entendait hurler par M. Havard `a tous les 'echos, rien ne le troublait, m^eme pas les exclamations et la col`ere de J'er^ome Fandor. Tous couraient apr`es Fant^omas. Juve, lui, tranquillement, se cachait dans un coin d’ombre de la rue et l`a, comme s’il e^ut 'et'e en embuscade, se contentait d’attendre le bandit. La tactique qu’employait le policier et qui prouvait une fois de plus son extraordinaire sang-froid, l’empire qu’il avait sur ses nerfs r'eussit parfaitement. Juve n’'etait pas depuis cinq minutes en observation, qu’`a moins de vingt m`etres de lui un homme v^etu de noir sautait lestement d’un balcon dans la rue et s’enfuyait en courant.
Juve se jeta sur ses pas :
— `A moi, hurla-t-il, c’est Fant^omas ! Ah, cette fois, c’est bien le diable s’il m’'echappe !
Tout en courant, tout en se pr'ecipitant sur les traces du bandit, – et Juve, certes, gagnant du terrain sur lui -, le policier avait saisi dans la poche de son paletot, son ins'eparable browning.
Le temps des proc'ed'es policiers 'etait pass'e, ce n’'etait plus le moment de faire gr^ace. Si Fant^omas ne s’arr^etait pas, Juve 'etait d'ecid'e `a faire feu, `a l’abattre. Comme on abat une b^ete malfaisante, comme on met un monstre hors d’'etat de nuire.
Juve cria :
— Arr^etez-vous, Fant^omas, ou je tire !
Malheureusement Juve avait d'ej`a perdu quelques minutes. Dans la rue Froidevaux, d'eserte et solitaire, la tactique e^ut 'et'e bonne, car Juve, alors e^ut pu tranquillement tirer, mais d'ej`a Fant^omas avait tourn'e au coin du cimeti`ere de Montparnasse, il d'ebouchait place Denfert-Rochereau, et les passants 'etaient trop nombreux pour que, sans crainte d’accidents, Juve p^ut faire usage de son arme.
— Il sait bien que je ne peux pas tirer, s’'ecria le policier.
Fant^omas, en effet, loin de s’arr^eter aux injonctions de Juve, avait acc'el'er'e. `A son tour, il gagnait du terrain sur le policier, qui moins jeune que lui, s’essoufflait.
Juve usa de la derni`ere ressource qu’il pensait avoir en son pouvoir :
Comme on s’'ecartait devant le bandit, Juve hurla d'esesp'er'e :
— Au voleur. `A l’assassin ! Arr^etez-le. C’est Fant^omas !
Il e^ut annonc'e le diable, il e^ut annonc'e la mort, qu’il n’e^ut pas produit plus d’effet. Les passants 'etaient peut-^etre de braves gens, mais `a coup s^ur ce n’'etaient point des gens braves. Voyant l’homme qui courait, entendant annoncer que c’'etait Fant^omas, ils n’eurent les uns et les autres, qu’un sentiment : ne pas se trouver sur son chemin.
Panique g'en'erale. Les cris de Juve n’avaient eu qu’un r'esultat, on fit place nette devant le bandit.
Juve voyait d'ej`a Fant^omas hors d’atteinte, lorsqu’il eut la joie d’apercevoir `a l’autre bout de la place Denfert-Rochereau, deux braves gardiens de la paix, 'emus par ses cris et par la fuite 'eperdue du public, qui accouraient, qui allaient barrer le chemin `a Fant^omas. C’'etait un renfort impr'evu.
— Je le tiens, songea Juve. Ils vont l’arr^eter.
H'elas, au moment m^eme, Fant^omas obliquait, tournait `a droite, lui aussi avait apercu les gardiens de la paix et, pour les 'eviter il ne trouvait rien de mieux que de s’engouffrer dans l’escalier de la station du m'etro. Juve n’h'esita pas. Coupant au plus court, lui aussi courut `a la station. Sa manoeuvre lui avait fait gagner quelque distance sur Fant^omas. Juve 'etait en haut de l’escalier, quand le bandit ouvrait les portes qui m`enent au vestibule o`u se distribuent les billets.
— Je le tiens, se r'ep'eta Juve.
Et au risque d’une chute il d'egringola l’escalier… Naturellement Fant^omas ne s’attarda gu`ere `a demander un billet. Sans souci des protestations des gens qu’il bousculait, il fonca dans l’un des couloirs qui s’ouvraient devant lui.
Et, `a ce moment pr'ecis, Juve poussa un cri de victoire.
— Pinc'e, pensa-t-il.
Fant^omas, en effet, venait de commettre une faute. Au lieu de se diriger vers l’un des escaliers conduisant aux quais du M'etropolitain, il avait pris le couloir auquel vient aboutir l’escalier roulant qui am`ene, `a l’arriv'ee de chaque train les voyageurs descendus dans le souterrain, `a la hauteur du vestibule de la station. Et Juve qui s’'etait apercu de l’erreur de parcours de Fant^omas, riait presque, en se disant :
— Il est impossible que Fant^omas descende par cet escalier qui monte, il va se jeter par terre, l’escalier me le ram`enera. Je le tiens.
Le policier, pourtant, poursuivait toujours le bandit. Fant^omas parvenait, comme l’avait devin'e Juve `a la hauteur de l’escalier roulant. Mais, ce que n’avait pas devin'e Juve, c’'etait, une fois de plus, l’extraordinaire audace de l’Insaisissable.
D’un coup de poing formidable, Fant^omas assomma `a moiti'e l’employ'e du m'etropolitain assis au sommet de l’escalier pour surveiller le signal d’alarme. Fant^omas s’empara du haut tabouret sur lequel 'etait juch'e le malheureux surveillant. Ce tabouret, il le jeta sur les marches et, en m^eme temps, il s’accroupit dessus. Le tabouret n’appuyant que sur les ar^etes des marches, par ses montants de bois, glissa vers le bas comme sur un v'eritable toboggan, `a une allure vertigineuse.
Ainsi, au moment m^eme o`u Juve tendait la main pour arr^eter Fant^omas, le bandit, au risque de se fendre le cr^ane, sur son chariot improvis'e, d'egringolait l’escalier roulant.
De stupeur, Juve perdit quelques secondes. Il retrouva vite son sang-froid, il bondit `a son tour vers le poste de surveillance, il appuya sur le bouton d’alarme, l’escalier s’immobilisa, Juve s’y lanca, le descendit comme un fou.
Qu’'etait devenu Fant^omas ? Emport'e par son 'elan, Juve allait p'en'etrer sur les quais, voir si le bandit n’y 'etait pas bloqu'e, lorsqu’en croisant l’escalier ordinaire, remontant au jour, Juve apercut l’Insaisissable, qui, pensant bien l’avoir d'epist'e et apr`es n’avoir fait qu’appara^itre sur les quais, se h^atait de remonter au grand jour.