La disparition de Fandor (Исчезновение Фандора)
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— Mais… fit Juve.
Le policier allait interroger encore, il s’arr^eta. Une troisi`eme personne entrait dans sa chambre, cette fois c’'etait un t'el'egraphiste.
— Monsieur Juve ? demanda-t-il.
— C’est moi, donne, petit, fit le policier prenant la d'ep^eche.
— 'Evidemment, pensait Juve, c’est Fandor qui me t'el'egraphie. Non, ce n’est pas lui, c’est Anselme Roche.
Juve murmura, comme frapp'e de stupeur :
— Le spahi est retrouv'e. Mais…
— Mais quoi ?
— Mais je n’ai plus un instant `a perdre. Monsieur Hoch, faites pr'eparer ma note, je vous prie, pendant ce temps-l`a, que quelqu’un aille me chercher une voiture automobile.
17 – LA COLLINE DE SABLE
Voici ce qui s’'etait pass'e quelques jours auparavant alors que le spahi avait bless'e H'el`ene :
Au moment o`u Martial Altar`es tombait `a genoux, l’un des deux hommes qui l’entra^inaient en lui passant les menottes lui avait souffl'e `a l’oreille :
— Inutile, n’est-ce pas, de rousp'eter. T^achez de marcher droit, on vous tient, mon gaillard !
C’'etait l`a une recommandation parfaitement inutile. Martial Altar`es 'etait bien trop profond'ement boulevers'e pour songer le moins du monde `a opposer une r'esistance quelconque `a ceux qui l’emmenaient.
Docilement, il avait suivi les deux hommes qui l’entra^inaient en h^ate dans les couloirs de l’Imp'erial H^otel, o`u les domestiques et les voyageurs se bousculaient, attir'es par la d'etonation.
— Allons. D'ep^echez-vous.
L’un des deux agents, car ce ne pouvait ^etre 'evidemment que des agents qui lui avaient pass'e les menottes, semblait surtout d'esireux que le prisonnier se d'ep^ech^at. L’autre ne soufflait mot, mais Martial Altar`es sentait ses doigts s’incruster dans la chair de son bras. L’homme le tenait solidement.
Sorti de l’h^otel, le jeune spahi avait 'et'e pouss'e plut^ot que conduit vers une automobile ferm'ee qui stationnait `a quelque distance, le long du trottoir :
— Montez.
Martial Altar`es avait ob'ei ;
— Quelle terrible affaire, songeait le malheureux soldat. Ma soeur n’'etait donc pas coupable ? et cette malheureuse jeune fille que j’ai bless'e, l’ai-je atteinte gri`evement ?
La voiture, cependant, filait sur les routes poudreuses qui avoisinent Biarritz et qui, tr`es vite, les faubourgs de la ville pass'es, serpentent entre des for^ets de pins.
Et brusquement, dans l’esprit du jeune homme, une inqui'etude nouvelle prenait naissance : de quelle aventure fantastique allait-il ^etre encore le h'eros ? Il avait trouv'e tout naturel, `a la minute m^eme du drame, qu’on l’arr^et^at, qu’on l’entra^in^at au poste, qu’on le jet^at en prison, mais comment se faisait-il que les agents pussent le conduire hors de Biarritz. Et c’'etait incontestable, la voiture venait bien de quitter la station baln'eaire.
— O`u me menez-vous ? demanda le prisonnier `a ceux qui l’emmenaient.
Pour toute r'eponse, les deux agents qui le surveillaient, l’un assis `a c^ot'e de lui et tenant la cha^ine de ses menottes, l’autre, install'e sur un strapontin et semblant pr^et `a lui sauter `a la gorge, 'eclat`erent de rire :
— O`u me menez-vous ?
— Tais-toi.
— Je me tairai si je veux, et vous allez me r'epondre. O`u me menez-vous ?
Un cri de douleur termina la phrase du spahi. Tra^itreusement, `a l’improviste, l’homme avait tordu la cha^ine.
En m^eme temps, l’argousin se penchait sur le soldat, et le regardant avec des yeux effroyablement fixes et volontaires, il r'ep'etait :
— Tais-toi. Je n’ai pas l’habitude de parler quand je ne le veux pas, et il me d'epla^it de te renseigner.
— Et moi… commenca Altar`es, mais il dut s’arr^eter, vaincu par la souffrance.
— Je crois qu’on ne fera plus le m'echant. Tu as compris qu’il fallait ^etre sage ?
Un flot de sang empourpra le front du soldat. Ses yeux jetaient des 'eclairs, il 'etait fr'emissant :
— J’ai compris, criait-il, que vous ^etes des l^aches et des bandits, vous n’^etes pas des agents de la S^uret'e, vous ^etes…
Mais il devait se taire. Sans m^eme s’^etre consult'es du regard, les deux hommes qui l’avaient enlev'e `a l’Imp'erial H^otel s’'etaient jet'es sur lui. L’individu qui lui faisait face, ayant pris place sur le strapontin, tira de sa poche un long foulard qui lui servit `a le b^aillonner. Celui qui paraissait ^etre le chef pendant ce temps passait autour des bras du spahi une mince cordelette qui le liait par des noeuds savants. Martial Altar`es ne pouvait plus ni bouger, ni parler.
Cependant, il reconnaissait un calvaire que l’on d'epassait `a toute allure.
— Qu’est-ce que cela veut dire ? songeait Altar`es, voil`a que l’on m’emm`ene sur la route de Beylonque ? Ah c`a, mais qui sont donc les gens qui se sont empar'es de moi ?
Quelques kilom`etres plus loin, nouveau changement d’itin'eraire. La voiture abandonnait la grand-route qui unit Biarritz au petit village de Beylonque, elle s’engageait dans un 'etroit chemin de traverse que le fr`ere de Delphine reconnut aussit^ot.
— Mais on me m`ene `a Garros, songeait-il, chez Delphine, au ch^ateau, chez mon beau-fr`ere. On me m`ene chez mon beau-fr`ere.
Avancant toujours et fort habilement conduite, l’automobile, cependant, apr`es avoir suivi le petit chemin de traverse, venait de franchir `a une allure rapide les premi`eres all'ees des terrains enclos de murs qui entouraient le ch^ateau de Garros. Elle avait travers'e le petit bois. Brusquement elle obliquait sur la droite, elle s’approchait d’un pavillon isol'e laiss'e `a l’abandon et devant lequel elle stoppait d'efinitivement.