La fille de Fant?mas (Дочь Фантомаса)
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Ce mercredi-l`a, en d'epit d’une temp'erature exquise et d’un soleil radieux, la r'eception de Winifred Elders ne pr'esentait pas le caract`ere de gaiet'e et d’entrain qui lui 'etait habituel.
— Enfin, interrogea miss Edith, fille d’un haut fonctionnaire, croyez-vous `a cette histoire, colonel, et devons-nous nous inqui'eter ?
— H'elas, mademoiselle, r'epondit le militaire, la situation est grave.
— Colonel, vous ^etes comme le sphinx, vous parlez par 'enigmes, un peu de lumi`ere s’il vous pla^it.
— Ma foi, madame, le British Queen, ce beau steamer arriv'e hier d’Angleterre, n’a pas obtenu des autorit'es du port la permission d’accoster, et cela, parce qu’une 'epid'emie s’est d'eclar'ee `a bord. La quarantaine est d’ailleurs d'ecid'ee.
— Une 'epid'emie ? mais de quoi ?
Le colonel expliqua `a voix basse, d’un ton 'emu :
— C’est la peste, dit-on, qui est `a bord du British Queen, elle aurait d'ej`a fait de terribles ravages.
Un mouvement de stupeur succ'eda aux d'eclarations de l’officier.
Un jeune fonctionnaire, attach'e `a la chancellerie et qui 'etait, lui aussi, au courant du drame, annonca autour de lui, sur un ton de suffisance rassur'ee :
— Il ne faut pas, mesdames, vous effrayer outre mesure et tout fait croire que le terrible fl'eau n’arrivera pas jusqu’`a nous. Les pr'ecautions sont prises pour emp^echer, m^eme par la force, la moindre tentative de d'ebarquement que voudraient essayer les malheureux pestif'er'es.
— Dieu soit lou'e, fit une vieille dame, nous serons sans doute 'epargn'es. Si la peste 'eclatait `a Durban, ce serait effroyable.
Mais le colonel Morriss, un pli soucieux au front, intervint `a nouveau dans la conversation.
— Il va falloir prendre les plus grandes pr'ecautions. Certes, nous voulons tous esp'erer que la sinistre maladie ne touchera pas le sol de l’Afrique, mais il n’est pas moins certain que les douaniers ont signal'e sur le bord des c^otes la pr'esence d’un naufrag'e sans doute, qui peut-^etre provient du British Queen… Il a recu l’ordre, mesdames, d'eclarait l’officier de ne point quitter le rocher isol'e de la falaise sur lequel il est venu aborder. Les troupes le gardent `a vue et `a distance.
— Quel genre d’homme ?
Le colonel haussa les 'epaules, esquissa un geste vague.
— On ne sait pas tr`es exactement. On ne l’a vu que de loin. Il semble que ce soit un homme de couleur.
— Si c’est un noir, dit miss Edith, il n’y a absolument qu’`a le tuer…
Le p`ere de Winifred Elders, Hans, le chercheur de diamants, sur ce, avait entra^in'e l’officier dans le petit cabinet de travail qu’on conna^it d'ej`a.
— Eh bien, colonel, fit-il, qu’avez-vous d'ecid'e pour ce malheureux lieutenant ?
— Le lieutenant Wilson Drag est actuellement aux arr^ets, `a la caserne. D’ici quelques jours le conseil de guerre interviendra pour se prononcer sur son compte. C’est une affaire regrettable.
Hans Elders, hypocritement baissa la t^ete :
— C’est bien malheureux, en effet, colonel, surtout pour moi, pour ma fille. La pauvre enfant se remettra-t-elle jamais de cette 'emotion ?
D’un geste apitoy'e, Hans Elders d'esignait `a l’officier, Winifred qui passait, accompagn'ee d’un jeune homme, avec lequel elle s’entretenait, devant la fen^etre grande ouverte.
En r'ealit'e, la jeune fille n’avait pas l’air accabl'ee outre mesure.
La jeune fille se promenait depuis une heure environ avec un jeune homme 'el'egant, aux mani`eres distingu'ees, `a l’allure enjou'ee, et qu’elle connaissait depuis peu. La jeune fille ne le quittait plus. C’'etait un nouveau venu dans le petit groupe des habitu'es de Diamond House, et Winifred aimait beaucoup `a faire de nouvelles connaissances.
Son nouveau chevalier servant 'etait d’ailleurs, d’une personnalit'e suffisamment nouvelle et originale, pour b'en'eficier l'egitimement des frais que faisait la jeune fille `a son 'egard.
C’'etait un 'etranger, un homme plein de charmes, et qui venait de ce pays prestigieux : la France, de cette capitale mondiale : Paris. Le jeune homme en question, n’'etait autre que J'er^ome Fandor. Apr`es l’affaire du National Club, il avait 'et'e pr'esent'e par Teddy, `a diverses personnalit'es mondaines, comme 'etant un riche touriste, et on l’accueillait bien. Hans Elders l’avait m^eme invit'e.
— C’est un mauvais d'ebut pour vous, monsieur, disait Winifred, arriver dans notre pays au moment o`u il est menac'e du plus terrible des fl'eaux.
— Mon Dieu, mademoiselle, r'epliqua Fandor, il faut savoir prendre les choses comme elles viennent, et je vous avoue que j’admire vos r'eactions. Les hommes ont `a peine tressailli, n’en ont pas moins continu'e `a fumer leur cigare, les dames ont pris leur th'e, comme si de rien n’'etait, et la partie de tennis ne s’est pas arr^et'ee.
— Vous croyez, monsieur, que nous sommes des gens froids ?
— Il doit y avoir des exceptions, mademoiselle, dit Fandor, avec un regard appuy'e.
Winifred supporta hardiment le regard du journaliste :
— Alors, dit-elle, le Natal vous pla^it ?
— Oui, fit Fandor, beaucoup…
— Cela m’'etonne. Nous devons vous para^itre des sauvages aupr`es de vos 'el'egantes et gracieuses Europ'eennes, aupr`es surtout de ces fameuses Parisiennes. Elles sont si jolies. Elles ont un tel chic…
— Je ne voudrais pas m'edire de mes compatriotes, mais je vous assure, mademoiselle, qu’il y a des femmes aussi charmantes, aussi spirituelles ailleurs.