La main coup?e (Отрезанная рука)
Шрифт:
Comme s’il avait devin'e sa pens'ee, le Bedeau le renseigna avec un sourire sardonique. Il expliqua :
— Les revolvers font du bruit et l’on retrouve ceux qui ont tir'e rien qu’`a la blessure faite qui d'etermine la grosseur des balles. Tu connais ca, pas vrai, Fandor, l’apprenti policier ? Nous aussi. Faut pas croire que nous sommes des imb'eciles. D’ailleurs on a des ordres pour ne pas trouer la peau, mais il y a mieux `a faire et tu vas bien voir.
Le Bedeau se tourna alors du c^ot'e de ses compagnons :
— Allez, vous autres, le Barbu, OEil-de-Boeuf, empoignez-moi ce colis et en route pour la falaise. Moi je passe devant pour faire, s’il le faut, la trou'ee. Macaroni fermera la marche.
En un clin d’oeil, Fandor, de plus en plus immobilis'e, roul'e, cousu pour ainsi dire dans son filet, 'etait hiss'e sur les 'epaules des deux lieutenants du Bedeau.
Il comprenait le sort qui l’attendait.
On allait le pr'ecipiter du haut d’un rocher dans la mer.
Mais peu lui importait `a ce moment.
L’issue terrible de l’aventure qu’il pr'evoyait ne l’'emotionnait pas, car Fandor, des propos tenus par le Bedeau, n’avait retenu qu’une chose :
C’est que l’apache avait recu des ordres et qu’il s’y conformait.
Les ordres de qui ?
Parbleu, il n’y avait pas moyen d’en douter, ce n’'etait, ce ne pouvait ^etre que Fant^omas.
27 – DANS LE VIDE
— C’est vous, monsieur Juve ?
— Oui, M. de Vaugreland, c’est moi. Vous m’avez fait appeler ?
— En effet, je d'esirais vous entretenir. Prenez un si`ege.
M. de Vaugreland semblait avoir retrouv'e une assurance qu’il 'etait loin d’avoir poss'ed'ee depuis un mois. Ce n’'etait plus l’homme accabl'e, an'eanti, que Juve avait longtemps connu, ce n’'etait plus le directeur qui n’osait donner un ordre, exprimer seulement un d'esir, c’'etait tout au contraire un chef, qui recevait le policier.
Que voulait dire ce changement ?
Juve 'etait `a cent lieues de s’en douter, mais sa tranquille philosophie n’'etait pas pr^ete `a s’'emouvoir d’un changement d’attitude de la part d’un quidam dont, en somme, l’opinion lui importait peu. Juve, qui se rendait parfaitement compte de la nature de l’accueil qui lui 'etait fait, s’assit donc fort tranquille dans l’un des fauteuils qui se trouvaient devant le bureau directorial et attendit que M. de Vaugreland voul^ut bien lui faire part de la communication qu’il avait `a lui faire.
— M. Juve, vous rendez-vous bien compte de la marche des 'ev'enements ?
— Dame, il me semble, r'epondit Juve.
— Alors, que comptez-vous faire ?
— Comment ce que je compte faire ?
— Je veux dire, cher monsieur – et M. de Vaugreland haussait la voix pour donner plus de poids `a ses paroles – que je serais fort heureux d’apprendre si vous avez un nouveau plan d’enqu^ete ?
— Un nouveau plan d’enqu^ete ?
— Oui. Si vous avez d'ecid'e, en d’autres termes, d’agir un peu plus habilement que vous ne l’avez fait jusqu’ici ?
— Cher monsieur, vous me demandez si j’ai l’intention d’agir plus habilement que par le pass'e ? H'e, je ne crois pas avoir 'et'e si maladroit.
Mais Juve n’eut pas le temps d’achever.
Ce n’'etait plus un mouton que Juve avait devant lui, mais un mouton enrag'e.
M. de Vaugreland tapa un coup de poing formidable sur le bord de son bureau :
— Vraiment ? hurla-t-il, vous trouvez que vous n’avez pas 'et'e maladroit ? Ma parole, monsieur Juve, je me demande si vous avez bien r'efl'echi `a tout ce qui s’est pass'e ici depuis un mois ?
— Ne jurez pas, monsieur de Vaugreland. Je vous certifie que j’y ai parfaitement r'efl'echi.
— Et ce sont ces r'eflexions qui vous ont amen'e `a trouver que vous n’'etiez pas maladroit ?
— Absolument, M. de Vaugreland.
— Eh bien, vous en avez de bonnes.
Juve, `a son tour, donna quelques signes d’impatience :
— Il est possible que j’en aie de bonnes, en effet, mais tout de m^eme, monsieur de Vaugreland, je voudrais savoir ce qui vous fait parler ainsi ?
M. de Vaugreland se leva. Il joignit les mains… puis, apr`es cette mimique muette, il reprit :
— Mais tout, monsieur Juve, tout, sans exception.
Et comme, sur la figure de Juve, une expression de stup'efaction se peignait, M. de Vaugreland poursuivit :
— R'efl'echissez donc, que diable. Comment, il se passe ici un crime myst'erieux, l’assassinat de Norbert du Rand. Pour 'eclaircir cet assassinat, j’'ecris `a la S^uret'e de Paris et je la prie de m’envoyer un inspecteur habile…
— Sur quoi la S^uret'e de Paris m’a envoy'e.
— Justement ! et l’on vous exp'edie ici. Or, je vous le demande, depuis votre arriv'ee, que s’est-il pass'e ? Un s'enateur a 'et'e tu'e. Mon caissier a 'et'e tu'e. La ma^itresse de mon caissier a 'et'e tu'ee. Enfin, les scandales se sont multipli'es `a tel point que la Principaut'e devient un repaire de criminels. Voil`a ce que m’a valu votre arriv'ee, monsieur Juve. Ai-je le droit d’^etre satisfait ? suis-je fond'e `a penser que vous n’^etes pas de taille `a 'eclaircir ce que l’on appelle d'ej`a
Juve gardait un sourire au bord des l`evres.
« Pourquoi, diable, se demandait le policier, M. de Vaugreland me fait-il cette sc`ene stupide et d'eplac'ee ? Il y a deux jours, il ne jurait encore que par moi. Qui a pu me d'emolir dans son esprit ?
Mais `a cette question qu’il se posait, Juve ne trouvait pas de r'eponse…
Et, en effet, Juve, quelle que f^ut la puissance de ses qualit'es polici`eres, ne pouvait imaginer que l’attitude `a son endroit du directeur de la Soci'et'e des Bains, provenait tout bonnement de la visite r'ecente que Fant^omas avait os'e faire `a M. de Vaugreland. Allez inventer ca.