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Том 11. Былое и думы. Часть 6-8
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Sommes-nous plus pr^ets de la libert'e de conscience, de notre souverainet'e individuelle, de notre autonomie morale – par toutes les paroles et doctrines d’un proph`ete-pr'ecurseur?

L’exp'erience nous oblige d’^etre circonspects. Voil`a un exemple. De m'emoire d’hommes il n’y avait jamais un tel concours de toutes les conditions les plus propices – pour un d'eveloppement rationnel d’un ^etre libre comme aux Etats-Unis en Am'erique.

Tout ce qui emp^eche le progr`es des Etats sur un sol 'epuis'e par une longue histoire ou compl`etement sauvage – n’existait point. Les doctrines du XVIIIe si`ecle, des grands penseurs de la grande r'evolution sans le militarisme francais, le common law de l’Angleterre – sans les castes aristocratiques – form`erent le fondement de leur 'edifice social.

A quoi l’Europe osait r^ever `a peine – 'etait de prime abord donn'e en Am'erique – r'epublique, d'emocratie, f'ed'eration, autonomie de chaque partie et la ceinture `a peine tangente de l’Etat conf'ed'er'e – avec un noeud faible – et pr^et `a se d'elier. Eh bien, les r'esultats?

La soci'et'e, la majorit'e – a usurp'e les droits d’un dictateur et d’un sbire. Le peuple lui-m^eme s’est fait Nicolas et la rue J'erusalem. Les pers'ecutions au Sud pour les opinions et paroles, – avec leur banni`ere chant'ee –

«L’esclavage ou la mort!» ne c`edent en rien aux pers'ecutions du roi de Naples ou de l’Autrichien.

C’est vrai qu’au Nord – «l’esclavage» n’est pas un dogme religieux. Mais que dire du niveau intellectuel et de la libert'e de conscience d’une population d’arithm'eticiens – qui apr`es avoir ferm'e leurs livres de compte – tournent les tables et font des conversations avec les rapping spirits?

Nous trouvons – avec moins de grossi`eret'e – quelque chose de pareil en Angleterre, en Su`ede – c’est `a dire dans les pays les plus libres de l’Europe. Pouvons-nous conclure de l`a – que moins le pays est opprim'e par son gouvernement, plus il est opprim'e par la masse, qu’`a un gouvernement tol'erant correspond une opinion publique pers'ecutant comme l’inquisition? La famille, la paroisse, le club vous 'epient, vous empoisonnent la vie… Je n’en sais rien, mais le doute est possible. L’histoire para^it ^etre ce jeu des aspirations sociales – vers l’ind'ependance de l’individu, de la raison – une aspiration qui semble se r'ealiser mais la r'ealisation desquelles – est compl`etement incompatible avec l’existence de l’Etat… Systole et diastole de la circulation humaine.

Nous confessons franchement de ne pas conna^itre la r'eponse `a cette question… mais nous ne voulons non plus accepter une solution toute faite – derri`ere notre dos. Jusqu’`a pr'esent l’histoire la r'esout d’une mani`ere, et quelques penseurs 'eminents, dans leur nombre notre R. Owen, – d’une autre. Owen a une foi in'ebranlable, cette foi des grands philosophes du XVIIIe si`ecle (qu’on a surnomm'e le si`ecle des incr'edules!) que non seulement l’humanit'e parviendra un jour `a une organisation rationnelle – mais que nous sommes `a la veille d’exiger notre toge virile… Quant `a cette derni`ere assertion, il nous semble que les tuteurs, pasteurs m'enins et bonnes peuvent encore tranquillement dormir et manger aux frais de leurs pupilles. Tant que notre si`ecle dure – les hommes d’aucun pays ne demanderont pas les droits des majeurs – et se contenteront encore des petits jouets – et du col rabattu `a l’enfant.

Il y a mille raisons `a cela. Et d’abord pour qu’un homme puisse arriver au simple bon sens – il faut qu’il soit un g'eant; quelquefois m^eme les forces les plus colossales ne peuvent suffir pour se frayer un passage `a travers les morts et les spectres – de la tradition. Prenez un 'etat social bien et carr'ement assis sur ses bases comme en Chine ou au Japon.

Du moment o`u l’enfant ouvre ses yeux avec un sourire – en regardant sa m`ere, – jusqu’au moment o`u il les referme, presque avec le m^eme contentement – ayant fait sa paix avec Dieu et assur'e un bon placement qu’on lui fera occuper pendant un petit somme qu’il fera – tout est dispos'e pour qu’il ne puisse voir clair, avoir une seule notion simple. Il suce avec le lait de sa m`ere je ne sais quelle belladone – qui lui tourne la t^ete – pas un sentiment ne reste intact, pas une passion qui ne soit d'etourn'ee de sa voie naturelle. L’'education de l’'ecole continue en aggravant l’oeuvre de l’'education domestique – en g'en'eralisant, en justifiant th'eoriquement – les pratiques et r`egles de la maison, donnant une base scolastique `a tous les mirages, en habituant les enfants de conna^itre sans comprendre et d’accepter les noms pour des d'efinitions.

L’homme ahuri – continue `a exister dans un monde d’illusions optiques, perd l’instinct de la v'erit'e, le go^ut de la nature et doit certainement avoir une force 'enorme d’intelligence pour s’en apercevoir et peut-^etre encore plus de courage – pour sacrifier tout s’il le faut et sortir – d'ej`a chancelant et ivre de la malaria qui l’entoure.

R. Owen aurait r'epondu `a cela – que c’est nomm'ement par ces consid'erations qu’il est venu `a la conclusion – qu’il fallait commencer la r'eg'en'eration sociale – non par un phalanst`ere, non par Icarie – mais par l''ecole.

Il avait raison, et encore plus, il a prouv'e pratiquement qu’il l’avait. Devant l’exemple de New Lanark – ses adversaires se taisent, le maudit New Lanark ne peut ^etre dig'er'e par les gens qui accusent le socialisme – de ne s’occuper que d’utopie – sans savoir r'ealiser le moindre d'etail. N. Lanark 'etait l`a en chair et os pour r'epondre `a tous ces Saint Thomas de l’'economie politique – tout le monde y allait – ministres, ducs, fabricants, lords et m^eme 'ev`eques. – Un sceptique, le docteur du duc de Kent n’y croit rien, le duc lui propose d’y aller et de voir de ses propres yeux – le docteur Mac-Neb y va et commence sa premi`ere lettre par ces mots:

«Mon rapport `a demain, je suis trop 'emu, de ce que j’ai vu – plus d’une fois je sentais des larmes dans mes yeux».

Sur cet aveu magnifique en faveur de N. Lanark – je m’arr^ete et je constate qu’Owen a donn'e une grande preuve `a sa doctrine de l’'education – par sa r'ealisation.

Comment donc cela se fit que N. Lanark, 'etant au sommet de son bien-^etre – au milieu de la plus 'energique, de la plus ardente activit'e d’Owen – croula et se transforma en une 'ecole – un peu moins vulgaire, peut-^etre, que les autres – mais tr`es vulgaire? Est-ce qu’Owen s’'etait ruin'e? Est-ce qu’il y avait dissidence parmi les ma^itres, m'econtentement de parents, insubordination des enfants?.. Rien de pareil, au contraire, la fabrique allait parfaitement bien, les revenus s’augmentaient, les ouvriers quittaient compl`etement l’ivrognerie et le vol, l’'ecole 'etonnait le monde. Quel malheur est donc tomb'e sur N. Lanark?

Un beau matin l’'ecole de N. Lanark vit entrer deux sinistres figures habill'ees en noir, d’une gravit'e comique, dans des chapeaux tr`es bas et des pardessus d’une coupe pr'em'editativement laide. C’'etaient deux braves et pieux quakers – copropri'etaires de N. Lanark. Ils fronc`erent les sourcils en voyant les figures charnellement gaies des enfants, ils devinrent sombres en les entendant chanter de la musique de ce monde et baiss`erent leurs yeux – s’apercevant que les petits garcons n’avaient pas d’«inexpressibles»! – Bon Dieu!

Ces malheureux enfants ne ressentaient aucun remords de la premi`ere chute d’Adam – et les quakers secou`erent la t^ete avec tristesse…. Owen pour conjurer la premi`ere attaque r'epondit par un trait de g'enie – par le chiffre de l’accroissement du gain. Ce chiffre annuel 'etait si grand qu’il arr^eta pour un certain temps le z`ele religieux des quakers. Mais dans quelque temps leur conscience se r'eveilla – et cette fois h'eros du devoir et r'esolus de ne pas c'eder, ils exig`erent l’abolition de la danse, du chant la"ic, des manoeuvres par groupes – pour cela ils permettaient aux enfants de se r'ecr'eer en chantant les psaumes.

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