L'agent secret (Секретный агент)
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— Nous sommes bien d’accord, insista le faux Vagualame… et je te confirme mon intention…
Presque terrifi'ee, la jeune femme observa :
— Vous pr'etendez venir chez moi ?
— En effet…
— Et quand donc ? Rappelez-vous, Vagualame, que la pi`ece en question, je m’en dessaisirai demain matin de bonne heure…
— D’ici-l`a, j’ai le temps de la voir. Il faut que je la voie, que je l’examine, que je la tienne dans mes mains, j’ai mes raisons pour cela.
— Mais j’habite l’h^otel du baron de Naarboveck et le moindre bruit…
— Rien `a craindre. D’ici une heure je serai dans ta chambre avec toi.
— Comment entrerez-vous ?
— Tu rentreras seule, ostensiblement, mais sit^ot mont'ee dans ta chambre, dont je connais la disposition, tu entreb^ailleras la fen^etre. Je me charge du reste.
***
Arriv'e `a l’entr'ee du pont Alexandre, le v'ehicule s’arr^eta.
Vagualame paya le chauffeur, cependant que, conform'ement aux conventions, Bobinette gagnait l’h^otel de Naarboveck.
Elle devait ensuite monter aussit^ot dans sa chambre et prendre les dispositions voulues pour que Vagualame puisse y p'en'etrer ensuite `a son tour.
Bobinette, en parvenant `a son appartement ne put se d'efendre d’une 'emotion 'etrange.
Certes, elle 'etait accoutum'ee aux audacieuses entreprises de ce Vagualame, dont elle avait souvent appr'eci'e l’habilet'e, mais cette fois elle estimait que le chef avait trop d’aplomb, allait trop loin…
***
Cependant, Juve, en attendant l’heure fix'ee, errait sur le pont Alexandre, ne pouvant s’emp^echer de penser avec une joie extr^eme :
— Cette fois, je tiens le bon bout. Me voil`a enfin dans la place.
18 – AU NOM DE LA LOI
Le baron de Naarboveck et sa fille Wilhelmine, confortablement install'es devant le feu de bois qui br^ulait dans la chemin'ee de la biblioth`eque, parlaient de la pluie et du beau temps.
Le diplomate 'eprouvait visiblement pour la jeune fille une affection un peu solennelle, mais sinc`ere, tandis que Wilhelmine gardait une attitude 'eminemment respectueuse, mais qui ne se transformait en tendresse famili`ere qu’au bout de quelques heures d’intimit'e.
On entra enfin dans le vif du sujet et Wilhelmine rougit en baissant les yeux, cependant que le baron de Naarboveck, avec une insistance taquine, la pressentait sur les sentiments r'eels qu’elle 'eprouvait `a l’'egard du lieutenant de Loubersac.
— Ma ch`ere enfant, avait d'eclar'e le baron, cet officier est plein d’avenir, il est charmant. C’est un parti qui te conviendra fort bien.
Soudain Wilhelmine p^alit :
— Je l’aime, dit-elle, il m’aime sans doute, mais quand il conna^itra le secret de ma vie…
Le baron de Naarboveck haussa les 'epaules :
— Ma ch`ere enfant, fit-il, interrompant la blonde Wilhelmine, rien dans ce secret dont tu te fais un monstre ne vient entacher ton honneur ni ta responsabilit'e. Si j’ai cru jusqu’`a pr'esent devoir te pr'esenter `a nos relations comme 'etant ma…
Le baron de Naarboveck s’arr^eta net, la porte de la biblioth`eque s’'etait ouverte et le valet de pied annoncait :
— C’est une femme qui vient d’arriver avec son fils et d'esire voir Mademoiselle ou Monsieur. Elle dit comme ca qu’elle pr'esente le nouveau palefrenier.
— J’avais, en effet, oubli'e de vous en pr'evenir, dit Wilhelmine, j’attendais ce soir le garcon d’'ecurie qui doit remplacer Charles.
Et, se tournant vers le valet de pied, demeur'e impassible `a l’entr'ee de la pi`ece :
— Priez donc, demanda-t-elle, M lleBerthe de s’occuper de ces personnes.
— Mademoiselle m’excusera d’^etre venu la d'eranger, mais M lleBerthe est absente et…
— C’est bien, interrompit Wilhelmine, je viens.
***
La m`ere et le fils s’inclin`erent respectueusement devant la jeune fille lorsque celle-ci parut. La garcon d’'ecurie avait bonne allure, et m^eme paraissait plus distingu'e que ne le sont d’ordinaire les palefreniers.
M lleWilhelmine demanda, selon l’usage, `a voir les certificats. La femme qui accompagnait le jeune homme les montra.
— C’est moi que je suis sa m`ere, avait-elle d'eclar'e d’une voix forte et criarde…
— Oh ! la vilaine t^ete, pensa Wilhelmine.
***
M. de Naarboveck, rest'e seul dans la biblioth`eque, se promena quelques instants de long en large, puis ne voyant pas revenir Wilhelmine, et sentant le sommeil le gagner, il quitta la biblioth`eque et suivit `a petits pas la longue galerie qui bordait les salons de r'eceptions et dominait, par un balcon `a jour, le hall du rez-de-chauss'ee.
Soudain, le baron s’arr^eta, pr^eta l’oreille ; il lui semblait entendre un bruit de voix. Le bruit s’affirma. M. de Naarboveck descendit.
Il se trouva, au rez-de-chauss'ee, en pr'esence de deux personnages coiff'es de chapeaux melon, et rigoureusement boutonn'es dans des pardessus sombres. Leurs mains n’'etaient point gant'ees, ils ne portaient ni canne, ni parapluie.
L’un d’eux tendit sa carte. Le baron lut :
Michel
Inspecteur de la S^uret'e
— Veuillez me suivre, messieurs.
Pos'ement, le baron de Naarboveck remonta le grand escalier, la main sur la superbe rampe de fer forg'e, les deux policiers derri`ere lui.