L'assassin de lady Beltham (Убийца леди Бельтам)
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— Ah c`a, observa le chef de la S^uret'e, c’est plus fort que n’importe quoi. Comment diable, Juve, avez-vous fait pour voler ces trois clefs `a Fant^omas ? Car c’est vous, 'evidemment, qui venez de faire porter cette bo^ite.
— Non, ce n’est pas moi, r'epondit Juve.
— Mais vous saviez que les trois clefs 'etaient dedans ?
— Je m’en doutais.
— C’est donc vous qui les y avait fait mettre ?
— Mais, pas du tout !
— Qui donc envoie ce paquet ?
— Qui donc ? Mais parbleu, celui qui avait les clefs.
— Fant^omas, alors ?
— 'Evidemment, Fant^omas !
La surprise de M. Havard croissait et Juve paraissait au contraire de moins en moins 'etonn'e.
— Monsieur, dit M. Ch^atel-G'erard en s’emparant des mains de Juve qu’il serrait avec une cordialit'e nerveuse, monsieur, vous m’avez sauv'e la vie. J’'etais d'ecid'e `a me tuer…
— Sottise.
— J’aurais 'et'e d'eshonor'e si ces trois clefs avaient 'et'e vol'ees, si la Banque avait 'et'e pill'ee.
Mais, `a ces mots, la figure de Juve se rembrunit.
— Ah cela, d'eclara-t-il, c’est autre chose. Je vous avaient promis de vous faire rendre les clefs, je ne vous ai point promis de prot'eger la Banque. Je t^acherai, 'evidemment…
Mais, au scepticisme qu’il affectait quelques minutes avant, M. Ch^atel-G'erard avait substitu'e un optimisme triomphant :
— Oh, d'eclarait le gouverneur, vous craignez sans doute qu’on ait pris des empreintes de ces clefs, mais cela, je m’en moque. J’ai. maintenant le temps voulu pour faire changer les serrures avant qu’un scandale 'eclate.
Il allait continuer, Juve l’interrompit :
— Fant^omas n’est pas assez sot, dit-il, pour avoir pris l’empreinte de ces clefs.
— Alors ?
— Alors, il y a autre chose, conclut le policier, autre chose `a craindre.
M. Ch^atel-G'erard allait 'evidemment protester, mais M. Havard, `a son tour, voulait ^etre renseign'e.
— Nous examinerons cela tout `a l’heure, dit-il. Ce qu’il faut savoir avant tout, Juve, et je vous avoue que je br^ule d’impatience de le conna^itre, c’est la facon dont vous avez d'ecid'e Fant^omas `a vous restituer ces trois clefs.
— `A les restituer `a la Banque, corrigea Juve. Eh bien, j’ai op'er'e tr`es simplement : il m’a suffi, monsieur Havard, de raisonner deux minutes. Voyons. Quelle 'etait la situation d’hier ? Deux clefs sur trois avaient 'et'e vol'ees, n’est-il pas vrai ? Fant^omas ayant deux clefs, mais n’ayant pas la troisi`eme, ne pouvait pas p'en'etrer dans les caves. M. Ch^atel-G'erard, n’ayant plus qu’une clef, en 'etait 'egalement emp^ech'e. Que faire ? J’ai raisonn'e de cette facon : si Fant^omas vole les clefs, c’est qu’il s’imagine, gr^ace `a ces clefs, pouvoir atteindre les r'eserves. Si, au contraire, je lui persuade que peu m’importe qu’il ait les clefs, il pensera imm'ediatement qu’elles ne sont pas suffisantes pour lui permettre d’accomplir le vol. Autrement dit, il redoutera un pi`ege, et s’abstiendra, surtout si moi, Juve, j’apparais m^el'e `a l’affaire.
— Pas mal, approuva M. Havard.
— Oui, c’est assez bien. Donc, ayant sous la main un individu complice de Fant^omas, je me suis arrang'e pour qu’il me vole la clef et aille la porter `a Fant^omas. Oh je n’avais pas la moindre illusion ! Fant^omas apprenant que moi, Juve, je m’'etais laiss'e soustraire la troisi`eme clef, apr`es une com'edie plus ou moins habile, devait soupconner imm'ediatement le pi`ege tendu. D`es lors, 'etant donn'e qu’il est beau joueur, j’avais bien quatre-vingt-dix-neuf chances sur cent pour que, afin de se moquer de moi, il ait la magnanimit'e de retourner ces clefs `a M. Ch^atel-G'erard. C’est pr'ecis'ement ce qui est arriv'e.
Il n’y avait rien `a r'epondre `a cela, il n’y avait qu’`a f'eliciter Juve pour l’extraordinaire habilet'e dont il venait une fois encore de donner la preuve, et M. Ch`atel-G'erard tout comme M. Havard n’y manqu`erent point.
— C’est merveilleux, dit le chef de la S^uret'e.
— C’est infernal, dit le gouverneur de la Banque.
Juve, toutefois, appr'eciait peu les compliments.
— Possible, murmurait-il, mais tout n’est pas fini.
— Qu’allons-nous faire, en effet ? demanda M. Havard. Vous ^etes persuad'e, Juve, qu’il va y avoir une tentative ici ? Contre les coffres ?
— Oui, chef.
— Pourtant vous avez dit vous-m^eme, monsieur Juve, remarquait le gouverneur, que Fant^omas n’avait pas d^u prendre l’empreinte des clefs.
— Certes, ce serait enfantin. Il avait les clefs, pourquoi en aurait-il fait fabriquer d’autres ?
— Eh bien, alors ?
— Alors, voil`a…
Juve paraissait `a son tour, embarrass'e.
— Fant^omas, reprenait le policier, apr`es quelques instants d’une courte m'editation, Fant^omas, monsieur, il ne faut pas l’oublier, est le Roi du Crime. Comment, dans ces conditions, supposer qu’il peut abandonner un instant, l’id'ee d’un cambriolage aussi profitable que le cambriolage de la Banque ?
— Mais, les caves sont `a l’abri.
Juve, pour toute r'eponse, sourit. H'elas, lui qui, depuis des ann'ees, s’acharnait `a la poursuite de Fant^omas, tour `a tour triomphant et vaincu, n’aurait jamais prononc'e la parole imprudente que venait de lancer M. Ch`atel-G'erard. Les caves 'etaient `a l’abri de Fant^omas ? Vraiment ? Y avait-il, au monde, pr'ecautions suffisantes pour qu’on p^ut tenir pour certain que Fant^omas renonc^at `a r'ealiser ses desseins ?
M. Ch`atel-G'erard, pourtant, s’emballait litt'eralement sur sa propre affirmation.
— Mais si, r'ep'etait-il en voyant l’'enigmatique sourire par lequel Juve venait d’accueillir sa d'eclaration, je vous assure que les caves, ici, ne risquent rien ! Songez donc, un escalier barr'e par trois portes de fer, des sous-sols dont les murs sont inattaquables `a la mine, des locaux que l’on peut noyer en une seconde, qui, en quelques minutes, peuvent ^etre combl'es de sable, cela ne se cambriole pas ais'ement. Et puis, enfin, nous allons avoir l’oeil, nous surveillerons. Tenez, il y a mieux encore. Savez-vous, monsieur Juve, qu’en cas de besoin, rien qu’en pressant sur un commutateur 'electrique, je peux ouvrir des r'eserves d’acide carbonique comprim'e, qui rendraient irrespirables pendant pr`es de quatre jours, au moins, les souterrains o`u sont nos lingots d’or ?