La gu?pe rouge (Красная оса)
Шрифт:
Fant^omas eut un ricanement satisfait en se relevant.
— En un autre endroit, murmurait-il, j’aurais 'evidemment perdu mon temps `a essayer d’enfoncer la muraille partout o`u elle est faite de briques et de moellons. Il n’y a qu’ici qu’elle est continu'ee par de simples carreaux de pl^atre. Les architectes du gouvernement ont voulu faire des 'economies. Je leur dois des actions de gr^ace.
Il rit encore, 'etendit les bras, en homme que l’immobilit'e a terriblement fatigu'e, puis banda avec son mouchoir la plaie de son pied, qui saignait sur le sol.
— Inutile de laisser des traces derri`ere moi.
Debout, d'esormais, Fant^omas 'ecouta. Il collait son oreille au mur qu’il venait de d'efoncer.
— De ce c^ot'e, murmurait-il, je n’ai 'evidemment rien `a tenter. Il y aurait l`a cinquante argousins pr^ets `a m’empoigner. Voyons par ici.
'Evitant de faire du bruit, marchant avec une pr'ecaution extr^eme, Fant^omas traversa la remise. Il colla son oeil `a la serrure, regarda :
— Parfaitement, murmura le bandit, c’est bien ce que j’avais pr'evu. Cette remise donne sur la petite cour qui se trouve elle-m^eme derri`ere les b^atiments administratifs, b^atiments devant lesquels est la cour d’honneur puis, enfin, les premiers b^atiments de la prison, la porte coch`ere, la rue, la libert'e.
Il regarda quelques instants encore, par le trou de la serrure, qui lui servait de poste d’observation. Il 'eclata de rire une fois de plus :
— Peste, dit Fant^omas, Juve a bien fait les choses. Ou je me trompe fort, ou voici aux quatre angles de cette courette, quatre individus qui sont quatre agents de la S^uret'e. Si je sors par l`a, je suis s^ur de me faire appr'ehender. Sortir par le fond de la remise est impossible, sortir par le devant est 'egalement impossible. Il n’y a rien `a tenter contre les murailles que j’ai `a droite et `a gauche. Sans outils, elles sont infranchissables. Allons, je suis dans une sourici`ere.
Il disait cela avec un grand sang-froid. Avec un sang-froid plus profond encore, il enleva sa veste, et comme s’il e^ut tout le temps voulu devant lui, comme si aucun danger ne l’e^ut menac'e, avec un soin extr^eme, il commenca `a la brosser.
Son v^etement rappropri'e, Fant^omas qui venait de r'efl'echir profond'ement, se mit `a sourire d’un sourire ind'efinissable.
Il n’h'esita plus. Il marcha vers l’automobile, ouvrit le coffre `a outils fix'e sur le marchepied, prit le tournevis, revint vers la porte de la remise. Le bandit colla `a nouveau son oeil au trou de la serrure.
— D'ecid'ement, murmura-t-il, les hommes post'es par Juve sont des serviteurs exemplaires. Rien ne les distrait de leur faction, ils sont l`a et ils y restent. Ma foi, tant pis.
Fant^omas se redressa et, m'editant quelque projet 'evidemment ahurissant, entreprit, avec tranquillit'e, de d'efaire les vis qui retenaient la serrure.
***
— Juve, co^ute que co^ute, il faut que nous ayons cet homme !
— Monsieur le directeur, je suis de votre avis, mais je dois ajouter que si nous voulons obtenir un r'esultat, il faut fouiller de fond en comble la prison. Or, pour fouiller la prison, il me faut cent agents de plus. Si vous allez au minist`ere, emmenez-moi et d'eposez-moi `a la S^uret'e. Je verrai M. Havard et j’obtiendrai de lui les renforts dont j’ai besoin.
— Venez, en ce cas.
M. Malherbe et Juve, depuis deux heures, cherchaient vainement Fant^omas.
Juve avait voulu regarder partout, il avait visit'e les caves, les greniers, il 'etait m^eme mont'e sur les toits, et il n’avait rien trouv'e.
Juve avait pouss'e la pr'ecaution jusqu’`a monter sur l’'echelle des macons qui rebouchaient le mur 'ecroul'e. Malheureusement le policier avait 'et'e victime des affirmations de ces ouvriers. Ceux-ci ne lui avaient pas dit qu’ils avaient d'ej`a rescell'e deux moellons, quand il 'etait venu inspecter leurs travaux, et par cons'equent Juve n’avait vu, en fait de br`eche, qu’un trou fort petit, par lequel Fant^omas n’aurait pas pu s’introduire.
Le policier, en cons'equence, n’avait pas insist'e.
Juve, d’ailleurs, s’aiguillait sur une fausse piste. `A force d’interroger les t'emoins de l’accident, il avait appris le r^ole singulier jou'e par Fant^omas au moment de l’'ecroulement du mur.
Et Juve, croyant ^etre logique, se disait :
— Si Fant^omas a sauv'e un gardien en risquant d’^etre tu'e, ce n’est 'evidemment pas par bont'e d’^ame, c’est en vertu d’une id'ee pr'econcue. Il a sauv'e le gardien pour quelque chose, pour tirer parti de sa qualit'e de gardien. Pour aider `a l’emporter `a l’infirmerie, pour sortir des pr'eaux. Il doit ^etre cach'e dans la Sant'e, mais o`u ? O`u, mon Dieu.
Et Juve ne se doutait certes pas qu’`a un moment donn'e, il avait 'et'e `a quelques centim`etres `a peine de Fant^omas, s'epar'e de lui seulement par les quelques pierres qui constituaient l’un des c^ot'es du mur…
Le policier, cependant, en compagnie de M. Malherbe, se dirigeait vers la remise. Le m'ecanicien avait 'et'e pr'evenu d’urgence ; il accourait, la cl'e de la remise en main. M. Malherbe lui ordonna :
— D'ep^echez-vous…
Mais au m^eme moment, le serviteur avait recul'e, stup'efait :
— Regardez donc, monsieur le directeur.
Ce fut Juve qui r'epondit :
— C’est par l`a que Fant^omas vient de s’enfuir.
Juve, du premier coup d’oeil, en effet, avait devin'e ce qui surprenait le m'ecanicien.
Au moment d’introduire la cl'e dans la serrure, l’homme s’'etait apercu que celle-ci avait 'et'e arrach'ee de l’int'erieur, que la remise avait 'et'e ouverte.
M. Malherbe protesta :
— Fant^omas n’a pas pu s’enfuir, puisque quatre de vos hommes 'etaient en faction dans la cour.
Mais 'etait-ce bien l`a un argument m'eritant d’^etre pris au s'erieux ?
— Si Fant^omas n’'etait point sorti par l`a, disait Juve, la serrure ne serait pas arrach'ee.
Sans discuter plus longtemps, d’ailleurs, il poussa d’un coup d’'epaule la porte de la remise, entra.
— Tenez, hurla-t-il, regardez donc.
Derri`ere la voiture, le policier montrait le mur 'ecroul'e, les carreaux de pl^atre arrach'es, encore sur le sol.
Vers cette br`eche, Juve se pr'ecipita. Il regarda le mur creux, imagina ce qui avait d^u se passer.