La gu?pe rouge (Красная оса)
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Fant^omas ne sourcilla pas. Il se recula un peu, et parut m^eme plier les jarrets comme s’il se f^ut appr^et'e `a bondir.
Dans la cour, les autres brigades des d'etenus continuaient `a se promener. Tous ne sortaient pas en m^eme temps. Tous ne rentraient donc pas `a la m^eme minute.
La distribution des gobelets d’ailleurs n’'etait pas achev'ee.
Quelques minutes pass`erent.
Et puis soudain, `a l’improviste, au milieu d’un grand vacarme, un 'ev'enement extraordinaire survint. Juste au-dessus de la fontaine, une gr^ele de pierres, de moellons, de briques s’abattit avec fracas. Puis, comme dans un 'eclair de pens'ees, en une fraction de seconde, une 'enorme masse noire, une pesante machine d’imprimerie, balanc'ee par une combinaison de courroies, creva la muraille du premier 'etage, tomba sur le pr'eau, enfonca la toiture, d'emolit un mur et roula sur le sol.
`A l’instant m^eme o`u la machine crevait la muraille et roulait dans l’espace, avec une folle t'em'erit'e, Fant^omas s’'etait 'elanc'e.
Repoussant devant lui ceux qui g^enaient ses mouvements, il avait bondi jusqu’au gardien adoss'e `a la fontaine qui allait immanquablement ^etre 'ecras'e sous le poids de la machine qui s’affalait.
Et Fant^omas alors, saisissant cet homme d’une poigne puissante, l’agrippait au collet et au bras ; le rejetant en arri`ere, il l’arrachait `a la mort et roulait avec lui parmi les d'ecombres sur le sol du pr'eau.
Dans la cour, des hurlements d’effroi retentirent.
La sonnette d’alarme se fit entendre. L'es gardiens accoururent de toute part. Les condamn'es et les d'etenus se reculaient au fond du pr'eau. Fant^omas, seul, demeurait en avant, inerte e^ut-on cru, pr`es du gardien qu’il venait de sauver.
Alors, dans le brouhaha, des ordres 'eclat`erent. Le directeur de la prison accouru avec tous les gardiens-chefs, tous les surveillants, se multipliait. En un instant, les d'etenus stup'efaits furent r'eint'egr'es dans leur cellule. Dans la cour vide, seuls les gardiens demeuraient en compagnie du directeur de la prison, homme de sang-froid, fort intelligent.
Il commenca par inspecter les lieux, par examiner la machine affal'ee sur le sol, bris'ee en mille morceaux, puis, la toiture du pr'eau, le mur enfin, dans lequel une large br`eche avait 'et'e creus'ee :
— Tout cela est r'eparable, d'eclarait le directeur de la prison, et vraiment il faut se f'eliciter qu’il n’y ait que des dommages mat'eriels, c’est miracle qu’il n’y ait pas eu d’accident de personnes. Enfin, nous allons ouvrir une enqu^ete et savoir exactement les causes de cet extraordinaire accident. Au fait, o`u est le surveillant-chef ?
— Me voici, monsieur le directeur.
— Bien ! Mon ami, vous allez vous rendre imm'ediatement chez les macons charg'es de l’entreprise de la prison et vous demanderez des ouvriers d’urgence. Pour la toiture, ce n’est pas press'e. Mais j’entends que demain au plus tard, ce mur soit refait. 'Evidemment, il n’y a pas de danger d’'evasion, mais les d'etenus en descellant les pierres de la muraille pourraient se procurer des projectiles. Allez.
— Bien, monsieur le directeur.
Le directeur de la Sant'e allait m^eme se retirer fort satisfait, ainsi qu’il venait de le dire, de n’avoir aucune catastrophe grave `a d'eplorer et v'eritablement 'emerveill'e qu’il n’y ait point eu d’accident de personnes, lorsqu’un gardien haletant accourut jusqu’`a lui :
— Monsieur le directeur…
— Oui, quoi donc ? Qu’est-ce qu’il y a ?
Le gardien avait mis la casquette `a la main, il 'etait affreusement p^ale.
— Monsieur le directeur, dit-il, ah c’est 'epouvantable ! En passant l’inspection des d'etenus, je viens de m’apercevoir… enfin… C’est-`a-dire, Fant^omas… Fant^omas n’est plus dans son cachot.
Les portes de la Sant'e ferm'ees, une enqu^ete tr`es s'ev`ere semblait prouver un quart d’heure plus tard que nul depuis l’accident n’'etait sorti du pr'eau. Pourtant, Fant^omas y avait 'et'e vu au moment m^eme de la catastrophe.
Qu’'etait donc devenu le G'enie du Crime ?
13 – LOIN DE LA SANT'E
Fant^omas n’est plus dans son cachot.
Le gardien n’avait pas cri'e l’extraordinaire nouvelle, qu’`a la minute, un affolement nouveau bouleversait tous ceux qui se trouvaient `a ce moment autour du directeur de la Sant'e.
Tout homme de sang-froid qu’il f^ut, le directeur de la Sant'e perdait la t^ete `a ce moment.
Il bondit sur le gardien qui se tenait effar'e devant lui, il l’empoigna par le collet, et le secouant d’importance :
— Vous ^etes fou, qu’est-ce que vous dites ? Fant^omas n’est plus dans son cachot ? Eh bien, o`u est-il alors ? ah ! c`a, o`u est-il ? parlez donc, dites-le !
— Je ne sais pas.
Le pauvre homme n’en put dire davantage, car, sous l’empire de la col`ere, M. Malherbe, directeur de la Sant'e, le gratifiait d’une telle bourrade, qu’il allait rouler `a quelques pas :
— C’est inimaginable ! C’est impossible ! s’exclama le pauvre directeur en levant les bras au ciel dans un geste d'esesp'er'e. Il n’a pu sortir, pourtant !
Puis il se pr'ecipita comme un fou vers les grandes portes de la prison, redoutant presque de les trouver ouvertes, s’attendant presque `a ce que, en d'epit des consignes les plus s'ev`eres et les plus rigoureuses, Fant^omas ait pu s’en aller tranquillement, sans rencontrer le moindre obstacle.
M. Malherbe fut tout de suite rassur'e. Les grandes portes 'etaient closes, le portillon lui-m^eme 'etait ferm'e.
— Avez-vous vu sortir quelqu’un depuis vingt minutes ? demanda-t-il au concierge.
— Non, monsieur le directeur.
— C’est bien.
M. Malherbe, toujours courant, revint vers le poste-vigie install'e `a la sortie des pr'eaux, o`u devaient se trouver trois gardiens suivant les r`eglements.
— Etiez-vous l`a au moment de l’accident ?
— Oui, monsieur le directeur.
— Avez-vous vu passer quelqu’un, f^ut-ce un gardien ?
— Monsieur le directeur, `a peine le chambardement a commenc'e, que j’ai pris sur moi de refuser le passage `a tout le monde. Il y a des gardiens qui sont entr'es dans le pr'eau, mais personne n’en est sorti. D’ailleurs, si monsieur le directeur se rappelle bien, lui-m^eme a d^u me demander la porte pour p'en'etrer dans la cour.