La gu?pe rouge (Красная оса)
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M. Havard tendit ses deux mains `a l’inspecteur :
— Et moi, je vous remercie. Il y a longtemps que vous appartenez `a la S^uret'e, Juve, il y a longtemps que j’ai pu appr'ecier votre d'evouement, je suis heureux, devant tous, de vous rendre hommage.
Le chef de la S^uret'e allait encore ajouter quelques mots, il n’en eut pas le temps.
— Finissons-en, grogna Fant^omas. J’ai le droit d’^etre trait'e comme un assassin ordinaire et je r'eclame ma mise en cellule.
— Soit : fouillez cet homme !
Deux gardiens fouill`erent le bandit, mais Fant^omas, 'evidemment, en se rendant chez Juve, n’avait rien gard'e qui p^ut ^etre compromettant. On d'ecouvrit seulement, pendu `a son cou, une sorte de m'edaillon d’argent vieilli, que les gardiens lui arrach`erent.
— Laissez-moi cela, dit le bandit.
— Le r`eglement s’y oppose.
Juve, d'ej`a s’'etait empar'e de l’objet. Il ouvrit le bo^itier, eut un haut-le-corps : `a l’int'erieur du m'edaillon, deux photographies seulement apparaissaient, l’une repr'esentant lady Beltham, l’autre H'el`ene.
— Ma ma^itresse, ma fille, murmura Fant^omas. Les deux ^etres que j’ai ch'eris. Juve, j’aimerais mieux mourir que de vous demander une gr^ace, pourtant…
— Laissez ce m'edaillon `a Fant^omas, ordonna Juve. Il ne contient rien qui puisse ^etre dangereux, qui puisse ^etre inqui'etant.
— Merci, Juve.
Ce que n’avait pu faire aucune menace, ce que n’avait point fait l’horreur de sa situation, la simple remise de ce m'edaillon le faisait.
Une larme perla au bord des cils de Fant^omas. Il fit jouer le ressort du bijou, il regarda les deux photographies, puis, se roidissant encore, d'eclara :
— Les formalit'es sont accomplies, je suppose ?
— Emmenez-le, dit M. Havard.
Les inspecteurs de la S^uret'e venaient de s’'ecarter ; les formalit'es du greffe 'etant termin'ees, ils 'etaient dessaisis de Fant^omas. Le bandit appartenait d'esormais `a l’administration p'enitentiaire. Deux gardiens le prirent par les mains. On l’avait d'eli'e. Quelques minutes plus tard, des bruits de verrous retentirent. Le pas m'elancolique du gardien de faction 'ebranlait les silencieuses all'ees de la sourici`ere. Fant^omas 'etait d'efinitivement incarc'er'e, d'efinitivement pris, et m^eme, un homme 'etait charg'e nuit et jour de ne point le perdre de vue.
Alors seulement, Juve, Fandor et les inspecteurs de la police se retir`erent.
`A six heures du soir, Juve et Fandor quittaient le Palais de Justice. Les deux amis 'etaient rompus de fatigue, bris'es d’'emotion. L’arrestation impr'evue de Fant^omas, les sc`enes qui l’avaient marqu'ee, la perp'etuelle tension d’esprit o`u ils 'etaient demeur'es l’un et l’autre, cependant qu’on conduisait le bandit au D'ep^ot, les avaient accabl'es.
Fant^omas mis en cellule, d’ailleurs, ils n’avaient pas encore pu prendre imm'ediatement un repos dont ils avaient cependant un imp'erieux besoin.
Aid'e de Fandor, Juve avait d^u effectuer une infinit'e de d'emarches. M. Havard avait voulu un r'ecit complet et d'etaill'e des derniers 'ev'enements. Puis le chef de la S^uret'e avait vivement pri'e Juve de l’accompagner au cabinet du procureur g'en'eral.
Le haut magistrat avait alors longuement entretenu les deux amis.
Apr`es avoir vivement f'elicit'e le d'etective et son ins'eparable compagnon, J'er^ome Fandor, il avait enfin proc'ed'e `a la d'esignation d’un juge d’instruction, lequel n’'etait autre que Germain Fuselier, ce qui avait combl'e d’aise le journaliste aussi bien que le policier.
Sortis du cabinet du procureur g'en'eral, Juve et Fandor s’'etaient naturellement rendus au cabinet de M. Fuselier pour lui apprendre les extraordinaires 'ev'enements qui venaient de se d'erouler, pour lui annoncer aussi qu’il allait avoir `a conduire, t^ache honorifique mais terriblement lourde et p'erilleuse, la formidable instruction des affaires de Fant^omas.
Cette visite, naturellement, avait oblig'e Juve et Fandor `a faire une fois encore le r'ecit des derniers drames survenus.
— Ah mon vieil ami, mon vieil ami, murmurait le journaliste en sortant du Palais de Justice avec Juve.
— Quoi ? Qu’est-ce qui te prend, Fandor ?
— Rien, mais je suis heureux ! Tenez, j’imagine qu’aujourd’hui est la plus belle journ'ee de ma vie. Parbleu, Fant^omas est pris, il me semble que tout l’affreux cauchemar qu’'etait notre vie depuis dix ans va brusquement prendre fin et que rien ne s’opposera plus d'esormais `a ce que je puisse aimer H'el`ene, et…
— Tais-toi, Fandor.
Le front de Juve s’'etait brusquement rembruni.
— Nous ne sommes pas au bout de nos peines, d'eclara-t-il, et j’ai bien peur, Fandor, que tu t’illusionnes en escomptant un bonheur trop prochain. Oui, sans doute, Fant^omas est pris, mais Fant^omas est pris parce qu’il l’a voulu et il m’a dit :
— Juve, je ne vous crois pas, je ne veux pas vous croire, protesta le jeune journaliste et d’abord, Juve, vous l’avez dit ce matin, il y a une lettre d’H'el`ene qui vous est arriv'ee. Nous ne l’avons pas ouverte, pr'eoccup'es que nous 'etions tous les deux d’arr^eter Fant^omas, mais maintenant que le monstre est sous les verrous ; nous allons pouvoir la lire en paix, savoir ce qu’elle nous dit, deviner ce qu’elle nous cache encore, peut-^etre.
Les deux amis mont`erent rapidement `a l’appartement de Juve. Fandor, en effet, avait une h^ate f'ebrile de conna^itre la lettre 'ecrite `a Juve par H'el`ene et dont il n’avait point encore pris connaissance, ayant fait taire ses 'ego"istes pr'eoccupations pour pr^eter main forte `a Juve, alors que celui-ci arr^etait le terrible Fant^omas.