Le Voleur d'Or (Золотой вор)
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— Au secours ! au secours ! Ah, mon Dieu ! C’est affreux ! Que je souffre ! On m’assassine ! Au secours ! Venez ! Venez !
Cette fois, les hommes se pr'ecipitaient, p'en'etraient en se bousculant dans la cave. Un spectacle extraordinaire s’offrait `a leurs yeux : un homme se tordait litt'eralement sur le sol en proie aux plus vives souffrances, un homme qui avait le pied pris dans le pi`ege, un homme que tous reconnaissaient `a ce moment :
L'eon Drapier ! le directeur de la Monnaie !…
On se pr'ecipitait autour de lui.
Des exclamations s’entrecroisaient.
— Ah ! par exemple !
— Ah ! voil`a qui est extraordinaire !
— Mon Dieu ! mon Dieu ! Que s’est-il pass'e ?
En vain essayait-on d’arracher quelques paroles `a l’infortun'e L'eon Drapier ; les hurlements qu’il avait pouss'es l’avaient ext'enu'e, L'eon Drapier demeurait d'esormais inerte, ayant perdu connaissance.
M. Havard, les inspecteurs, les employ'es de la Monnaie 'etaient abasourdis. Seul le visage de M. Mix restait impassible ; sur ses l`evres errait un ironique sourire.
— D'egagez-le donc, tout d’abord ! commenca-t-il.
Et, machinalement, on s’occupait `a d'efaire le pi`ege qui lui tenait la jambe.
— Emportons-le hors d’ici, sugg'era Havard, qu’on le ram`ene `a son bureau et puis on s’expliquera !
— On s’expliquera, en effet…, d'eclara Mix.
En l’espace de quelques instants, L'eon Drapier 'etait d'egag'e du pi`ege. Sans donner signe de vie, il se laissait aller, secou'e sur les 'epaules des hommes qui le transportaient.
Mix sortit le dernier de la cave, ferma la porte `a cl'e, non sans avoir au pr'ealable jet'e un coup d’oeil de m'efiance sur le tas d’or qu’il venait de remarquer renvers'e sur le sol.
Un instant, Mix avait eu l’id'ee de rester dans la cave ; pourquoi ne le faisait-il pas ?
'Etait-ce qu’il avait peur de quelque chose ?
'Etait-ce au contraire qu’il ne voulait pas abandonner un seul instant L'eon Drapier ?
En tout cas, le d'etective ne faisait aucune remarque sur la pr'esence insolite de ce tas d’or par terre, il n’en disait rien `a son entourage.
Une heure apr`es ces 'ev'enements, deux hommes 'etaient en t^ete-`a-t^ete, seuls, face `a face, dans le cabinet de M. le directeur.
C’'etaient L'eon Drapier et Mix.
L'eon Drapier, tr`es p^ale, avait la jambe 'etendue sur une chaise, le pantalon relev'e jusqu’au genou, le mollet entour'e jusqu’`a la cheville de linges sanguinolents. Il paraissait souffrir, autant moralement que physiquement.
Mix fumait placidement une cigarette.
Apr`es un silence, Mix articula :
— Je vous ai sauv'e, monsieur Drapier !
— Qu’entendez-vous par l`a ? gronda le directeur. J’estime qu’au contraire, en appelant la police, en me faisant d'ecouvrir pris au pi`ege `a l’int'erieur de cette cave par M. Havard, vous m’avez rendu ridicule, pour ne pas dire suspect…
Mix haussa les 'epaules.
— Qu’auriez-vous fait `a ma place ? Voyons, monsieur Drapier ! Nous installons cet apr`es-midi avec les plus grandes pr'ecautions un pi`ege, un vrai pi`ege `a loup dans l’int'erieur de la cave. Nous y attachons des fils 'electriques qui doivent entrer en contact au moment o`u le pi`ege se refermera sur quelqu’un ; ces fils 'electriques font agir deux sonnettes, l’une dans le bureau du chef de la surveillance et l’autre dans votre propre cabinet. Vous me dites que vous restez dans votre bureau. Moi, je me prom`ene dans l’immeuble, histoire de regarder un peu partout ce qui se passe. Est-ce exact ?
— C’est exact, reconnut Drapier.
— Tout d’un coup, poursuivit Mix, j’entends une sonnerie… Je veux p'en'etrer chez vous, la porte est ferm'ee, je l’ouvre et vous n’y ^etes pas… Que conclure ? Je ne me pose pas la question en ce qui vous concerne, je me dis simplement que le coupable est pinc'e, et pour que nous soyons en nombre, j’appelle la police ! Nous descendons tous `a la cave et nous avons la surprise, qui est pour vous une malchance, de trouver qui, pris au pi`ege ? Vous, monsieur le directeur, vous en personne, L'eon Drapier !…
— Et alors, continuait L'eon Drapier, en s’animant, quelle est la conclusion logique que doit formuler le chef de la S^uret'e ? C’est qu’assur'ement le voleur de l’h^otel des Monnaies n’est autre que moi…
Mix souriait 'enigmatiquement.
— N’auriez-vous pas compris de la sorte ?
— Ah ! par exemple ! hurla L'eon Drapier, vous ^etes abominable, et vous vous moquez de moi !… Mais non je n’aurais pas compris de la sorte, pour cette bonne raison que je sais que je suis innocent, pour cette bonne raison que je suis rest'e dans mon bureau jusqu’au moment o`u la sonnerie a retenti, pour cette bonne raison que c’est `a ce moment, uniquement, et n’'ecoutant que mon courage et mon empressement `a d'ecouvrir le coupable, que j’ai bondi hors de mon bureau pour vous appeler !… Ne vous voyant pas, ne pouvant r'esister `a la curiosit'e qui me harcelait, je suis descendu seul dans la cave, j’en ai ouvert la porte de fer, et…
— Et, conclut Mix, vous vous ^etes fait prendre au pi`ege que vous aviez tendu ! C’est en tout cas d’une maladresse extraordinaire !
— Maladresse ou non, hurla L'eon Drapier, ce n’est pas `a vous de me le reprocher, mais bien `a vous de me plaindre !
— Qui vous dit que je ne vous plains pas ?
— Lorsque je r'epondais d’un air 'egar'e, abasourdi, souffrant le martyre aux insupportables questions que me posait le chef de la S^uret'e, vous auriez d^u `a ce moment, vous rendant compte de mon trouble et de mon embarras, prendre la parole, fournir des explications…
— Lesquelles ?
— Lesquelles ? Est-ce que je sais, moi ? Le principal est que je suis innocent…
— Ah ! voil`a ! fit Mix.
— Comment ! s’'ecria L'eon Drapier, vous doutez ?
Mix fit un geste n'egatif.
— Pas maintenant, plus maintenant… Mais je vous avoue que j’aurais 'et'e tr`es dispos'e `a douter de votre honn^etet'e si…
— Si quoi ? haleta L'eon Drapier, qui sentait combien malgr'e son innocence les 'ev'enements se tournaient contre lui.