Les souliers du mort (Ботинки мертвеца)
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Fandor courut comme un fou jusqu’au petit pays. En route, cependant, il se frappait le front d’un geste d'esesp'er'e.
— Nom de nom, disait le journaliste, mais c’est dimanche aujourd’hui, et le dimanche, le t'el'ephone ne marche pas.
Fandor, en effet, au moment o`u la voiture automobile enlevait devant lui Fernand et Alice Ricard, avait imm'ediatement pens'e `a pr'evenir Juve de cet accident.
— Sale administration des Postes, grommelait Fandor. Imb'ecile d’organisation francaise. Ah, ce n’est pas en Angleterre qu’on s’arr^eterait `a des inventions pareilles. Fermer le t'el'ephone. Si ca n’est pas honteux [14] !
Fandor, toutefois, se h^atait toujours. L’esprit fertile du journaliste n’'etait jamais embarrass'e longtemps.
— Je trouverai bien moyen, pensait-il, de t'el'ephoner, en d'epit de la fermeture du bureau de poste. C’est bien le diable si `a Vernon…
Puis, Fandor s’interrompit brusquement.
— Dieu que je suis b^ete, je n’ai qu’`a aller `a la gare. Toutes les gares de chemins de fer, en effet, et Fandor le savait bien, poss`edent une ligne t'el'ephonique. Cette ligne, en fait, n’est pas reli'ee au r'eseau de l’'Etat de facon permanente, mais 'etant donn'e la gravit'e des circonstances, 'etant donn'e qu’il s’agissait de t'el'ephoner `a Juve, au policier Juve, Fandor ne d'esesp'erait pas d’obtenir de l’administration des chemins de fer ce qui n’'etait en somme qu’une complaisance :
— Je vais t'el'ephoner au commissaire sp'ecial de la gare Saint-Lazare, pensait Fandor, et je chargerai ce fonctionnaire de t'el'ephoner de ma part `a Juve, au quatre cent trente-six z'ero z'ero [15].
Malheureusement, les diverses formalit'es `a remplir `a la gare prirent plus de deux heures. Le journaliste obtint bien, apr`es de nombreuses palabres, l’autorisation de t'el'ephoner au commissaire sp'ecial de la gare Saint-Lazare, il obtint bien encore que celui-ci t'el'ephon^at `a Juve, mais comme il demandait qu’on l’avert^it de la r'eponse du policier, Fandor devait apprendre avec d'esespoir qu’il n’y avait pas de r'eponse, pour la bonne raison que Juve ne se trouvait pas chez lui.
Fandor, alors, se sentit d'esesp'er'e.
Comme il traversait la salle d’attente, ne sachant trop ce qu’il allait faire, une pens'ee nouvelle lui vint :
— Bon Dieu, que je suis b^ete ! J’ai encore un autre moyen de pr'evenir Juve, je vais lui t'el'egraphier.
Fandor revint supplier le chef de gare et obtint cette fois, sans trop de peine, d’envoyer une longue d'ep^eche au policier.
Cette d'ep^eche, Fandor voulait la faire adresser `a deux endroits diff'erents :
— J’en enverrai un exemplaire rue Tardieu, expliqua-t-il, et l’autre `a la Pr'efecture de Police, Juve l’aura toujours `a l’un ou `a l’autre de ces endroits.
Et, pour r'ediger son texte, Fandor, quittant le bureau du chef de gare aux all'ees et venues continuelles, passa dans la salle d’attente. Or, au moment m^eme o`u le journaliste se trouvait sur le quai, il s’arr^eta, devenu bl^eme de saisissement : devant lui, `a quelques m`etres `a peine, tenant une valise `a la main, portant un pardessus sur son bras, ayant tout l’air de s’appr^eter `a faire un long voyage, un homme :
— Fernand Ricard, dit Fandor. Ah, ca, mais je deviens fou ! Comment ? Le voil`a revenu ?
Or, pr'ecis'ement, un employ'e annoncait sur le quai :
— Les voyageurs pour le train du Havre, avancons s’il vous pla^it ! Le rapide est signal'e !
J'er^ome Fandor entendit cela comme dans un r^eve. Quelques secondes encore, le rapide arrivait. Alors, brusquement, Fandor prit une d'ecision :
— Monsieur le chef de gare ! Monsieur le chef de gare !
Comme un fou, le journaliste avait bondi vers le bureau du brave homme.
— Voici ma d'ep^eche.
D’une 'ecriture illisible, Fandor griffonnait :
Je pars pour je ne sais o`u, Le Havre sans doute, derri`ere Fernand Ricard qui semble en fuite. Vous t'el'egraphierai rue Tardieu. Amiti'es, Fandor.
Le journaliste, rapidement, jetait cela aux mains du chef de gare, qui devant sa pr'ecipitation, perdait la t^ete :
— Mais que faites-vous ? disait le brave homme. O`u allez-vous ?
Le rapide allait d'emarrer, Fandor sauta sur le marchepied.
— Mais vous n’avez pas de billet ! hurla le chef de gare.
— Je m’en fous ! cria Fandor.
La r'eponse du journaliste se perdit dans le fracas.
24 – CRIME OU SUICIDE ?
— En voiture, les voyageurs pour Vernon, allons, d'ep^echons !
On claquait les porti`eres, d'ej`a le train s’'ebranlait. Un homme qui arrivait en courant, se pr'ecipita sur le marchepied, ouvrit une porti`ere de wagon, grimpa dans un compartiment et tomba plus qu’il ne s’assit sur la banquette.
— Ouf, murmura-t-il, il 'etait temps.
Cet homme, c’'etait Juve.
Le c'el`ebre policier, apr`es avoir 'et'e convoqu'e par M. de Parcelac, directeur du Comptoir National, afin de d'ecouvrir l’homme qui avait os'e truquer la roue de la loterie, n’avait pas h'esit'e `a conclure :
— C’est encore du Fant^omas.
L’inspecteur de la S^uret'e avait, en outre, eut la certitude qu’il fallait rattacher les diverses aventures de l’affaire Baraban `a cette nouvelle affaire.
— Si Fant^omas s’est fait passer pour Baraban, se disait Juve, c’est certainement qu’il y avait un int'er^et. Le truquage de la roue n’a 'et'e fait et combin'e qu’en vue de gagner le gros lot de deux cent mille francs. Fant^omas sachant que le num'ero 6 666 appartenait `a Baraban, s’est arrang'e pour d’abord, en se faisant passer pour M. Dominet, secr'etaire de la Chambre des notaires, s’emparer du cachet du Comptoir National, et ensuite des num'eros devant ^etre tir'es le soir m^eme. Il les a remplac'es par des 6.