L'assassin de lady Beltham (Убийца леди Бельтам)
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Cette femme, qui accompagnait les apaches, 'etait une pierreuse d'ej`a sur le retour, que la d'ebauche et la laideur avaient rendue c'el`ebre dans les quartiers de la Chapelle.
Apr`es que le Bedeau eut assur'e que ni lui, ni ses compagnons ne viendraient au rendez-vous que Fant^omas leur faisait assigner par ce jeune homme inconnu, les apaches, sit^ot le d'epart de ce dernier, s’'etaient regard'es interloqu'es puis, sans s’en rendre compte, avaient n'eglig'e la partie de Zanzibar pour s’entretenir myst'erieusement entre eux.
En l’espace de cinq minutes, tous 'etaient d’accord et, n’ayant plus rien `a se dire, ils sortaient t^ete basse du cabaret du p`ere Korn et s’acheminaient dans la direction du rendez-vous que leur donnait le Ma^itre de l’Effroi.
Fant^omas 'etait d'ecid'ement toujours le puissant d’entre les puissants, il n’avait qu’un geste, qu’un signe `a faire, on lui ob'eissait.
Dans le silence de la nuit, une voix s’'eleva :
— Enjambe la balustrade, ma fille !
C’'etait le Bedeau qui signalait `a la grande Berthe la petite grille qui s'eparait de la rue le commencement du parc des Buttes-Chaumont. La pierreuse ob'eit sans mot dire ; aid'ee par OEil-de-Boeuf et Bec-de-Gaz, elle s’introduisit dans le jardin public, d'esert `a cette heure nocturne. Les trois compagnons la suivirent, et les quatre individus, avec pr'ecaution, 'evitant de faire du bruit, redoutant d’^etre surpris par quelque garde, long`erent les massifs, se dissimulant sous les arbres, 'evitant de marcher au milieu des all'ees, afin de n’^etre point vus.
Au bout de quelques instants ils parvenaient au pied du kiosque o`u le jeune homme inconnu leur avait dit que Fant^omas viendrait les rejoindre. Ils attendirent l`a, un quart d’heure, vingt minutes.
— Personne, grommela le Bedeau. S^ur que ce gigolo s’a foutu de nous.
Bec-de-Gaz et OEil-de-Boeuf hoch`erent la t^ete sentencieusement. L’un d’eux murmura d’une voix menacante :
— Si jamais, il retombe sous nos pattes, qu’est-ce qu’on lui passe `a ce morveux `a la manque pour s’^etre offert notre figure !
Mais il s’arr^eta soudain de parler. Un bruit l'eger de feuilles s`eches craquant sous des pas venait de retentir dans la broussaille, et d’un massif surgit une silhouette noire. Les apaches se redress`erent, comme mus par un ressort : c’'etait Fant^omas.
— Ca va patron ? interrogea le Bedeau d’un ton qu’il s’efforcait de rendre aimable.
Mais Fant^omas ne lui r'epondit point. Tr`es bas, d’une voix enrou'ee, `a peine perceptible, le Ma^itre du Crime prit la parole :
— C’est bien d’^etre venus, je vous remercie. J’ai besoin de quelqu’un parmi vous. De la grande Berthe. Il y a une femme au D'ep^ot actuellement et je veux la faire sortir. C’est la grande Berthe qui la sauvera.
Fant^omas se rapprocha de la femme. Il la prit par la main, cependant que d’une voix un peu plus puissante, il ordonnait aux hommes :
— Vous autres, d'ebinez-vous, je n’ai plus besoin de vos services !
Le Ma^itre avait une attitude 'etrange, et il s’exprimait d’une voix lointaine dont les intonations 'etaient difficiles `a d'efinir. Fant^omas 'etait-il 'emu plus qu’il ne voulait le para^itre, ou avait-il peur ? Ou bien alors, au contraire, cette apparence bizarre, presque h'esitante, dissimulait-elle une sourde col`ere, une froide mais terrible r'esolution ?
Le Bedeau et ses deux amis se posaient en vain ces questions, cependant qu’ils d'evalaient le monticule au sommet duquel se trouvait le kiosque o`u Fant^omas les avait rejoints.
— Qu’est-ce qu’il avait le patron ? demandait OEil-de-Boeuf. Ca n’avait pas l’air de bicher.
— Oh ben, c’est qu’il pr'epare sans doute une combine et alors, il a p’t-^etre les foies rapport `a la rousse, r'epondit Bec-de-Gaz.
Le Bedeau, lui, toujours tr`es craintif, ayant perp'etuellement la peur du Ma^itre, se contenta de prof'erer :
— Fant^omas est le patron. Apr`es tout, s’il nous a fait d'ebiner sans vider son sac, c’est qu’il a ses raisons.
Les apaches continu`erent silencieusement leur marche. Aucun d’eux ne songeait au sort que Fant^omas pouvait r'eserver `a la grande Berthe, rien ne prouvait d’ailleurs que le bandit allait faire le moindre mal `a la pierreuse et du reste, aucun d’eux ne se souciait d’elle.
***
Le lendemain, r'eunis chez le p`ere Korn, les complices de Fant^omas recommencaient leur partie de d'es, ils n’avaient revu ni Fant^omas, ni la grande Berthe.
Contrairement `a ses habitudes, celle-ci n’'etait pas apparue dans le cabaret, `a moiti'e grise `a une heure du matin, lest'ee de sa modeste recette du soir, vingt-cinq ou trente sous habituellement, qu’elle d'epensait aussit^ot dans le bouge, lorsqu’elle ne les perdait pas au zanzi.
La pierreuse, en effet, s’'eternisa ce soir-l`a sur le boulevard de la Chapelle, o`u elle avait install'e son quartier g'en'eral.
Contrairement aux r`eglements de la police, elle fit le trottoir apr`es une heure du matin et, avec la plus tranquille audace, m^eme avec une attitude de d'efi et de provocation, elle racola les passants attard'es, injuriant ceux qui ne s’arr^etaient pas pour lui r'epondre.
Sous les arcades de m'etro, la pierreuse faisait un tel tapage que des agents finirent par s’approcher, pour voir ce dont il s’agissait.
Ils trouv`erent la grande Berthe 'etendue `a plat ventre sur un banc, comptant ses gros sous, en poussant de rauques grognements :
Elle entendit le pas lourd des gardiens de la paix et ne se d'erangea point. Elle se contenta de les fixer d’un oeil narquois et lorsqu’ils pass`erent `a proximit'e d’elle, elle grommela :
— Tiens v’l`a les vaches !
— Brigadier, fit le plus jeune des agents, un d'ebutant, qui tressaillait sous l’insulte, avez-vous entendu ?
Le brigadier, un homme d’^age, r'epliqua, paternel :
— Assur'ement que j’ai-z-entendu, mais mieux vaut-z-avoir l’air de ne pas entendre, ce n’est pas la peine de faire des histoires.
Cependant, la grande Berthe insistait avec un go^ut d'eplorable, une persistance de mauvais aloi :
— Allez-vous cavaler, les vaches ? grogna-t-elle. Non, mais c’est-y pas malheureux de voir des feignants comme ces gars-l`a !