La disparition de Fandor (Исчезновение Фандора)
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Cependant que l’infant s’installait dans sa chambre, quelqu’un entrait `a l’h^otel.
— Le directeur ? demanda-t-il d’un air sec.
Le portier consid'era ce nouveau venu, le d'evisagea des pieds `a la t^ete et fit une moue significative.
— Si c’est pour un emploi, fit-il, nous n’avons besoin de personne.
L’interlocuteur du portier 'etait en effet un homme de modeste apparence, bien que tr`es correctement v^etu d’un complet noir de bonne coupe et d’un chapeau melon.
— Je d'esire voir le directeur.
— Il n’y a pas de directeur, r'epondit le portier. Il y a un g'erant.
— Soit, poursuivit le visiteur, menez-moi au g'erant.
— Le g'erant, c’est M. Hoch, et il est tr`es occup'e.
— J’attendrai, fit le personnage qui se mit `a faire les cent pas dans le hall.
M. Hoch s 'etant finalement d'erang'e de son bureau vint dans le hall, salua le nouveau venu.
— Vous d'esirez, Monsieur ?
— Ah, c’est vous le g'erant ? demanda le visiteur.
— C’est moi. Monsieur.
— Bien, fit l’inconnu, dans ce cas, je vous prie de me donner une chambre.
— Mais Monsieur, poursuivit M. Hoch qui commencait `a s’'enerver, il 'etait inutile de me d'eranger. il y a dans l’h^otel tout un personnel affect'e `a ce service et qui est l`a pour vous montrer les appartements et convenir avec vous des prix.
— Je le sais. Si j’ai demand'e `a vous parler c’est parce que j’ai autre chose `a vous dire. Il me faut une chambre au premier 'etage.
— Elles sont toutes occup'ees, Monsieur, par Son Altesse Royale et sa suite.
— Erreur, jeune homme, dit l’inconnu, le n°7 est libre.
— C’est vrai, vous avez raison. Mais c’est une tr`es vilaine pi`ece, toute petite donnant sur la cour.
— Je tiens `a la prendre.
M. Hoch h'esita un instant. Puis il r'epondit :
— Si vous y tenez particuli`erement, monsieur, on vous la donnera, mais c’est vingt-cinq francs par jour.
Le voyageur ne sourcilla pas. M. Hoch ajoutait :
— Et pour ce prix-l`a vous auriez une chambre superbe au troisi`eme.
— Ca m’est 'egal, je veux ^etre au premier. Le 7 convient.
Baissant la voix, le voyageur poursuivit :
— Vous mettrez mes d'epenses sur la note de Son Altesse Royale.
— Alors au lieu d’^etre de vingt-cinq francs, le prix de la chambre sera de trente-cinq.
— Pourquoi ?
M. Hoch, sous ses dehors corrects et distingu'es, ne brillait pas par le tact. C’'etait un maladroit, un gaffeur, qui n’h'esita pas `a r'epondre :
— Je majore de dix francs, parce que je suis oblig'e de donner dix francs par chambre `a M. le Marquis.
— Soit, dit-il, ce sera trente-cinq francs. Mais je vous prie de noter ceci : il ne faudra faire aucune attention `a moi tant que je s'ejournerai `a l’Imp'erial, ne soyez pas surpris si je ne parle `a personne de la suite de Son Altesse Royale et si nul n’a l’air de me conna^itre.
— Ah ?
— Non. Je suis l’agent de la police secr`ete qui accompagne toujours Son Altesse Royale, don Eugenio d’Aragon.
8 – JUVE SE D'ECIDE
Br^ul'e sous son d'eguisement de colporteur, Juve n’avait eu d’autres ressources que de descendre `a l’auberge m^eme de Beylonque, de s’y installer et de commencer minutieusement son enqu^ete polici`ere.
Malheureusement, si Juve se donnait beaucoup de mal, il ne semblait pas qu’il d^ut arriver `a comprendre quoi que ce f^ut au myst`ere de la petite maison nich'ee dans les pignadas silencieuses.
Le crime avait 'et'e commis par un homme. Juve, en revanche, n’avait rien d'ecouvert depuis qui lui perm^it de sp'ecifier quel pouvait ^etre le coupable. Ni la victime. 'Etait-ce Mme Borel ? Possible. Mais, en somme, rien n’'etait moins certain. Mme Borel pouvait fort bien ^etre en promenade, en voyage, n’importe o`u. Le silence ne prouve rien.
Delphine Fargeaux, d’autre part, pouvait, elle aussi, ^etre en voyage, et de plus, rien ne prouvait qu’elle f^ut jamais venue chez les Borel, dans leur maison.
— Pourtant, se dit Juve, il est invraisemblable qu’il y ait eu crime chez Mme Borel, et que Mme Borel ne soit ni l’assassin, ni la victime. Nom d’un chien de nom d’un chien.
Mais si Juve se mettait en col`ere, cela n’avancait `a rien. Et puis encore, d’autre probl`emes se dressaient devant lui :
Le malheureux idiot Saturnin Labour`es n’avait-il pas cont'e une histoire incoh'erente ? N’avait-il pas affirm'e qu’il avait 'et'e mordu par une dame, une dame qu’il avait nomm'ee Mme Borel ? une dame qui, d’apr`es ses dires, se baignait tout habill'ee ?
Et Juve, entra^in'e par la logique, r'efl'echissant `a ce d'etail, finit par se dire :
— Saturnin 'etait un idiot. Donc, a priori, ses propos ont peu d’importance. De plus, comme il n’est pas coutume que l’on se baigne tout habill'e, Saturnin peut tr`es bien avoir invent'e ca de toutes pi`eces.
Mais, cette derni`ere facon de voir, Juve, quoiqu’il en eut fort envie, ne pouvait gu`ere s’y arr^eter. Que Saturnin ait menti en inventant de toutes pi`eces son r'ecit de morsure, c’'etait `a la rigueur possible, mais en somme, si l’idiot inconsciemment avait improvis'e une histoire pareille, il fallait reconna^itre que vraiment une s'erie de co"incidences venait en quelque sorte 'etayer ses affirmations.
Juve, en effet, devait bien reconna^itre que la blessure de Saturnin Labour`es avait exist'e. M. Peyrat, le pharmacien de Beylonque, interrog'e par Juge, tout comme Mme Labour`es, l’avait affirm'e : Saturnin portait bien une blessure `a la main droite.