La fille de Fant?mas (Дочь Фантомаса)
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Par les fen^etres, on apercevait les montagnes sauvages, encerclant de toutes parts la maison, et la nuit close, `a peine 'eclair'ee par une lune ind'ecise, pr^etait des aspects fantastiques aux arbres tortur'es par le vent.
Teddy 'etait arriv'e vers les neuf heures, `a cheval, suivant son habitude. Il revenait d’une longue course, et n’ayant plus le temps de regagner pour le d^iner sa demeure, il s’'etait arr^et'e `a Diamond House pour solliciter des hospitaliers propri'etaires, le traditionnel morceau de « blitong
Teddy avait trouv'e Diamond House presque d'esert. L’usine, voisine de la maison d’habitation, avait d'ej`a renvoy'e ses ouvriers, et dans les b^atiments sombres, les machines avaient arr^et'e leur va-et-vient.
Hans Elders lui-m^eme n’'etait pas l`a. `A son habitude, il 'etait parti de bonne heure pour gagner Durban, pour faire `a son cercle sa partie de baccara. D'ej`a les domestiques 'etaient remont'es se coucher, seule Winie r^evait `a l’une des fen^etres du salon.
C’'etait la jeune fille qui s’'etait avanc'ee `a la rencontre de Teddy, c’'etait elle qui, avec sa familiarit'e libre, cette cordialit'e simple qui r`egne dans tout le Natal, avait improvis'e au jeune homme un frugal souper, tr`es heureuse de sa venue, d’ailleurs, qui lui donnait l’occasion d’une causerie confiante, qui lui permettait de d'echarger dans une oreille amie le poids de son chagrin.
Pour Teddy, tandis qu’il prodiguait `a Winie les mots les plus consolants, les assurances les plus douces, dans l’espoir de calmer son chagrin, il semblait `a la v'erit'e fort peu convaincu de ce qu’il disait…
Ce qui faisait que Teddy 'etait sombre, c’est que, pensait-il, m^eme si l’innocence de Wilson Drag 'eclatait – et elle 'eclaterait – un mariage n’en serait pas moins fort difficile entre Winie et Wilson Drag.
Wilson Drag, en effet, n’apprendrait-il pas un jour ou l’autre, et cela par le fait m^eme de Teddy, la nature v'eritable de Hans Elders ?
Et Winie n’'etait-elle pas, de la sorte, vou'ee aux pires malheurs ?
Or, comme Winie silencieusement pleurait, comme Teddy, `a bout d’arguments, demeurait embarrass'e, pein'e du chagrin de Winie, mais ne sachant plus trop que dire, voici qu’au m^eme instant les deux jeunes gens tressaillirent :
— Avez-vous vu ? haleta Winie.
— Oui, il m’a sembl'e…
Teddy d'ej`a s’'etait lev'e, il courait `a la fen^etre.
— Hello ! qui va l`a ?
La voix du jeune homme r'esonna, vibrante et chaude dans le silence calme du soir. Nulle r'eponse. Teddy r'ep'eta :
— Hello, qui va l`a ? Que veut-on ?
Nulle r'eponse encore.
Et comme Winie l’avait rejoint et se tenait tr`es p^ale, `a ses c^ot'es, Teddy, persuad'e qu’ils avaient 'et'e victimes d’une illusion, d'eclara :
— Nous avons d^u nous tromper, il n’y a personne…
Mais Winie, elle, 'etait certaine du contraire :
— Non ! non ! fit-elle, je suis s^ure de ce que j’ai vu, il y avait quelqu’un qui collait son visage `a la fen^etre, qui nous 'epiait.
— Qui ?
Teddy haussa les 'epaules tranquillement.
— Qui ? Winie, reprit-il. Mais c’est peut-^etre votre p`ere, tout simplement qui rentre et qui, voyant de la lumi`ere ici, a regard'e en passant… Nous allons l’entendre ouvrir la porte et…
— Non, dit Winie, si c’'etait papa, il aurait r'epondu `a nos appels.
— Eh bien, c’est un domestique attard'e, qui craignait une r'eprimande.
— Il ne serait pas rentr'e `a Diamond House par cette porte, Teddy.
— Alors, c’est un passant qui a 'et'e intrigu'e par votre maison. On s’attend si peu, au sortir du vallon sauvage qu’il y a `a cinquante m`etres d’ici, `a trouver une demeure, qu’il est assez naturel…
Et soudain, Winie sursauta de nouveau :
— L`a ! l`a ! fit-elle, voyez…
Teddy, de ses yeux percants, de ses yeux de chasseur, habitu'es `a saisir les moindres d'etails, `a d'ecouvrir, m^eme au plus fort de la nuit, les plus petits aspects d’un paysage, avait, lui aussi, tout comme Winie, apercu l’ombre dans le bout du jardin.
— Oui ! avoua-t-il cette fois.
Et, rapidement, rabattant les volets de fer qui cl^oturaient la fen^etre et mettaient la pi`ece `a l’abri de toute attaque, il ajouta :
— J’en aurai le coeur net, parbleu. Restez ici, Winie, je vais aller fouiller le jardin.
Mais Teddy n’avait point travers'e le salon que Winie, effray'ee, s’agrippait `a lui :
— Oh non ! criait la jeune fille, pour l’amour de Dieu, n’y allez pas.
— Et pourquoi ?
— J’ai peur pour vous…
— Allons donc.
— C’est sans doute un malfaiteur, un bandit, on a signal'e des convicts dans les environs. N’y allez pas, Teddy.
Mais du moment qu’il s’agissait d’un danger `a courir, pas moyen de retenir Teddy.
Outre qu’il 'etait naturellement brave, sa vanit'e de jeune homme n’e^ut pas admis de reculer.
Il repoussa Winie doucement :
— Vous ^etes folle, dit-il. Si par hasard c’'etait un malfaiteur, ce serait une raison de plus pour aller le chercher. D’ailleurs, un homme en vaut un autre.
— Je vous en supplie, s’'ecria Winie, j’ai peur, terriblement peur.
Et comme Teddy, sans l’'ecouter, ouvrait la porte du salon, la jeune fille, comprenant qu’elle n’allait pouvoir le retenir, demanda :
— Vous ^etes arm'e, au moins ? Vous avez vos revolvers ?
Machinalement, Teddy porta la main `a sa ceinture o`u, d’habitude, pendait toujours l’un des Colt qui 'etait ses compagnons habituels.
— Non, dit-il, ils sont rest'es dans les fontes de ma selle. Peu importe. Ne vous inqui'etez pas.