Le mariage de Fant?mas (Свадьба Фантомаса)
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Dans le bouge, un joueur d’accord'eon venait de faire une apparition, des danseurs sautaient, des cavaliers seuls, des filles gambadaient ivres et repoussantes.
— Dites donc vous, dit soudain le patron du bouge, un colosse qui se promenait au milieu de sa client`ele arm'e d’une trique, qu’est-ce que vous foutez ici, mon garcon. V'l`a cinq minutes que je vous zyeute, et vous ne buvez seulement pas.
Imm'ediatement, Fandor comprit que les choses allaient se g^ater pour lui. Il est mauvais en effet, p'erilleux au plus haut point, lorsque l’on se trouve en pareille compagnie, de ne point adopter l’attitude g'en'erale.
Or, Fandor ne buvait pas, ne dansait pas. Lui qui avait cependant l’habitude des enqu^etes polici`eres, se faisait remarquer. Vite, il sauta sur un verre, et r'epondit `a Coup-de-B^aton :
— Et puis quoi alors, on a pas le droit de regarder les m^omes ici ?
Mais il avait beau vouloir faire diversion, il 'etait trop tard. On se groupait autour de lui, on l’examinait curieusement.
— Encore un roussin nom de Dieu ! commenca B'eb'e.
Et derri`ere lui, Bec-de-Gaz, qui par peur des coups, ne se mettait jamais au premier rang, susurrait :
— J’ parie qu’il est de la Tour-Pointue [6], faut le faire.
Fandor, instinctivement, serrait dans sa poche la crosse de son browning, pr^et `a vendre ch`erement sa vie.
— Vos gueules vous ! hurla-t-il, si y en a encore un qui dit que je suis de l’arnac [7], je lui fais passer le go^ut du pain. Et presto encore. Si c’est pas malheureux tout de m^eme. J’ suis pourtant assez connu `a la Villette.
Et, se tournant vers le chiffonnier, qui buvait toujours, assis devant son tonneau, et ne pr^etait nulle attention `a la dispute commencante, Fandor qu^eta son approbation.
— Pas vrai, p`ere Machin-Chose ?
Malheureusement, Fandor jouait de malheur. Le chiffonnier dont il sollicitait le t'emoignage, 'etait connu de tous les habitu'es du bouge. On savait commun'ement son nom : D'etritus. On savait aussi que depuis plus de vingt ans il n’avait pas quitt'e le quartier. C’'etait un isol'e qui faisait au petit matin les bo^ites devant les restaurants et le chifftire juste assez pour trouver de quoi manger. Il ne pouvait pas conna^itre un gars de la Villette, on l’aurait su.
B'eb'e fut alors p'eremptoire :
— Eh bien, c’est moi, commenca-t-il, qui vais le r'ep'eter que t’es de l’arnac. Et si ca ne te pla^it pas, tu n’as qu’`a le dire. Sors voir ton lingue.
Que r'epondre ? Il lui 'etait impossible de
— Ferme ca ! commenca Fandor, j’en suis pas apr`es tes poux. Laisse les miens tranquilles.
Au moment m^eme o`u B'eb'e, avec un d'ehanchement caract'eristique, s’avancait vers lui, l’arme `a la main, la porte du caveau s’ouvrit avec une folle violence. Une voix apeur'ee se fit entendre :
— La paix, nom de Dieu ! Soufflez la camoufle [8], chahutez pas, ah bonsoir, j’ai plus de vingt mecs sur mes chausses. J’vas ^etre fait.
L’arrivant avait recommand'e le silence, une clameur lui r'epondit :
— C’est toi, Beaum^ome ?
— C’est moi.
L’apache venait de refermer la porte, il la verrouilla, s’avanca vers ses amis.
Beaum^ome qui, jadis, avait 'et'e condamn'e `a trente ans de hard labour en Angleterre, alors que Fant^omas 'etait emprisonn'e `a Londres sous le nom de guerre de Tom Bob, avait r'eussi `a s’enfuir et, naturellement, s’'etait empress'e de regagner Paris. Depuis lors, il vivait dans une crainte perp'etuelle. Il savait que la police anglaise, beaucoup mieux faite que la police francaise, le recherchait inlassablement. Il n’avait nulle envie de retourner faire l’'ecureuil sous les brumes de Londres.
Mais ce soir-l`a, pr'ecis'ement, Beaum^ome revenait d’un cambriolage tent'e avec l’assentiment des camarades.
— Allez, fermez, ordonnait le jeune apache, cependant que Fandor, profitant du tumulte caus'e par cette apparition, cherchait `a s’'eloigner, `a se dissimuler dans l’ombre. 'Ecoutez voir, les poteaux, c’est pas le moment de blaguer, figurez-vous que, juste au moment o`u je faisais sauter la porte de la taule, histoire d’arriver jusqu’aupr`es du tiroir-caisse, y a deux flics qui m’ont rappliqu'e dessus. L’affaire avait 'et'e donn'ee probablement et j’'etais fait d’avance. Ah, l`a l`a, et comment que je me suis tir'e des pattes ! Seulement, c’est pas fini ! Ah comment que je vais me tirer de l`a ? Je suis bien s^ur que les flics se sont embusqu'es `a la porte. Tout `a l’heure, ils vont me faire sortir et je serai frit.
— C’est probable, constata simplement B'eb'e, qui n’aimait pas beaucoup Beaum^ome.
La sinistre brute, cependant, qu’avait toujours 'et'e OEil-de-Boeuf, lui qui savait comme pas un noyer en douceur les chats et les chiens histoire de faire rire les camarades, 'eprouvait une certaine sympathie pour Beaum^ome. Et OEil-de-Boeuf voulait le sauver.
— Fermez-la tous ! cria-t-il pour obtenir le silence. Qui c’est qui a sp'ecialement crainte des flics, en ce moment ? Qui c’est qu’est recherch'e ?
Par hasard, il n’y avait personne. Tous les apaches qui se trouvaient r'eunis dans le bouge avaient `a coup s^ur bien des m'efaits sur la conscience, mais c’'etaient des m'efaits inconnus. Nul, sauf Beaum^ome, n’'etait
— Alors, constata OEil-de-Boeuf, mon pot’, faut pas te d'esesp'erer, on va encore ^etre l`a pour un coup, et te tirer d’affaire.
OEil-de-Boeuf grommela quelque chose `a l’oreille de B'eb'e et B'eb'e approuva :