Le mariage de Fant?mas (Свадьба Фантомаса)
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— Il n’y a pourtant personne, reprit Barnab'e. Son compagnon, hochant la t^ete, ajouta :
— J’ai cependant entendu du bruit.
Un instant, ils firent silence, regardant autour d’eux, mais il n’y avait personne et, dans le d'ep^ot mortuaire, seuls avec eux se trouvaient les cercueils.
Barnab'e haussa les 'epaules :
— S^ur, on est piqu'e tous les deux en ce moment. On a encore r^ev'e.
Le p`ere Teulard paraissait fort pr'eoccup'e.
— Quoi c’est qu’on va fiche ? demanda-t-il, avec cette bi`ere remplie de sable et ce collier disparu ? S^ur qu’il s’est d'ebin'e par l’'egout. Seulement, voil`a, ca va nous faire des emb^etements.
— Pourquoi ? demanda Barnab'e.
— Parbleu ! fit Teulard, il se trouvera toujours des salauds pour raconter que c’est nous autres qui avons fait le coup. Pense donc, un macchab'ee de moins, une bi`ere vide, ca va faire du scandale. Des histoires `a n’en plus finir. On va voir rappliquer la police, les curieux vont faire des enqu^etes.
Barnab'e se gratta le nez.
— Surtout, ajouta-t-il, qu’il s’agit d’une cliente de luxe. Le n° 7, la bi`ere au sable, c’est l`a-dedans qu’on avait mis quelqu’un de bien cons'equent, comme qui dirait la ni`ece de l’infant d’Espagne, d’apr`es ce que j’ai entendu dire.
Le p`ere Teulard, qui avait enfin retrouv'e ses lunettes au fond de sa poche, les assujettit sur son nez et parvint cette fois `a lire la fameuse lettre.
— Le sept, d'eclara-t-il, c’est une nomm'ee Merc'ed`es de Gandia. Oui, c’est bien quelque chose comme tu dis, une grande famille, je connais le caveau, il y a des 'ecussons sur la porte avec des esp`eces de couronnes.
— Ah, grogna Barnab'e, on est frais ! Si seulement c’'etait arriv'e avec un purotin, l’histoire passait inapercue, mais avec des gens de cette esp`ece-l`a on est s^ur d’avoir des emb^etements.
Le p`ere Teulard, les bras crois'es, la t^ete baiss'ee, r'efl'echissait :
— 'Ecoute, prof'era-t-il enfin, apr`es un long silence, 'ecoute, Barnab'e, je m’en vas te dire une bonne chose.
— Vas-y, p`ere Teulard.
— Eh bien, Barnab'e, voil`a. Moi, j’ai comme ca dans l’id'ee que s’il se trouve du sable dans cette bi`ere `a la place du cadavre, ce n’est pas par suite d’une erreur, mais bien parce que les clients l’ont voulu comme cela, les gens riches ca fait toujours ce que ca veut.
— Probable.
— Cons'equemment, poursuivit le p`ere Teulard, s’ils ont fourr'e du sacr'e sable dans le cercueil, c’est parce qu’ils veulent faire croire qu’il y a un mort `a la place, m’est avis que ces gens-l`a faut pas les contrarier. Si je n’'ecoutais que moi, je fermerais bien tranquillement le truc et je m’en irais tout `a l’heure sans rien dire le porter dans le caveau avec le commissaire des morts.
Le visage de Barnab'e s’illuminait, au fur et `a mesure que parlait son compagnon :
— Ca, p`ere Teulard, d'eclara-t-il, c’est une id'ee et m^eme une richement bonne id'ee.
Barnab'e se frotta les mains ; soudain, il regarda sa montre :
— Onze heures moins le quart ! s’'ecria-t-il, eh bien, nous n’avons qu’`a cavaler si nous voulons refermer le truc avant l’arriv'ee du commissaire.
Le p`ere Teulard et Barnab'e s’empress`erent alors de remettre le couvercle sur la bi`ere myst'erieuse qui contenait du sable. Ils se d'ep^echaient l’un et l’autre de replacer les vis ; au bout de quelques instants, le cercueil n° 7 avait repris son apparence normale.
— Ouf, fit Barnab'e une fois que la bi`ere eut repris son apparence normale, ca y est, maintenant le commissaire peut s’amener.
Le p`ere Teulard, toutefois, 'etait inquiet et au lieu de se tenir tranquille, il allait et venait dans le d'ep^ot mortuaire, incapable de rester immobile :
— Pourvu, murmura-t-il, qu’on ne s’apercoive de rien. Puis, il ajoutait :
— Quand nous mettrons la bo^ite `a dominos sur le brancard, faudra bien faire attention, l’un et l’autre, `a ne pas la faire d'egringoler, car, charg'ee `a moiti'e comme elle l’est de sable, c’est mauvais pour l’'equilibre. Vois-tu qu’elle se mette tout d’un coup `a se dresser sur le brancard ou le caveau comme tout `a l’heure ?
Cette id'ee fit rire les deux hommes, mais soudain, ils s’arr^et`erent. Ils avaient entendu du bruit `a l’ext'erieur, ^i.’air grave et obs'equieux, ils se pr'ecipit`erent vers la porte qui donnait directement sur le cimeti`ere.
Un personnage apparaissait, v^etu de noir, un parapluie `a la main.
— Le commissaire des morts, annonca Teulard.
Puis, le fossoyeur en chef, suivi de son aide, se rapprocha du fonctionnaire, se confondit en salutations devant ce haut personnage.
Celui-ci feuilletait une liasse de papiers :
— Nous avons, d'eclara-t-il d’une voix hautaine, un transfert `a op'erer ce matin. ^Etes-vous pr^ets ?
— Oui, monsieur le commissaire, d'eclara Teulard d’une voix tremblante, ne parvenant pas `a ma^itriser son 'emotion, malgr'e les coups de poing dont Barnab'e lui bourrait les c^otes.
— Il s’agit, poursuivait le fonctionnaire qui ne s’apercevait de rien, heureusement, de la bi`ere n° 7, destin'ee au caveau de la famille de Gandia.
— C’est bien cela, monsieur le commissaire, poursuivit Teulard.
— Eh bien, allons-y, dit le fonctionnaire qui, d’ailleurs, ne p'en'etrai* pas dans le d'ep^ot mortuaire et attendait que les deux fossoyeurs en fussent sortis avec un brancard sur lequel ils portaient le cercueil.
Le macabre cort`ege se mit alors en route, le commissaire des morts pr'ec'edant les porteurs, et tous trois, `a travers les all'ees exigu"es de la grande n'ecropole, se dirig`erent vers l’all'ee de l’Ouest, o`u se trouvait le caveau de la famille de Gandia.