Le mariage de Fant?mas (Свадьба Фантомаса)
Шрифт:
— Allons, parlerez-vous, reprenait Fant^omas, me direz-vous o`u est ma fille ?
Il y avait de la souffrance, il y avait de l’angoisse dans la voix de Fant^omas, mais Fandor tremblait lui aussi en lui r'epondant.
Ah, certes, il e^ut donn'e beaucoup alors pour pouvoir renseigner le bandit.
— Je ne sais pas, je ne sais pas ! hurla-t-il, comment voulez-vous que je vous dise o`u est H'el`ene ? j’'etais prisonnier dans le phare, c’est vous qui m’y avez fait jeter, je n’ai m^eme pas revu Juve. Par piti'e…
Mais Fant^omas ricanait toujours.
— En v'erit'e vous ne savez pas, J'er^ome Fandor ? Eh bien, je ne vous crois pas. Vous 'etiez prisonnier dans le phare de l’Adour, oui, sans doute, et `a ce moment vous pouviez ignorer o`u 'etait H'el`ene, mais depuis le naufrage, `a coup s^ur ma fille, ma fille qui vous aime, h'elas, a d^u vous donner de ses nouvelles. Vous savez o`u elle est, j’en jurerais, dites-le-moi ou par Dieu vous aurez demain la seconde oreille de Juve.
Fandor n’avait pas eu le temps de r'epondre, n’avait fait qu’un signe de d'en'egation, que d'ej`a Fant^omas avait referm'e la boule, s’'etait enfui, jetant comme adieu `a Fandor :
— R'efl'echissez bien.
Mais le bandit, le tortionnaire, celui qui venait de jeter l’oreille sanglante `a Fandor, se trompait s’il s’imaginait pouvoir par la terreur an'eantir toute vell'eit'e de r'esistance chez son prisonnier.
Si Fandor avait su vraiment o`u se trouvait H'el`ene, il l’aurait dit, mais Fandor l’ignorait et maintenant que, devant lui l’oreille coup'ee continuait `a saigner, il lui prenait une rage nouvelle.
— J’y laisserai ma peau, nom de Dieu ! jura Fandor, je me tuerai s’il le faut, mais je jouerai le tout pour le tout.
Fandor, alors comme un d'ement, commenca de s’agiter dans son 'etroite prison, il sauta de droite `a gauche, il se lanca avec violence contre les parois de la boule.
— Parbleu, pensait le journaliste, je ne d'efoncerai pas ma prison, c’est s^ur, mais je ferai bien craquer le pi'edestal qui la soutient. Si la boule tombe dans la rue, je me tue, si elle roule sur la toiture du music-hall, elle se brise, je me sauve et l’on vient `a mon secours.
Ce que tentait Fandor 'etait fou.
Comme il n’avait aucun point de rep`ere qui lui perm^it de savoir `a l’int'erieur de sa boule de quel c^ot'e se trouvait la rue, c’est-`a-dire la mort, et de quel c^ot'e se trouvait la toiture, c’est-`a-dire la vie, il ne pouvait m^eme pas essayer de diriger sa chute.
Fandor, pr`es d’une heure s’'epuisa en vains efforts.
Soudain, un craquement l’avertit que le d'enouement 'etait proche.
J'er^ome Fandor envoya une derni`ere pens'ee `a H'el`ene, puis ferma les yeux.
— Une… deux… trois, compta-t-il, c’est peut-^etre dans l’'eternit'e que je me lance.
Il donnait de tout son poids contre la paroi de la boule. Le craquement se fit plus intense, se prolongea. J'er^ome Fandor sentit que le sol se d'erobait sous ses pieds, la boule tombait.
— H'el`ene, murmura le journaliste.
Sa t^ete heurta contre les parois de sa prison lumineuse. En une seconde il souffrit mille morts.
8 – DEUX OREILLES COUP'EES
— Eh bien, monsieur Marquet ?
— Eh bien, monsieur Ramiel ?
— Eh bien, monsieur Marquet, que pensez-vous de cela ?
— Ce que j’en pense monsieur Ramiel, c’est parfaitement net et clair. Depuis le d'ebut de ma carri`ere, et cela nous reporte `a quinze ans, je n’ai jamais vu, dans un seul des commissariats de police o`u il m’est arriv'e de passer, une aventure aussi 'etrange, un client aussi extravagant.
— Quant `a moi, monsieur Marquet, voil`a un quart de si`ecle que je dirige des 'etablissements comme les Folies-Berg`ere ; certes, dans ma longue carri`ere il m’est arriv'e de voir toute sorte d’individus et de rencontrer les personnages les plus invraisemblables, mais jamais, au grand jamais, aventure de ce genre ne s’est produite dans un de mes music-halls.
Les deux personnages qui s’entretenaient ainsi, n’'etaient autres que M. Marquet, l’actif commissaire de police du faubourg Montmartre, et M. Ramiel, le directeur tr`es parisien des Folies-Berg`ere.
Il 'etait environ trois heures de l’apr`es-midi et les deux hommes se tenaient dans le bureau du commissariat. D’un air indiff'erent et distrait, ils regardaient par la fen^etre le passage mouvement'e des v'ehicules qui encombraient le faubourg, et cependant que M. Marquet, agit'e, nerveux, comme `a son ordinaire, tambourinait sur les carreaux de la fen^etre, M. Ramiel, m^achonnant son cigare, demeurait immobile, les mains derri`ere le dos. Enfin, apr`es un silence M. Marquet fit observer :
— Vous savez, mon cher monsieur Ramiel, que ma longue habitude des hommes me permet de me flatter d’avoir une certaine perspicacit'e et je suis convaincu que notre individu est un gaillard qui avait de mauvaises intentions, un cambrioleur, peut-^etre pire.
M. Ramiel haussa les 'epaules :
— Je ne suis pas de votre avis, mon vieux, rien qu’`a la facon dont cet homme s’est introduit dans mon 'etablissement, je croirai plut^ot que c’est un malheureux, un fou.
— Voulez-vous que nous allions le revoir ?
— Oui, r'epondit M. Marquet, il faut absolument tirer cette affaire au clair et il est indispensable qu’un interrogatoire s'erieux ait lieu avant que je ne fasse mon rapport et que vous ne contresigniez votre d'eclaration.
Quittant alors le cabinet du commissariat, Marquet et le directeur des Folies-Berg`ere se firent ouvrir par le brigadier une porte solidement verrouill'ee qui donnait dans un local sombre d'epourvu de meubles et de fen^etre.