Le pendu de Londres (Лондонская виселица)
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— Que portez-vous dans ce paquet ? demanda-t-il…
— Du linge… du vieux linge sale…
— D’o`u vient-il, ce linge ?
— De chez une de mes amies dont la copine est morte… elle habite tout `a c^ot'e…
Les r'eponses de Beaum^ome 'etaient si cat'egoriques, elles 'etaient faites sur un ton si naturel, que le sergent h'esitait `a poursuivre l’interrogatoire, `a emp^echer cet homme libre de continuer sa promenade. Apr`es tout, c’'etait son droit de transporter, m^eme `a cette heure tardive, des paquets de linge dans les rues de Londres.
Apr`es avoir un instant h'esit'e `a laisser partir ce personnage aux allures `a peine suspectes, le sergent s’y d'ecida :
— Passez votre chemin, fit-il…
Beaum^ome ne comptait pas se faire donner l’ordre deux fois. D'ej`a il se glissait entre la haie de g'eants aux uniformes sombres qui, soudain avaient fait le cercle autour de lui, et s’applaudissait de n’^etre pas plus longuement inqui'et'e, lorsqu’un homme se dressa devant lui, un civil.
Beaum^ome, `a sa vue, laissa tomber son paquet de linge.
Cet homme Beaum^ome venait de le reconna^itre. C’'etait Juve.
Juve qui le d'evisageait, Juve qui se placait en face de lui, Juve qui voulait l’emp^echer de passer…
Certes Beaum^ome n’avait rien `a faire avec le policier francais, il ne redoutait qu’indirectement son intervention. Il la redoutait n'eanmoins.
Sa conscience charg'ee de vols et de crimes 'etait perp'etuellement troubl'ee.
Que pouvait donc lui vouloir Juve ?
Beaum^ome ne tarda pas `a le savoir !
Le policier avait fait signe au sergent de police, et un rapide colloque s’engagea entre les deux hommes.
Juve insistait, tr`es nerveux :
— Monsieur le sergent, disait-il, je vous en prie, emparez-vous de cet individu, c’est un coupable, un criminel, il faut absolument l’arr^eter, l’interroger…
— Pardon, monsieur, r'epliquait le sergent, mais je ne vous connais pas, de quel droit intervenez-vous ?
Juve cherchait des r'ef'erences, mettait en avant des noms familiers au sergent, il parlait de Shepard, il nommait l’individu qu’il voulait faire appr'ehender.
— C’est un gaillard, dit-il, qui a commis un crime, il s’appelle Beaum^ome… Il a assassin'e le d'etective French…
Juve parlait avec tant d’assurance que le sergent parut un instant 'ebranl'e. Pr'ecis'ement `a ce moment Beaum^ome qui n’avait rien perdu de cette conversation, tr`es inqui'etante pour lui, essayait de repartir, abandonnant son linge, ne songeant qu’`a trouver le salut dans la fuite.
Escomptant son agilit'e, il s’'elanca… mais cette maladresse devait lui ^etre fatale.
Trois policemen, trois hercules, plus rapides que l’'eclair se jet`erent sur lui, l’immobilis`erent, toute r'esistance 'etait impossible.
Cette tentative d’'evasion succ'edant aux d'eclarations de Juve, avait convaincu le sergent.
— Ma foi, dit-il `a Juve, si cet individu se sauve c’est 'evidemment qu’il n’a pas la conscience tranquille… Toutefois, monsieur, je ne vois pas `a quel titre op'erer son arrestation ?… Vos imputations sont vagues… Il n’y a pas flagrant d'elit…
— Il n’y a pas flagrant d'elit, reprit-il, tout en consid'erant le paquet que Beaum^ome venait de laisser choir, ca n’est pas certain… Voyons, sergent, voulez-vous faire mener cet homme au poste, et l’y maintenir pendant deux heures ? si dans ce d'elai je viens vous apporter des pr'ecisions suffisantes, j’imagine que vous pourrez le garder d'efinitivement ?…
Le visage de Juve refl'etait une telle anxi'et'e, un tel d'esir de convaincre que le sergent h'esita.
Beaum^ome, cependant, temp^etait, jurait ses grands dieux qu’il 'etait innocent, qu’il n’avait rien `a se reprocher, qu’il ne comprenait pas ce qu’on lui voulait…
Mais le sergent de police n’eut cure de ses d'eclarations. En consid'erant Juve, en voyant de quel ton assur'e cet homme venait de lui parler, il 'etait pr^et de soupconner qu’`a coup s^ur, le policier ne parlait pas au hasard…
— Je le ferais bien, r'epondit-il enfin, ce que vous me proposez, monsieur… car cet homme m’appara^it, en effet, avoir des proc'ed'es 'equivoques… mais… je ne vous connais pas ? Vous demandez deux heures avant de m’apporter des pr'ecisions… vous allez donc faire une enqu^ete ?… Si j’accepte votre offre, je vous pr'eviens que je vais vous faire accompagner par un de mes hommes, car, si, d’aventure, vous vous moquiez de la police, il serait bon que vous en soyez puni et s'ev`erement.
Juve r'eprima un geste de nervosit'e.
Certes, il ne pr'etendait pas se moquer de la police, tout au contraire, mais il avait besoin d’^etre seul pour r'ealiser le projet qu’il m'editait.
D’autre part comment se d'ebarrasser du sergent et surtout du policeman qui allait s’attacher `a ses pas, sans 'eveiller les soupcons de ces hommes, sans les inciter `a croire qu’il n’'etait qu’un mauvais plaisant, et par suite les pousser `a rel^acher Beaum^ome ?
Juve, encore qu’il e^ut d'esir'e le cacher le plus possible, n’h'esita plus. Il se souvint qu’il 'etait lui aussi policeman et, aux yeux stup'efaits du sergent, il exhiba sa carte d’identit'e, les preuves indiscutables de l’emploi qu’il occupait.
— Vous ^etes des n^otres, s’'ecria le sergent, alors ca va bien, je vous donne rendez-vous dans deux heures au poste de police. On d'ecidera s’il y a lieu ou non de maintenir en 'etat d’arrestation l’individu que vous avez fait appr'ehender.
25 – LE TRIOMPHE DE JUVE
Deux heures.
Juve avait deux heures devant lui.
`A peine s’'etait-il 'ecart'e du petit groupe qui entra^inait Beaum^ome, que le policier sautait dans un taxi et se faisait conduire `a la prison.