La fille de Fant?mas (Дочь Фантомаса)
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— Et alors ?
— Alors, je r'eclame le privil`ege de ne pas vous r'epondre.
Le m'edecin qui s’'etait content'e de causer dans le jardin `a Fandor, le saisit soudain par le bras.
— Pas mal votre r'eponse. Vous m’intriguez mon ami. Voulez-vous venir dans une salle. Nous y serons plus tranquilles pour causer.
— Je ne demande que cela, docteur.
— C’est bien, venez.
Fandor suivit le directeur dans une sorte de petit parloir clair dont la porte-fen^etre ouvrait sur la cour o`u s’agitaient les fous.
— J’ai de la veine, songeait Fandor, j’esp`ere r'eussir `a le convaincre.
4 – EST-IL FOU ?
Fandor, la mine souriante, examina le petit local clair o`u, sans doute, allait se d'ecider son sort.
Peu de meubles dans ce parloir. Quelques chaises, un banc, et, comme dans toutes les pi`eces de l’asile, jet'ee dans un coin, une camisole de force.
Le directeur, qui pr'ec'edait le journaliste, s’assit `a califourchon sur l’une des chaises et, se tournant vers le jeune homme :
— D'ecid'ement, fit-il, vous ne voulez pas me r'epondre et me dire si vous avez l’intention de faire le m'echant ? Si oui ou non vous ^etes fou ?
— Non, monsieur le directeur, je ne veux pas vous r'epondre.
— Tr`es bien. Apr`es tout, vous ^etes libre. Mais, en ce cas, voulez-vous vous pr^eter `a un examen plus d'etaill'e ?
— Certes.
— Car, en somme, si je m’en tiens `a votre r'eponse… qui n’en est pas une… vous ne voulez pas me dire si vous ^etes fou, tout simplement pour me prouver que vous ne l’^etes pas ? Voyons. D'efinissez-moi tout simplement ce que c’est qu’un arbre ?
— Je crois, docteur, r'epondit-il, que vous allez me soumettre, en effet, `a un examen approfondi. Vous voulez savoir ce que c’est qu’un arbre, n’est-il pas vrai, pour v'erifier par une question aussi simple que je suis ma^itre de mes facult'es discursives ? Soit ! Je me pr^ete `a votre jeu. Un arbre est une plante, de taille relativement consid'erable, essentiellement caract'eris'ee par trois parties distinctes : le feuillage, le tronc et les racines. Je pourrais vous dire encore…
— Il suffit, votre r'eponse est tr`es nette et, de plus, vous avez devin'e le motif de ma question. Ah ca ! vous m’intriguez, mon ami. Ma foi, j’ai tout juste vu, ce matin, au rapport, une note de mes internes m’indiquant que vous aviez 'et'e admis ici, par mesure de police, alors que vous veniez de mettre le feu, ou du moins de prendre part `a l’incendie des Docks. Est-ce exact ? Niez-vous la chose ? Racontez-moi un peu votre histoire.
Cette fois, Fandor ne pouvait plus h'esiter.
— Docteur, commenca-t-il, avez-vous entendu parler de Fant^omas ?…
— Oui, bien s^ur.
— Docteur, connaissez-vous le nom de J'er^ome Fandor ?
— J'er^ome Fandor ? le reporter de La Capitale ?
— Lui-m^eme.
— Oui encore, mon ami, mais que voulez-vous me dire `a son sujet ?
— Docteur, je suis J'er^ome Fandor.
H'elas ! imm'ediatement, une expression d’incr'edulit'e se peignit sur le visage du m'edecin…
— Vous ^etes J'er^ome Fandor ? reprit-il Allons donc. Mais J'er^ome Fandor n’est pas au Natal, mon ami. Il n’y a pas un mois, je me rappelle qu’il publiait…
— Docteur, commenca Fandor, ne niez pas l’'evidence avant de savoir ce qu’est l’'evidence. Je vais vous prouver mon identit'e…
— Vous avez des papiers ?
Machinalement, le journaliste se fouilla. Mais, h'elas ! il r'efl'echissait que, sorti `a l’improviste de son extraordinaire cachette alors qu’elle prenait feu, il n’avait pas song'e `a prendre son portefeuille, demeur'e sur l’une des tablettes de sa cabine.
— Non ! avoua-t-il, je n’ai pas de papiers. Mais vous allez comprendre pourquoi. Docteur, je vous demande de vouloir bien me pr^eter toute votre attention.
— Je vous 'ecoute.
— Les choses dont je dois vous parler sont graves… et quelques-unes sont secr`etes. Il me faut prononcer des noms que je voudrais taire…
— Allez donc. Je vous promets la discr'etion.
— Bien ! Alors, docteur, je vous confie mon histoire. J’esp`ere qu’elle vous prouvera, sinon que je ne suis pas fou, puisque nier la folie devant vous serait une chose fort grave, du moins que je n’ai pas mis le feu aux Docks… Et que c’est par un terrible coup du sort que je suis ici votre prisonnier…
J'er^ome Fandor fit une petite pause, puis, sans que le directeur l’interromp^it, dans un calme parfait, choisissant `a dessein des expressions fort simples, il narra l’extraordinaire aventure que constituait son enl`evement par Fant^omas, `a Londres, son incarc'eration dans la caisse qui, d'ebarqu'ee du paquebot, avait 'et'e seulement bris'ee la veille, au cours de l’incendie.
— Docteur, concluait Fandor, voici donc exactement qui je suis. Vous comprenez maintenant pourquoi je suis ici ? Quant `a ce cr^ane que vous me voyez conserver pr'ecieusement, vous devinez, sans doute, quelle importance j’y attache… vous saisissez, bien que sa possession puisse justement me faire passer pour d'ement, quel int'er^et il y a pour moi `a ce que je ne sois pas oblig'e de m’en s'eparer… Docteur, vous ^etes le ma^itre de mon sort, le ma^itre de ma destin'ee. Je n’ignore pas que vous pouvez souverainement d'ecider de ce qu’il convient de faire de moi, qu’il vous est loisible, ou de me renvoyer en prison, ou de me garder ici comme d'ement, ou encore de me rendre `a la libert'e purement et simplement. Je vous supplie, docteur, de bien r'efl'echir. En vous racontant ce que je viens de vous avouer, je vous ai certainement fait comprendre la valeur qu’avait pour moi la libert'e en ce moment, plus encore que jamais.
Le docteur, tout le temps que le journaliste parlait, n’avait cess'e de surveiller le jeune homme, de le d'evisager avec, semblait-il, une surprise croissante…
— Ainsi, reprenait-il lentement, voici votre histoire : Vous ^etes J'er^ome Fandor ? le journaliste attach'e aux traces de Fant^omas ? Vous avez 'et'e enlev'e par ce bandit, enferm'e par lui dans une caisse ? Cette caisse a 'et'e d'ebarqu'ee dans les Docks et vous en ^etes sorti au cours de l’incendie ? C’est 'egalement au cours de cet incendie que vous avez d'ecouvert une t^ete de mort ? C’est bien cela, n’est-il pas vrai ?