La fille de Fant?mas (Дочь Фантомаса)
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On insistait d’ailleurs aupr`es de lui :
— Vous ferez bien, lui disait-on, de mettre cette petite fortune en s'ecurit'e. Jupiter livr'e `a lui-m^eme irait la jouer ou la boire.
— Soit, avait r'epondu Hans Elders.
Avec quelques intimes il avait pass'e dans son cabinet de travail, et d'epos'e provisoirement les billets de banque dans un tiroir ferm'e `a clef, avant d’aller les porter dans son coffre-fort.
Le jeune Teddy, toutefois, n’'etait pas rest'e longtemps en contemplation devant le n`egre, pour lequel il 'eprouvait cependant une sinc`ere et cordiale affection.
Teddy avait une pr'eoccupation 'evidemment plus s'erieuse. De ses yeux intelligents et fureteurs, il fouillait l’ombre des massifs et les all'ees touffues du parc.
Un couple s’y promenait, cherchant la solitude, semblait-il.
Teddy, amus'e, suivait des yeux ce man`ege.
— Oh ! oh ! pensa l’adolescent, voil`a un flirt qui, non seulement se dessine, mais s’affirme joliment. Winifred et le lieutenant Wilson Drag. Ma foi, ils me paraissent faire un joli couple. Mais jamais ce vieux bandit de Hans ne consentira…
Teddy eut un geste 'evasif cependant que son front se plissait. Il semblait qu’`a chaque fois que le nom de Hans Elders lui venait `a l’esprit, il 'eprouvait comme une douleur et qu’une col`ere sourde s’allumait dans son coeur.
Quels pouvaient bien ^etre les motifs qui d'eterminaient chez ce gentil garcon, aux mani`eres douces et 'el'egantes, une haine semblable pour un homme d’^age m^ur, et qui avait gagn'e l’estime et la consid'eration par son travail opini^atre ?
Le soir venait ; les invit'es du chercheur de diamants qui, jusqu’alors avaient err'e, soit dans les salons de la villa, soit dans le vaste parc de la propri'et'e, avaient regagn'e le jardin d’hiver pour y d'eguster la boisson traditionnelle… le th'e… Et c’'etait dans cette pi`ece une gaiet'e charmante, une r'eunion pleine d’entrain, d’o`u fusaient les rires les plus joyeux, o`u les hommes 'el'egants, distingu'es et aimables courtisaient avec tact les femmes les plus gracieuses et les plus d'elicatement par'ees.
Les conversations, toutefois, s’interrompirent `a l’arriv'ee d’un personnage tout couvert de poussi`ere, qui s’arr^eta interdit sur le seuil de la porte, surpris sans doute de se trouver en si belle compagnie.
Mais Hans Elders avait d'ej`a couru vers lui et l’attirait au milieu des invit'es, voulant de toute force le pr'esenter au gouverneur :
— Sir Houston, permettez-moi de vous faire conna^itre mon collaborateur et ami : M. Ribonard, un Francais qui s’occupe tr`es activement du placement de nos diamants.
— Ils doivent ^etre d’un placement facile ? dit le gouverneur, fac'etieux comme tous les gouverneurs qui viennent de prendre le th'e, auquel Ribonard r'epondit :
— Mon Dieu, monsieur, cela d'epend de la demande… les march'es sont tr`es variables, particuli`erement depuis ces derni`eres ann'ees, et le Br'esil nous fait une grosse concurrence, mais les affaires ne vont pas mal en ce moment… J’arrive de Pretoria o`u la Bourse est excellente…
Le courtier et le gouverneur caus`erent encore quelques instants cependant que les salons se vidaient peu `a peu.
Devant le perron de la maison s’alignaient les modes de transport les plus vari'es : cal`eches 'el'egantes, d’un autre ^age, attel'ees en poste et conduites par des Cafres mont'es `a califourchon. Il y avait aussi des automobiles de luxe qui tr'epidaient au milieu de l’escadron des chevaux de selle.
Teddy, plus renfrogn'e encore qu’au d'ebut de la journ'ee, s’esquiva parmi les derniers invit'es.
D'ecemment, il ne pouvait rester plus longtemps chez Hans Elders. Il semblait toutefois que le jeune homme aurait voulu ne pas quitter la villa du riche prospecteur de diamants.
Quels 'etaient donc les motifs qui pouvaient l’y retenir ? Quels qu’ils fussent, d’ailleurs, Teddy n’y ob'eissait pas. Sautant `a cheval, d’un seul bond, sans s’aider de l’'etrier que lui tenait un serviteur, il se mit en selle rapidement, et ne suivant pas les autres invit'es qui, pour la plupart, regagnaient la ville, 'el'egant cavalier, il s’'elanca `a travers la campagne, galopant dans la direction de la lisi`ere d’une grande for^et au bord de laquelle, `a six miles de chez Hans Elders, se trouvait la ferme pittoresque o`u il avait 'et'e 'elev'e.
***
La tristesse silencieuse, qui succ`ede `a une f^ete qui vient de s’achever, planait maintenant sur la villa de Hans Elders, que les familiers avaient baptis'ee tout naturellement
Dans le salon encore en d'esordre et que les tziganes venaient de quitter, Winifred, son p`ere et le n`egre Jupiter se trouvaient r'eunis.
On avait pris le th'e fort tard, c’est `a peine si le p`ere et la fille avaient d^in'e. L’un et l’autre fumaient distraitement des cigarettes en 'ecoutant le brave n`egre qui donnait libre cours `a sa joie :
— Miss Winie, disait l’excellent Jupiter, moi pas besoin d’argent. Si ton papa veut bien, moi donner tout pour toi marier avec qui tu voudras…
La jeune fille sourit, mais Hans Elders gourmanda le n`egre :
— Tu es plus na"if, Jupiter, que l’enfant qui vient de na^itre… Merci de tes bonnes intentions, mais Winie ne veut rien accepter… que diable… `a chacun ce qui lui appartient… et c’est bien le moins – puisque tu as gagn'e cet argent honn^etement, – que tu en profites… L’honn^etet'e, vois-tu, c’est toujours ma devise.
Sur ce, grande profession de foi, tendant `a d'emontrer que Hans Elders 'etait assur'ement le plus honn^ete homme que la terre e^ut jamais port'e.
Jupiter l’'ecouta un instant, mais incapable de commander `a sa pens'ee, le n`egre changeant soudain d’avis formait les projets les plus extravagants.
Il allait, disait-il, acqu'erir une province enti`ere, et chercher de l’or. Il en trouverait des montagnes. Il en ferait des bijoux, des ustensiles de m'enage, des couverts et de la vaisselle, des bracelets de toutes sortes… Jupiter se grisait de l’id'ee qu’un jour, peut-^etre, il serait par'e comme une ch^asse et v^etu d’or de la t^ete aux pieds.