La gu?pe rouge (Красная оса)
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Isolino haussa les 'epaules :
— Le travail, c’est de la blague ! On se fatigue toute une semaine, pourquoi ? Pour amasser une mis`ere que l’on d'epense le dimanche, encore lorsqu’elle n’est pas d'epens'ee d’avance. Non jamais. Ca ne vaut pas la peine. Mais que fais-tu donc ?
Nadia s’'etait lev'ee, attir'ee du c^ot'e de la fen^etre par un bruit insolite.
Elle se pencha, regarda quelques instants, puis elle revint vers son amant :
— Il y a une quantit'e de gens dans la cour. Je me demande ce qu’ils veulent.
Isolino ne se d'erangea pas.
— T’occupe pas des affaires des autres.
Mais, au moment o`u il faisait cette recommandation, l’Italien s’inqui'eta `a son tour. Il avait entendu marcher dans le couloir au fond duquel se trouvait l’entr'ee de son logis, et, au m^eme instant, un coup sec 'etait frapp'e `a la porte.
— Qui va l`a ?
— Ouvrez !
Isolino et Nadia se regard`erent.
— Mon Dieu, commenca la Circassienne, pourvu que…
Une pouss'ee brusque, donn'ee contre la porte, avait fait sauter la serrure et, dans la pi`ece, trois hommes s’introduisaient. L’un d’eux braquait un revolver sur Mario Isolino, un autre, d’un geste rapide, s’'elancait sur Nadia qu’il maintint solidement. Le troisi`eme prit la parole et interrogea :
— Vous ^etes bien l’Italien Mario Isolino ?
— Oui, signor.
— Bien, moi, je suis l’inspecteur de la S^uret'e Michel, et je vous mets en 'etat d’arrestation.
Michel passa les menottes `a Mario Isolino, puis il dit `a l’homme qui 'etait entr'e le premier, le revolver au poing :
— Boucle aussi la femme, et en route pour le poste.
Le premier mouvement de stupeur pass'e, Mario Isolino se ressaisit et avec beaucoup d’aplomb essaya de protester :
— Mais c’est oune infamie, cria-t-il, ou alors oune erreur judiciaire ? Vous vous trompez, messieurs, io suis innocent, absolument innocent ! Vous avez viol'e mon domicile, c’est indigne et io refuse de vous ob'eir !
Michel, brutalement, le poussa vers la sortie.
— Allons, allons, pas de rousp'etance, ordonna-t-il, ou sans cela nous allons te passer `a tabac.
Cette menace produisit son effet. Mario Isolino se tut subitement et se laissa entra^iner.
On descendit rapidement l’escalier. L’Italien fut stup'efait en voyant que la cour de l’immeuble 'etait pleine de monde et que, en outre, aux fen^etres, beaucoup de gens apparaissaient.
« M^atin, pensa-t-il non sans un certain orgueil, faut-il qu’ils aient eu peur de moi pour avoir mobilis'e toutes ces forces de police ! »
Il n’'etait pourtant pas bien terrifiant `a voir, l’infortun'e Mario Isolino. Il avait beau essayer de faire le matamore, il courbait la t^ete, surtout il baissait les yeux.
Nadia, elle, 'etait effondr'ee. Elle balbutia des paroles incompr'ehensibles, cependant que des fen^etres voisines, les femmes qui avaient assist'e `a l’arrestation l’insultaient de tout leur vocabulaire imag'e.
— Excellent d'ebarras, criait-on, que ces mangeurs de macaroni qui ne sont bons qu’`a faire de mauvais coups.
On les entra^ina jusqu’au poste de police. On fit entrer Mario dans le cabinet du commissaire. Il y 'etait depuis quelques instants gard'e `a vue par deux inspecteurs, lorsqu’un homme entra dans la pi`ece.
En l’apercevant Mario Isolino tressaillit. R'esolu toutefois `a dissimuler ses craintes, il s’'ecria de son ton le plus aimable :
— Ah par exemple, monsieur Juve ! Io suis bien content de vous voir. J’esp`ere que vous allez me tirer d’affaire ?
Juve fronca les sourcils :
— Nous verrons, dit-il, mais en attendant tu vas te mettre `a table ! Mario Isolino, il s’agit de manger le morceau et de me raconter tout ce qui s’est pass'e. Voyons d’abord, raconte-moi en d'etails ton agression manqu'ee de Ville-d’Avray.
Les paroles de Juve plong`erent Isolino dans un trouble extr^eme. Il se sentit d'ecouvert, perdu et il n’h'esita pas longtemps. Apr`es tout, puisqu’il 'etait pris, autant dire la v'erit'e. D’ailleurs il ne risquait pas grand-chose puisque en somme son attentat n’avait pas r'eussi.
Mario Isolino avoua, mais il n’oublia pas de dire `a Juve les circonstances aussi fortuites que myst'erieuses qui avaient fait qu’au moment o`u il allait d'epouiller le b^atonnier de son portefeuille, une femme avait surgi, lui jetant du poivre dans les yeux.
Juve f'elicita Mario Isolino de sa franchise, et continua sur un ton plus doux :
— Maintenant, mon petit, il faut me raconter en d'etails l’histoire du tableau de Bagatelle.
Isolino ouvrit des yeux absolument stup'efaits :
— Io ne sais pas ce que vous voulez dire, commenca-t-il.
Juve s’attendait `a cette r'eponse. Il ne s’'enerva point, mais pr'ecisa `a son interlocuteur les d'etails du vol dont il le soupconnait.
Mario Isolino, qui avait si spontan'ement avou'e l’agression de Ville-d’Avray, protesta alors avec la plus grande 'energie contre l’accusation dont il 'etait l’objet.
— Sur la Madone ! hurla-t-il. Io vous jure, monsieur Juve, que z’ignore tout de cette histoire, et que io ne sais rien du vol de ce tableau !
La conversation se prolongea pendant une heure encore. Juve n’'etait pas plus avanc'e, il avait toutefois acquis la quasi-certitude que, comme l’affirmait Mario Isolino, l’Italien n’'etait pour rien dans la disparition du Rembrandt d’Henri Faramont.
***
Fandor, qui cependant 'etait venu `a Montmartre avec Juve, ne l’avait pas suivi jusqu’au poste.
Fandor avait perdu les traces de son ami alors qu’il se m^elait `a la foule amass'ee rue Girardon, devant l’immeuble dans lequel on avait arr^et'e Mario Isolino et sa ma^itresse.