Le pendu de Londres (Лондонская виселица)
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— Fant^omas… Nini Guinon, ouvrez…
Elle ouvrit.
Fant^omas se pr'esenta `a elle, mais Fant^omas comme elle ne l’avait jamais vu encore. Le Fant^omas de la l'egende qui, d'esormais, devenait pour elle celui de la r'ealit'e.
Manteau noir. Chapeau noir. Les traits dissimul'es sous une cagoule, noire aussi. Il referma la porte derri`ere lui.
— Sotte, dit-il, avouer que Jack est mort, est-ce une chose `a faire ? Le dire `a Duncan que tu tiens uniquement parce qu’il se croit des devoirs de p`ere envers cet enfant, c’est stupide. Heureusement que j’'etais l`a. Jack est mort, vive Jack ! Tiens, prends-le.
Fant^omas d'eroula des linges, et de ces linges 'emergea un joli bambin rose, robuste, bien b^ati qui, innocemment sourit `a la jeune femme, la consid'erant de ses grands yeux interrogateurs.
Nini Guinon 'etait m`ere, apr`es tout.
Les larmes lui mont`erent aux yeux : elle songea soudain en voyant ce petit enfant, si joli, si vivant, si plein de sant'e, qu’`a quelques pas de l`a, dans la pi`ece voisine, dissimul'e sous les couvertures du berceau, gisait le petit cadavre…
— Nini, ordonna Fant^omas, `a partir de ce soir ce gamin-l`a qui s’appelait jusqu’`a pr'esent Daniel s’appelle Jack et c’est ton fils. Mercredi prochain tu montreras `a lord Duncan l’^etre qui est n'e de tes entrailles… Tu lui feras voir Daniel, je veux dire Jack… car d'esormais il n’est plus de Daniel au monde ! Entends-tu ? est-ce compris ?…
— C’est compris, dit-elle, mais je me demande…
— Ne te demande rien, sotte, et ob'eis. Voil`a ton fils… ne retiens que cela. Songe que sans moi tu 'etais perdue… Gr^ace `a moi, tu es sauv'ee… ou est l’autre ?…
— L’autre ?
Mais Fant^omas insistait :
— L’autre te dis-je ?…
Nini Guinon, avec des gestes d’automate, passa dans la pi`ece voisine.
Elle d'ecouvrit le berceau.
Sans d'elicatesse, mais sans brusquerie, Fant^omas, avec l’allure d’un homme d'ecid'e s’empara du cadavre, l’enveloppa dans les m^emes linges qui lui avaient servi `a apporter quelques instants auparavant le petit Daniel…
— Eh bien, quoi ? interrogeait-il, qu’attends-tu ?
Nini Guinon allait formuler quelques explications. Lorsqu’elle s’arr^eta de parler, Fant^omas lui-m^eme 'ecoutait.
De la premi`ere pi`ece du logement s’'elevait un vagissement. C’'etait le petit Daniel que l’on avait laiss'e seul dans la pi`ece et qui pleurait :
— Maman !
Fant^omas, de la main qui lui restait libre, empoigna Nini Guinon par la nuque, qui demeurait immobile, presque prostr'ee au pied du berceau vide :
— Eh bien, grogna-t-il, qu’attends-tu donc ?
Il ajouta avec un ricanement sardonique :
— Tu n’entends donc pas qu’il t’appelle ?… Nini Guinon, va t’occuper de ton fils… de ton fils Jack.
La jeune femme, affol'ee, revenait `a peine de sa surprise, de son 'emotion qu’elle entendait claquer la porte…
Fant^omas avait disparu. Avec lui s’en allait pour toujours le cadavre du petit Jack.
— Maman… criait le petit Daniel.
3 – L’OTAGE
— Bigre ! cela fait du bien de s’asseoir !…
J'er^ome Fandor alluma sa lampe qu’il posa sur la table, puis se jeta sur son lit.
J'er^ome Fandor paraissait accabl'e de fatigue…
— Passer une nuit, ce n’est rien, monologuait-il, mais la passer dans les conditions o`u je viens de passer la derni`ere, en d'ecouvrant des choses ahurissantes, en conduisant des enqu^etes invraisemblables, cela m'erite du repos… je suis rompu… D’ailleurs la journ'ee que je viens de vivre y est bien aussi pour quelque chose… j’ai couru, trott'e, enqu^et'e de tous les c^ot'es… Vrai ! j’ai bien le droit d’^etre un peu tranquille…
Le journaliste n’acheva pas sa phrase : il bondit de son lit et se mit `a se promener `a grands pas dans sa chambre…
— Quelle t^ete va faire Juve, pensa le jeune journaliste, quand il va recevoir mon t'el'egramme. Pas explicite du tout mon t'el'egramme !… Je lui dis seulement que j’ai retrouv'e Fant^omas, cela en r'eponse `a sa propre d'ep^eche m’avertissant qu’il sait o`u est lady Beltham… Il y a de quoi l’estomaquer…
Ah ! Juve, certes, serait surpris, au recu de la d'ep^eche que lui envoyait Fandor…
— Il va venir me rejoindre `a Londres, songeait encore le journaliste… C’est notre bonne vie de luttes et de dangers qui reprend, c’est la guerre qui recommence apr`es une longue tr^eve… Mais ce n’est pas tout ca, au travail. J’ai promis `a Juve de lui envoyer des explications.
J'er^ome Fandor qui, tout `a l’heure, parlait de se reposer retrouvait son activit'e coutumi`ere. Il s’assit devant son bureau, tira de son sous-main une large feuille de papier `a lettre, et de son 'ecriture bizarre, ind'echiffrable presque, commenca la lettre suivante :
Mon bon Juve,
Vous avez d^u sauter de joie en recevant ma d'ep^eche, mais, tel que je vous connais, apr`es un instant de r'eflexion, vous avez d^u, aussi, douter de mes affirmations, douter de la v'erit'e, ne pas croire que j’avais r'eellement rencontr'e Fant^omas. Je ne vais pas m’amuser `a vous faire languir. Je ne vais pas accumuler des phrases pour exciter votre curiosit'e. D’abord je tombe de sommeil, et puis j’ai piti'e de vous. Voici donc les faits dans toute leur 'eloquence…