L'assassin de lady Beltham (Убийца леди Бельтам)
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`A ce nom, ce nom qu’elle attendait, Sarah qui s’'etait assise, se releva brusquement.
Sa nature imp'etueuse se donna libre cours :
— Qui donc ^etes-vous, mademoiselle, pour vous permettre une pareille question ? demanda Sarah ^aprement. Ceci ne regarde que moi, je suppose, et, tout au plus, le jeune homme que vous venez de nommer.
Sarah parlait avec emportement. Sa visiteuse lui r'epondit avec une douceur extr^eme :
— Mademoiselle, je vous en supplie, 'ecoutez-moi avec calme et croyez bien que je ne suis pas votre ennemie. Je ne suis d’ailleurs qu’une commissionnaire, c’est une mission que je remplis aupr`es de vous et…
— Abr'egeons ! Quelle commission ?
— Mademoiselle, insista la jeune fille, je ne vous la ferai que lorsque vous m’aurez r'epondu : aimez-vous sinc`erement l’acteur Dick ?
Cette insistance 'etait si surprenante que Sarah oublia l’incorrection de la demande.
— Peut-^etre, r'epondit-elle.
Mais tout le vague de la r'eponse 'etait d'ementi par la facon vibrante et presque combative dont Sarah articulait ces paroles.
L’'etrange jeune fille eut un faible sourire.
— Alors, mademoiselle, dit-elle en joignant les mains, je vous supplie de ne pas partir ce soir, de ne pas partir en Am'erique, d’attendre…
Elle n’avait pas achev'e que Sarah, fr'emissante, se dressait, les yeux menacants, les gestes saccad'es :
— Sortez, mademoiselle ! ordonnait l’Am'ericaine. Sortez si vous ne voulez pas que j’appelle !
— Mais mademoiselle…
Il 'etait impossible de calmer Sarah. Elle avait de ces col`eres subites, folles, que rien de pouvait apaiser.
— Sortez ! r'ep'etait-elle. Oh parbleu ! Je devine qui vous ^etes. Sans doute c’est la ma^itresse de Dick qui me parle.
Dick, la veille, avait fait germer la jalousie dans le coeur de Sarah et la suite des 'ev'enements faisait que c’'etait l’innocente visiteuse qui devait supporter le contrecoup de ce sentiment nouveau, mais d'ej`a vivace, dans le coeur de Sarah.
L’Am'ericaine, en effet, n’h'esitait plus.
Qui pouvait ^etre cette jeune fille, venant la voir au nom de Dick et la suppliant de retarder son d'epart, si ce n’'etait la ma^itresse de Dick, la rivale pour qui Dick voulait rester en France ?
Tout s’expliquait.
C’'etait pour avoir le temps de rompre une vieille liaison que Dick avait pri'e Sarah de reculer son d'epart, et c’'etait pour essayer de reprendre Dick que la ma^itresse de l’acteur venait, elle aussi, supplier Sarah d’attendre quelque temps.
Et, en m^eme temps que la col`ere, une joie folle s’emparait de l’^ame de Sarah.
Si la ma^itresse de Dick, en effet, venait demander `a Sarah de ne point partir, c’'etait 'evidemment que l’acteur avait d'ecid'e, lui, d’accompagner Sarah. Naturellement l’Am'ericaine 'etait impitoyable.
— Vous ^etes la ma^itresse de Dick, r'ep'etait-elle, et je trouve, mademoiselle…
Mais la visiteuse l’interrompit d’un geste :
— Vous vous trompez, mademoiselle, affirmait la jeune fille avec un calme parfait, je ne suis point la ma^itresse de Dick et m^eme je ne connais Dick que depuis quelques heures.
Elle parlait d’un ton si convaincu, avec une sinc'erit'e si 'evidente que Sarah se prenait `a douter.
— Vraiment ? demandait-elle narquoise, vous connaissez `a peine Dick et cependant vous vous m^elez de ses affaires de coeur !
Or, la r'eponse que s’attirait Sarah stup'efiait l’Am'ericaine :
— Mademoiselle, disait la jeune fille simplement, je ne me m^ele point, comme vous le dites, des affaires de coeur d’un inconnu, je viens simplement m’efforcer d’emp^echer d’irr'eparables malheurs. Vous le pouvez si vous ne partez pas.
— Enfin, demandait-elle, qui ^etes-vous donc, mademoiselle ? Je ne comprends rien, absolument rien, `a votre attitude, et je vous avoue que votre personnalit'e m’intrigue. Dois-je ignorer votre nom ?
— Il vous apprendra peu de chose, mademoiselle.
— Vous tenez `a le cacher ?
— Je n’ai rien `a cacher, mademoiselle, mais je ne me nommerai point.
Un 'eclair brillait dans les yeux de la visiteuse qui, jusqu’alors, avait cependant r'epondu avec une douceur extr^eme :
— Mademoiselle, il ne faut pas que vous partiez. Je vous supplie de ne point partir, au besoin je vous l’ordonne.
— Vous me donnez des ordres ?
— Oui ! Car je suis oblig'ee de le faire.
— Mais qui ^etes-vous ?
H'el`ene, la douce H'el`ene, car c’'etait la fille de Fant^omas qui se trouvait en face de Sarah, remplissait aupr`es de celle-ci une commission dont elle avait 'et'e myst'erieusement charg'ee par l’acteur Dick. H'el`ene ne r'epondit pas `a la question, mais toisa Sarah.
Et comme l’Am'ericaine, l'eg`erement boulevers'ee par l’attitude de la jeune fille, se taisait, la fille de Fant^omas poursuivit :
— Je ne puis rien vous expliquer, mademoiselle, par le fait que j’ignore beaucoup de choses. Toutefois, il y a quelque chose que je sais : votre d'epart, je vous le r'ep`ete, causerait d’horribles malheurs. Vous aimez Dick, Dick vous aime, c’est au nom de cet amour qu’encore une fois je vous prie…
Mais Sarah s’'etait ressaisie :
— Il suffit, mademoiselle ! d'eclara l’Am'ericaine, glaciale. Vous m’en avez assez dit, trop peut-^etre. Je veux croire que vous ne vous rendez point compte du grotesque de votre d'emarche. Je ne veux point discuter. Peu m’importe. Il n’y a qu’une chose que je sais, c’est que je partirai demain, et que je partirai en compagnie de Dick.
Jalouse en cet instant, furieusement jalouse, car elle ne doutait point qu’une intrigue amoureuse f^ut la cause de l’'etrange visite qu’elle recevait, Sarah paraissait fermement d'ecid'ee.