L'assassin de lady Beltham (Убийца леди Бельтам)
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Or, entendant l’arr^et qu’elle venait de prononcer, H'el`ene avait chang'e d’attitude.
Ses yeux flamboy`erent, un flot de sang empourprait ses joues.
— Non, mademoiselle, cria la fille de Fant^omas, vous ne partirez pas !
— Et pourquoi donc ?
Dress'ee devant H'el`ene, Sarah, fr'emissante, attendait :
— Parce que je vous en emp^echerai.
— Par la force ?
— Oui, s’il le faut !
H'elas, au moment m^eme o`u H'el`ene osait ainsi menacer l’Am'ericaine, Sarah, 'eperdue, affol'ee de peur, bondissait en arri`ere et, fi'evreusement, toucha la sonnette d’alarme install'ee, comme dans tous les h^otels modernes, au centre de sa chambre.
— Que faites-vous ? demanda H'el`ene.
— J’appelle au secours, railla Sarah qui, de plus, sous un coussin de son divan, avait pris un mignon revolver et le braquait sur la fille de Fant^omas. J’appelle au secours, mademoiselle, et l’on verra bien…
— Vous ^etes folle ! riposta H'el`ene.
Mais les instants pressaient.
Au carillon de la sonnette d’alarme, une sonnette stridente, prolong'ee, qui s’entendit du haut en bas de l’h^otel, toute la domesticit'e s’empressait.
Des cris retentissaient partout.
— C’est le signal d’alarme !
— Courez vite au premier !
— C’est `a l’'etage du second !
H'el`ene se rendit compte qu’elle 'etait perdue.
Quel myst'erieux atavisme cependant la rendait si froide, si tranquille, alors que le danger l’environnait de toutes parts, alors qu’elle risquait une arrestation, d’autant plus p'erilleuse qu’elle aurait 'et'e bien embarrass'ee pour expliquer au juste les motifs de sa pr'esence dans la chambre de Sarah ?
C’'etait bien la fille de Fant^omas qui 'etait en face de l’Am'ericaine. H'el`ene ne se pressait pas, elle dardait sur Sarah un regard m'eprisant et volontaire.
— Vous ne partirez pas, articula H'el`ene, et nous nous reverrons, Sarah Gordon.
Puis, ces 'enigmatiques paroles prononc'ees, la jeune fille ouvrait la porte de la chambre qu’elle refermait derri`ere elle, bondissait dans la galerie. D'ej`a on accourait.
— Quoi ? Qu’est-ce qu’il y a ?
H'el`ene s’'eloigna d’un pas calme.
— On appelle ? demandait-elle.
Elle feignait d’^etre une visiteuse de l’h^otel.
Pourtant comme personne ne la connaissait, comme, en longeant le couloir elle allait arriver sur le palier, vivement 'eclair'e et o`u immanquablement on allait la d'evisager, H'el`ene se troubla.
Qu’un seul des serviteurs accouru lui demand^at qui elle 'etait, que Sarah, remise de son trouble, sort^it de sa chambre et la d'esign^at, c’en 'etait fait d’elle.
`A ce moment pr'ecis, et alors que la sonnette d’alarme continuait `a tinter 'eperdument, un ma^itre d’h^otel, accouru du fond de la galerie, prit H'el`ene par le bras.
— Vite, mademoiselle, dit-il, prenez l’ascenseur ! Vous n’entendez donc pas le signal d’alarme ? Il y a danger `a rester ici.
H'el`ene n’eut pas le temps de r'efl'echir.
Elle 'etait bouscul'ee par le ma^itre d’h^otel, pouss'ee dans l’ascenseur qui descendait.
Et c’est comme une vision de r^eve qui bouleversait la fille de Fant^omas.
Alors qu’elle entrait dans l’appareil, elle s’'etait retourn'ee, elle avait un instant apercu le visage du ma^itre d’h^otel assurant sa fuite, et dans ce visage, ce visage aux traits 'energiques, ce visage qui semblait sourire d’un sourire retenu, H'el`ene croyait avoir reconnu les traits de son p`ere.
— Fant^omas, Fant^omas, murmura la jeune fille. Ah, pourquoi Fant^omas est-il au Lac Palace ?
L’ascenseur cependant, descendait toujours.
Debout dans l’appareil, la jeune fille se demandait si elle allait pouvoir sortir sans encombre du grand h^otel.
Et elle avait la surprise encore de voir que, du premier 'etage, un homme se pr'ecipitait, montant `a toute allure. Et cet homme, oh parbleu, la fille de Fant^omas le reconnaissait `a la minute.
Il pouvait bien porter des habits 'etrangers, il pouvait bien tenir un sac de voyage sous son bras, il pouvait bien feindre d’^etre un voyageur ahuri par le d'esordre, son visage 'etait trop familier `a H'el`ene pour qu’elle ne le reconn^ut point.
— Juve, se dit la fille de Fant^omas. C’est Juve ! Il est ici et mon p`ere y est aussi. Ah, j’ai peur, j’ai peur !
***
— Nalorgne ?
— Quoi P'erouzin ?
— Combien de fois nous sommes-nous arr^et'es depuis Paris ?
— Dix-huit fois, seulement.
— C’est bien ce que je pensais. La machine commence `a ^etre au point.
Quelques minutes avant la sc`ene tragique qui devait 'eclater dans la chambre de Sarah, une automobile de course, marchant `a toute petite allure, mais d'egageant une 'epaisse fum'ee et produisant un tapage infernal, s’'etait arr^et'ee `a quelque distance du Lac Palace.
Cette automobile 'etait celle de la S^uret'e et les deux hommes qui en descendaient, noirs de cambouis et poussi'ereux, ayant l’air de revenir du bout du monde, n’'etaient autres que Nalorgne et P'erouzin, tous deux radieux `a la pens'ee qu’ils avaient 'et'e avec leur voiture de Paris `a Enghien en un peu moins de trois heures et quart.
Que venaient faire Nalorgne et P'erouzin `a Enghien ?
Les deux agents auraient 'et'e assez en peine de le dire.
Ils avaient tout simplement recu une note de service qui leur enjoignait l’ordre d’aller stationner dans la journ'ee, aux environs du Lac Palace pour s’y mettre `a la disposition du policier Juve qui aurait peut-^etre une certaine dame `a ramener `a Paris en qualit'e de prisonni`ere.
Nalorgne et P'erouzin 'etaient naturellement partis tr`es tard de Paris, car ils avaient longuement pein'e avant de pouvoir mettre en marche leur voiture. Fid`eles `a la consigne, cependant, ils arrivaient `a Enghien et ils stationnaient l`a o`u ils devaient ^etre `a onze heures du soir au lieu de trois heures de l’apr`es-midi.
— Nalorgne, disait P'erouzin, je crois que d’ici quelque temps cette voiture ira tr`es vite.
— C’est bien possible, r'epondait P'erouzin, elle va d'ej`a beaucoup mieux qu’avant, puisqu’elle marche.