L'?vad?e de Saint-Lazare (Побег из Сен-Лазар)
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Le Bedeau grommela :
— Cavalons. Direction Grenelle.
Et, sans se pr'eoccuper de la pierreuse, il partit en avant.
Fleur-de-Rogue le rattrapa :
— Qu’est-ce qui se passe ? interrogea-t-elle, tout en courant comme lui.
— Ca va mal, d'ebinons.
Puis il ajouta :
— Tiens, je suis crev'e, prends ce truc-l`a.
La pierreuse recut le coffret, une sorte de bo^ite m'etallique dont l’acier se refl'etait `a la lune.
— Cache ca dans ton tablier.
Les deux amants s’'etaient arr^et'es un instant. Instinctivement ils regard`erent derri`ere eux, puis, poussant un cri de rage, ils repartirent `a toute allure, ils venaient de s’apercevoir qu’on s’acharnait `a les poursuivre et Fleur-de-Rogue murmura :
— C’est la grosse vieille femme de tout `a l’heure, je suis s^ure que c’est une mouche. Le Bedeau, cavalons !
De toutes leurs forces les deux amants coururent encore, gagn`erent le pont de Grenelle, le franchirent de toute la vitesse de leurs jambes, puis suivirent les berges sombres et myst'erieuses de la Seine.
En r'ealit'e, une aussi longue fuite 'etait inutile, car la grosse vieille femme qui les intriguait tant ne s’'etait pas donn'e la peine de leur courir apr`es.
Au bout de quelques m`etres, elle avait rebrouss'e chemin. Au surplus de nouveaux coups de feu avaient retenti, provenant de l’int'erieur du parc du couvent de l’Assomption.
Comme elle revenait sur ses pas, la grosse vieille femme voyait par l’anfractuosit'e, qu’un 'eboulement r'ecent avait faite dans le mur, quelqu’un en train de s’enfuir. C’'etait une femme qui portait 'egalement un paquet, mais, semblait-il, avec d’extr^emes pr'ecautions. Le paquet 'etait lourd. La femme ne courut pas longtemps. Elle s’en alla dans la direction oppos'ee `a celle prise par le Bedeau et sa ma^itresse. Elle remonta vers la rue Mozart.
Avant d’y arriver, elle 'etait rejointe par la grosse femme qui, d'ecid'ement, courait avec une agilit'e que l’on n’aurait gu`ere soupconn'ee chez une personne aussi alourdie par l’^age.
La fuyarde et sa poursuivante se rejoignirent au coin de la rue Pajoux, rue d'eserte, silencieuse qui pr'ec`ede la rue Mozart.
La vieille, avec un geste d’autorit'e laissa tomber une lourde main sur l’'epaule de la femme qui se sauvait.
Celle-ci se retourna en poussant un cri, mais demeura stup'efaite de s’entendre appeler par son nom :
— H'el`ene, avait dit d’un ton de parfaite surprise et d’une voix 'etrangement masculine la myst'erieuse grosse femme.
C’'etait H'el`ene, en effet, qui se trouvait l`a. H'el`ene seule ? non. La jeune fille, en effet, portait le petit Jacques.
H'el`ene, apr`es ^etre rest'ee interdite un instant, reconnaissait son interlocutrice :
— Ah c`a, fit-elle, mais c’est l’'epileptique de Saint-Lazare ?
La vieille hocha la t^ete, sourit 'enigmatiquement. H'el`ene tressaillit, murmura :
— De la police, hein ?
— Peut-^etre, fit la vieille.
La jeune fille p^alit. 'Etait-elle reprise ? Lui allait-il falloir r'eint'egrer de nouveau l’affreuse prison dans laquelle elle avait pass'e de si longues semaines et dont elle s’'etait 'echapp'ee si miraculeusement ?
— Laissez-moi partir, laissez-moi libre.
— `A une condition : dites-moi, H'el`ene, ce qu’est devenu Fandor ?
La fille de Fant^omas sursauta :
Par exemple. Elle allait de surprises en surprises et, assur'ement, la grosse vieille femme qui lui posait une telle question ne devait pas ^etre une polici`ere ordinaire.
H'el`ene s’efforcait de la reconna^itre.
— O`u est Fandor ? r'ep'eta la vieille.
— Mais il est parti, il s’est sauv'e avec nous de la prison dans laquelle nous 'etions enferm'es, de cet abominable couvent. Il est parti avec Blanche, comme nous l’avions d'ecid'e. Avant les coups de feu, avant la bataille, ils sont partis tous les deux dans la direction oppos'ee `a celle que j’ai prise.
La grosse femme hocha la t^ete, r'epliqua nettement :
— Non. Ceux qui ont descendu la rue de l’Assomption, tandis que vous la remontiez, H'el`ene, ce ne sont ni Blanche Perrier, ni Fandor mais bien le Bedeau et sa ma^itresse Fleur-de-Rogue.
— Mais comment savez-vous cela ?
— Parce que je les ai reconnus.
— Mais qui ^etes-vous ?
— Peu importe.
— Si Blanche et Fandor ne sont pas sortis c’est qu’ils sont rest'es dans le parc, sous les arbres, peut-^etre sont-ils tomb'es victimes de ceux qui tiraient ?
— 'Etaient-ils donc avec vous ?
— Je viens de vous le dire, r'ep'eta H'el`ene. Nous 'etions en train de nous sauver tous les trois. J’avais l’enfant que Fandor avait d'etach'e de l’horrible cha^ine qui le maintenait.
— L’enfant ? la cha^ine ?
Mais H'el`ene poursuivait, sentant d’instinct qu’elle pouvait parler devant cette femme, devinant que cette myst'erieuse inconnue 'etait s^urement une alli'ee pour elle et ses amis.
— Au moment, continua-t-elle, o`u Blanche et moi, qui tenais son enfant, nous approchions de la br`eche, Fandor nous a rejoints, puis nous avons entendu des coups de feu, des cris, j’ai pass'e le mur, derri`ere un homme et une femme qui se sauvaient, ainsi que je vous l’ai dit et que je prenais encore un instant pour Fandor et Blanche.
— C’'etaient le Bedeau et Fleur-de-Rogue.
— Mais alors, hurla H'el`ene, qui comprenait soudain, Blanche et Fandor ne se sont pas sauv'es. Ils sont encore l`a-bas ? Alors ces coups de feu, ces cris ? Ah, mon Dieu.
La jeune fille porta la main `a sa poitrine comme pour y chercher son coeur qui s’arr^etait de battre. Elle voulut courir. Les jambes lui manquaient, et puis n’y avait-il pas le petit Jacques qui, inquiet, pleurnicheur, se suspendait `a sa main, la retenait de toutes ses forces ? D’ailleurs, H'el`ene 'etait seule d'esormais avec l’enfant sur le trottoir de la rue Pajoux, rue d'eserte, obscure, silencieuse. `A peine avait-elle parl'e que la grosse femme avait bondi loin d’elle, se pr'ecipitant dans la direction du couvent de l’Assomption.