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La disparition de Fandor (Исчезновение Фандора)
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— Ah, par exemple. Vous en avez de bonnes ! Non, mais ca, c’est dr^ole. Vous conduire aupr`es de la petite, vous dire son 'etat de sant'e. Impossible, mon cher carabinier.

— Pardon, interrompit Juve, pourquoi m’appelez-vous carabinier ?

— Mais, parce que vous ^etes comme les carabiniers d’Offenbach, vous arrivez trop tard.

— Sapristi, ce n’est pas de chance. Ne savez-vous pas o`u je pourrai la retrouver ? Cette femme a-t-elle laiss'e quelque adresse ? A-t-on `a son sujet un indice quelconque qui permette… ?

Juve s’interrompit, l’interne lui avait fait signe de se taire :

— 'Ecoutez, fit-il, je vais vous donner un tuyau, mais vous serez discret. N’en parlez `a personne. Car je pourrais avoir des ennuis, tout le monde me conna^it `a Biarritz.

— Soyez sans crainte, Monsieur.

— J’ai confiance en vous. Voil`a. Lorsque cette petite est venue, je lui ai prodigu'e mes soins, naturellement les plus d'evou'es, les plus assidus et j’aime `a croire que je ne me suis pas trop mal tir'e de mes pansements, puisque arriv'ee mourante la veille au soir elle 'etait sur pied le lendemain matin.

— C’est merveilleux.

— Mourante, vous savez, c’est une facon de parler. En r'ealit'e elle n’avait qu’une 'eraflure insignifiante `a l’'epaule, mais enfin si la balle, au lieu de lui 'ecorcher la peau, lui avait travers'e la poitrine, elle ne serait pas en train de se balader en ce moment, – je parle de la petite femme, – et il est probable que nous ne plaisanterions pas tous les deux `a son sujet.

— C’est 'evident.

— La petite 'etant gu'erie le matin, je suis venu prendre de ses nouvelles et comme elle 'etait gentille, nous avons taill'e une longue bavette ensemble. Elle m’a racont'e toutes ses histoires. Voyez-vous, ce spahi, Martial Altar`es, 'etait 'evidemment un amant 'econduit qui a manifest'e sa jalousie en jouant du rigolo. C’est rigolo, pas vrai. Ha ! ha ! ha ! Quand j’ai vu le type que c’'etait, je n’y ai pas 'et'e par quatre chemins et j’ai pris rendez-vous avec elle pour d^iner le soir m^eme.

— Ah, et alors ?

— Alors, conclut l’interne, avec une moue piteuse, elle m’avait bien promis qu’elle viendrait, mais le soir, bernique ! Personne ! Croyez-vous, cher Monsieur, elle m’avait pos'e un lapin et un beau. Depuis, pas de nouvelles.

— Et c’est tout ce que vous savez ?

— Que voulez-vous que je sache de plus ?

— Au revoir, Monsieur.

Deux secondes plus tard, Juve, furibond, avait quitt'e l’h^opital. Il rageait, il serrait les poings.

— Quand je pense que je suis rest'e plus de vingt minutes `a 'ecouter les sottises de ce bavard sinistre pour ne rien apprendre, c’est vraiment malheureux.

Assur'ement, Juve ne savait rien, mais il y avait pis pour lui. Le portrait qu’avait fait de la bless'ee le jeune interne 'etait tel que Juve, d'esormais, aurait 'et'e `a cent lieues de pouvoir admettre, s’il l’avait suppos'e un instant, que la victime du spahi 'etait bien la fille de Fant^omas.

Juve n’avait pas `a h'esiter d'esormais, il n’avait rien trouv'e d’int'eressant `a l’h^opital, mais il lui restait une excellente ressource, c’'etait d’aller voir le procureur `a Bayonne.

Le policier prit le tramway qui le transportait en vingt minutes `a la ville voisine. Mais il devait y 'eprouver une nouvelle d'eception. M. Anselme Roche 'etait sorti, il n’'etait m^eme pas `a Bayonne, on ne le trouvait pas plus `a son domicile qu’au tribunal. Juve 'etait de plus en plus furieux, mais il ne se lassait pas. La matin'ee 'etait loin d’^etre achev'ee et il pouvait parfaitement bien revenir `a Biarritz pour poursuivre son enqu^ete. Il restait, en effet, un lieu `a visiter, et ce lieu n’'etait autre que l’Imp'erial H^otel.

Juve, en reprenant le tramway qui le ramenait `a Biarritz, sentait peu `a peu rena^itre sa bonne humeur.

— Apr`es tout, se disait-il, c’est par un manque de logique que j’ai p'ech'e et j’en suis puni. Il ne faut pas essayer de remonter le courant des fleuves, il s’agit au contraire d’aller `a leur source et de suivre leur flot. Je n’aurais pas d^u commencer par l’h^opital, ni continuer par une visite au procureur, c’est par l’Imp'erial H^otel qu’il aurait fallu d'ebuter. Faisons table rase du pass'e. `A l’Imp'erial !

***

M. Hoch, g'erant de l’Imp'erial H^otel, 'etait ce matin-l`a en grande discussion avec le majordome de l’Infant d’Espagne, le marquis del Riva Corte. Les deux personnages, en t^ete-`a-t^ete, dans le bureau de l’h^otel, discutaient avec vivacit'e.

T^etu, comme tous ses compatriotes, M. Hoch depuis vingt minutes soutenait :

— Vous 'etiez treize, Monsieur le marquis, treize personnes.

Le majordome de l’infant, accompagnait sa protestation de grands gestes indign'es.

— Pas le moins du monde, nous 'etions douze.

Et, `a l’appui de ses dires, il recommencait le compte des personnes qui composaient la suite de Don Eugenio : mais il s’arr^etait toujours, car M. Hoch, 'enerv'e, ou alors perp'etuellement d'erang'e par le t'el'ephone, les tuyaux acoustiques, le personnel de l’h^otel, ne lui permettait jamais d’achever le calcul qui aurait d^u avoir toute l’attention du g'erant de l’Imp'erial H^otel.

Mais le marquis s’acharnait, il reprit enfin :

— Voyons, M. Hoch, comptez avec moi. Il y a d’abord Son Altesse Royale… je suppose que malgr'e la haute personnalit'e de don Eugenio, infant d’Espagne, cousin de Sa Majest'e le Roi et possesseur d’autres titres nobiliaires que je ne veux point 'enum'erer, ca fait un.

— Nous sommes d’accord, Monsieur le marquis…

— Bien. C’est d'ej`a quelque chose. Je continue, Son Altesse Royale et moi, cela fait deux, n’est-il pas vrai ? deux personnes ?

— Nous sommes d’accord, Monsieur le marquis, dit M. Hoch.

— Il y avait les trois caballeros, cela fait cinq, plus quatre valets de chambre, neuf, plus trois chauffeurs, douze. Sommes-nous d’accord, Monsieur Hoch ?

— Nous sommes parfaitement d’accord, Monsieur le majordome.

— Eh bien alors, s’'ecria celui-ci triomphant, c’est moi qui ai raison, vous le voyez bien M. Hoch, douze et non pas treize.

— Pardon, Monsieur le marquis, vous oubliez quelqu’un.

— Qui cela ?

— Mais l’agent secret.

— L’agent secret ? que voulez-vous dire ? je ne le connais pas.

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