La mort de Juve (Смерть Жюва)
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— Juve, vous me mettez dans une situation inextricable.
— 'Ecoute, Fandor, fit-il, laissons cela. Fant^omas, m’as-tu dit, a 'ecrit sous tes yeux une lettre dans laquelle il s’accuse de l’assassinat d’Herv'e Martel, dans laquelle il se vante d’avoir voulu torpiller le sous-marin ?
— Il a 'ecrit tout cela, je l’ai vu, de mes yeux vu.
— Donc, poursuivit le policier, de plus en plus 'enigmatique, cette lettre, lorsqu’elle parviendra `a destination, c’est-`a-dire lorsqu’elle te sera remise, non seulement t’innocentera, mais encore incriminera Fant^omas ?
— C’est exact. O`u voulez-vous en venir ?
— `A ceci, Fandor.
Juve, p'eniblement, leva le bras et appuya trois fois sur un bouton de sonnette.
On frappait `a la porte.
— Entrez, dit Juve.
Deux hommes entr`erent.
— Emparez-vous de lui, ordonna Juve.
Nalorgne et P'erouzin consid'er`erent Fandor stup'efaits, puis P'erouzin s’'ecria, tendant cordialement la main au journaliste :
— Mais au fait, c’est notre coll`egue de la police locale de Cherbourg. Comment allez-vous, cher monsieur ?
— De qui faut-il s’emparer ? Qui devons-nous mettre en 'etat d’arrestation ? demanda Nalorgne.
— Je viens de vous le dire, hurlait d'ej`a le paralytique, arr^etez cet homme, car c’est celui que vous recherchez, c’est l’individu inculp'e des divers crimes pour lesquels M. Havard vous a envoy'es ici. Vous cherchez J'er^ome Fandor, n’est-il pas vrai ? eh bien, arr^etez-le, car cet homme ici pr'esent n’est autre que J'er^ome Fandor.
— Mais pardon, dit Nalorgne, l’individu dont nous avons le signalement et que nous connaissons d’ailleurs du nom de J'er^ome Fandor ne ressemble pas du tout `a Monsieur ? J'er^ome Fandor est blond, il a une toute petite moustache, tandis que Monsieur est brun, tr`es brun m^eme.
— Imb'ecile, hurla Juve dont la l`evre 'ecumait de rage, je vous dis que c’est J'er^ome Fandor, je vous donne l’ordre de l’arr^eter.
Depuis qu’il 'etait `a Saint-Martin, Juve s’'etait fait officiellement reconna^itre par Nalorgne et P'erouzin, qui d'ej`a, dans M. Ronier, avaient devin'e le Roi des Policiers.
Nalorgne et P'erouzin, cependant, ne comprenaient pas, mais malgr'e eux, impressionn'es par l’attitude du fameux inspecteur de la S^uret'e, qu’ils savaient ^etre si appr'eci'e en haut lieu, ils se d'ecid`erent `a agir, d’autant que Fandor ne protestait pas, n’opposait aucune r'esistance.
Pour mettre sa conscience `a l’aise, Nalorgne demanda une derni`ere fois `a Juve :
— Alors, vous prenez la responsabilit'e de cette arrestation que vous ordonnez, monsieur Juve ?
— J’en prends la responsabilit'e.
Une seconde plus tard, Fandor avait les menottes.
— O`u faut-il le conduire ? demanda P'erouzin.
— Imm'ediatement et sous bonne garde, dit Juve, `a la prison de Cherbourg.
— Allez, en route, d'eclar`erent les deux hommes en posant leurs lourdes mains sur les 'epaules du journaliste.
Et celui-ci, qui jusqu’alors n’avait pas prononc'e une parole, se demandant s’il n’'etait pas victime d’une hallucination, ne put s’emp^echer de se tourner brusquement vers Juve :
— Enfin, Juve, pourquoi me faites-vous arr^eter ?
— Il fallait, Fandor, pour t’emp^echer de commettre le vol des papiers d’H'el`ene que t’ordonnait ton devoir, un cas de force majeure.
22 – FACE `A FACE
— Jean ?
— Monsieur ?
— Jean, mon ami, vous allez sortir d’ici, sortir m^eme tr`es ostensiblement de la maison, vous irez ensuite… ma foi, je n’en sais rien. Ou plut^ot si, je le sais, Jean, vous irez boulevard du Palais, vous entrerez au Caf'e des Avocats, vous commanderez un bock, un ap'eritif `a votre choix, puis, quand vous aurez fini de boire, vous recommencerez, mais au pr'ealable vous aurez soin de dire `a la caisse que si au t'el'ephone on demande une personne nomm'ee M. Jean, on vienne imm'ediatement vous chercher.
— Je ne comprends pas.
— Vous n’avez pas besoin de comprendre. Faites ce que je vous dis.
— Combien de temps faudra-t-il rester ?
— Jean, vous ^etes d'ecid'ement trop curieux. Quand vous aurez achev'e votre verre, si le coeur vous en dit, prenez-en un autre, puis un troisi`eme, en un mot, restez au caf'e jusqu’`a ce que vous ayez de mes nouvelles.
Le vieux Jean leva les bras au ciel.
— Monsieur est fou, murmura-t-il, de me faire sortir alors que nous venons `a peine de rentrer, que depuis trois mois nous n’avons pas mis les pieds rue Bonaparte, qu’il y a un d'esordre de tous les diables dans l’appartement et une 'epaisse couche de poussi`ere sur tout.
— Vous ^etes un impertinent. Faites comme je vous dis. Toutefois, d`es que je vous aurai t'el'ephon'e, vous vous pr'ecipiterez `a la S^uret'e et vous irez dire `a M. Havard, de ma part :
— Mais, qu’allez-vous devenir, monsieur Juve, pendant mon absence ? Il vous faudrait quelqu’un, si vous avez besoin de quelque chose ?
— Inutile, j’ai tout ce qu’il me faut, et d’ailleurs vous allez faire une chose. En partant, laissez la porte entrouverte.
— Pourquoi ?
— Parce qu’il est inutile que le visiteur que j’attends d'emolisse ma serrure. Allons, allons, Jean, d'ep^echez-vous, vous allez ^etre en retard.
— En retard ? fit le domestique, je comprends de moins en moins.
— Moi, fit Juve, je sais qu’il est quatre heures et demie et que, par cons'equent, j’'eprouve d`es maintenant un imp'erieux besoin d’^etre seul. Voulez-vous sortir, oui ou non ? Et n’oubliez surtout pas de sortir bien ostensiblement.