Le mariage de Fant?mas (Свадьба Фантомаса)
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Il trouva sur le pont myst'erieux, une foule consid'erable et fort 'emue. L’Am'ericain allait s’y m^eler, lorsque soudain, il poussa un cri : il venait de reconna^itre la Recuerda dans la foule.
L’Espagnole 'etait-elle donc revenue ? Que faisait-elle au milieu de cette foule 'enerv'ee et craintive, parmi ces gens de toutes cat'egories qui se bousculaient le long des balustrades ?
Backefelder allait s’approcher de la jeune femme lorsqu’il s’arr^eta net, surpris de nouveau. Quelqu’un venait de la prendre par le bras, de lui murmurer quelques mots `a l’oreille, et ce personnage, un homme 'el'egamment v^etu, quelqu’un du monde, assur'ement, l’entra^inait rapidement en direction de la place Clichy.
Backefelder les suivait, passant inapercu gr^ace `a la foule assez nombreuse dans ces parages ; le couple montait dans une automobile qui d'emarrait aussit^ot.
Backefelder n’h'esita pas et comme il l’avait vu faire `a maints policiers charg'es de filatures, il s’agrippa aux ressorts arri`ere de la voiture. Il alla ainsi jusqu’au boulevard Malesherbes, et de plus en plus 'etonn'e, il vit la Recuerda descendre de voiture, entrer avec cet homme dans une maison de belle apparence.
Pendant une bonne demi-heure Backefelder attendit. Il ne remarqua rien d’anormal `a la facade de cet immeuble, puis, de guerre lasse, renoncant `a comprendre, l’Am'ericain regagna son domicile, rue Saint-Ferdinand. Arriv'e chez lui, et n’ayant rien de mieux `a faire, il se coucha.
***
L’Am'ericain dormait profond'ement, lorsqu’un bruit insolite l’arrachait soudain au sommeil. Il fit de la lumi`ere dans sa chambre et demeura abasourdi. Quelqu’un venait d’entrer, la Recuerda.
Une pendule sonnait six heures. Une aube p^ale pointait. L’Espagnole ne paraissait aucunement troubl'ee, bien au contraire, elle arrivait souriante, les pommettes roses, les yeux 'etincelants.
— Enfin ! d'eclara-t-elle, en consid'erant Backefelder qui la regardait ahuri, enfin te voil`a ! Je d'esesp'erais de te retrouver !
— Pardon, fit Backefelder, mais il me semble que c’est `a moi d’^etre surpris. Qu’es-tu donc devenue depuis ces jours derniers ?
— Je me suis occup'ee de toi, d'eclara-t-elle, j’ai voulu te venger de Fant^omas.
— Et ?
— Alors, conclut simplement la Recuerda, apr`es un silence, je ne l’ai pas fait, voil`a tout.
L’Am'ericain se leva, s’habilla machinalement, fronca les sourcils, se rapprocha de sa ma^itresse :
— La Recuerda, fit-il, je n’aime gu`ere qu’on se moque de moi. Nous nous sommes unis librement, nous nous sommes donn'es l’un `a l’autre sans contrainte, il importe, si nous devons nous s'eparer, que nous le fassions avec la m^eme franchise.
— Que veux-tu dire ?
— Je veux dire, pr'ecisa Backefelder, que tu me trompes avec le premier venu, et que cela me d'epla^it. Tu sors, il y a dix minutes, un quart d’heure peut-^etre, d’une maison du boulevard Malesherbes o`u tu as pass'e la nuit avec un homme rencontr'e sans doute par hasard `a Montmartre. C’est l`a une conduite indigne de moi, indigne de toi.
La Recuerda tressaillit. Elle 'etait bien trop fi`ere pour nier, mais il lui 'etait fort d'esagr'eable d’autre part que Backefelder f^ut si bien au courant de ses faits et gestes. Et puis peut-^etre la Recuerda aimait-elle toujours le flegmatique Am'ericain, bien qu’elle n’e^ut pas h'esit'e `a le tromper une heure auparavant ?
— Le premier venu, grommela-t-elle, non Back, je ne te trompe pas avec le premier venu.
L’Am'ericain haussait les 'epaules :
— Quel est donc cet homme ? demanda-t-il.
— Il s’appelle le baron Stolberg.
— Connais pas.
Mais la Recuerda riait d’un rire nerveux, exasp'erant. L’Am'ericain s’en apercut, le rouge lui monta au front. Certes, il 'etait impassible et flegmatique, mais nerveux `a l’occasion, il pouvait avoir des col`eres terribles.
Brusquement, il prit la Recuerda par le bras.
— Allons, tr^eve de plaisanteries, dit-il, explique-toi, qu’est-ce que c’est que cet homme ?
L’Espagnole elle aussi, s’emporta. Son sang fier et bouillant ne fit qu’un tour. Elle n’admettait pas qu’on la trait^at de la sorte. Elle 'etait libre d’elle-m^eme et saurait le montrer.
— Tu veux savoir la personnalit'e qui se dissimule sous le nom du baron Stolberg ? Eh bien soit, apprends-le donc, le baron Stolberg mon amant, c’est Fant^omas !
L’Espagnole s’attendait `a une explosion de stup'efaction ou de fureur. Il n’en fut rien. Soudain Backefelder semblait s’^etre calm'e.
— Je m’en doutais, dit simplement Backefelder. Au surplus, cela n’a aucune importance, il suffit que mes soupcons soient confirm'es.
Reprenant un air autoritaire, il d'esignait `a la Recuerda, une chaise.
— Assieds-toi l`a, fit-il et ne bouge plus.
Puis d’un mouvement brusque, il courut `a la porte, la verrouillait, mettait la cl'e dans sa poche. Inqui`ete, outr'ee surtout de l’attitude de son amant, la Recuerda l’apostropha :
— Qu’est-ce qui te prend ? Que vas-tu faire ?
Et elle ne s’assit pas, elle se rapprocha au contraire de Backefelder, menacante, agressive. L’Am'ericain ne pr^eta aucune attention `a cette attitude, il alla s’asseoir devant son bureau, sur lequel se trouvait un appareil t'el'ephonique. Au moment de d'ecrocher le r'ecepteur, il d'eclara :
— `A mon tour, de te faire une r'ev'elation la Recuerda, elle sera courte, mais cat'egorique : dans un instant, je communiquerai avec Juve, je l’informerai que je te tiens prisonni`ere et je me mettrai `a sa disposition pour le conduire chez Fant^omas.