Le pendu de Londres (Лондонская виселица)
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— Vous interviendrez, monsieur Juve ? mais vous ne venez donc pas la trouver avec moi ?
— Nullement…
— Pourquoi donc ?
— Parce que…
French n’osa pas insister.
Il ne comprenait point ce qui pouvait g^ener Juve, mais il 'etait 'evident que le policier francais ne tenait en aucune facon `a rencontrer la femme de Tom Bob. Aussi 'etait-ce tr`es timidement qu’il demandait :
— Puis-je au moins lui parler de vous ? lui dire que vous lui conseillez ce retour ?
Juve toussait quelque peu :
— Hum… hum… non, ne lui parlez pas de moi. Qu’il vous suffise de savoir que je suis dans la coulisse, tout pr`es de vous, derri`ere vous. Si jamais mon intervention 'etait n'ecessaire, elle ne se ferait pas attendre. Mais j’aime autant que vous vous en passiez… Donc, je reprends, monsieur French, voici ce qu’il faut faire : vous allez voir M meGarrick, vous la d'ecidez `a revenir en Angleterre, et vous partez avec elle par le train de onze heures du matin. Ce soir, Dieppe, demain Londres, et ma foi l’affaire est boucl'ee… Ah, encore un mot pourtant ! Pr`es de M meGarrick, avec elle, vous trouverez une jeune fille qui probablement vous accompagnera jusqu’`a Dieppe. Cette jeune fille, je vous en avertis, aura l’air d’^etre votre ennemie, de faire cause commune avec M meGarrick, qui tr`es probablement cherchera `a vous fausser compagnie. N’y faites pas attention, je vous garantis, tout au contraire que vous aurez en elle une alli'ee. Aussi bien, monsieur French, vous verrez que je ne me trompe pas… tout cela va se passer le plus facilement du monde… Pr'eparons-nous, voici Bonni`eres…
***
— Dieu du ciel, c’est elle, c’est bien elle… Tom Bob est sauv'e… mais pourvu qu’elle se d'ecide `a m’accompagner ?… il est vrai que Juve !… ah ! comment faire ?…
Il y avait vingt minutes que French s’'etait s'epar'e du policier francais, et maintenant il se trouvait embusqu'e dans un fourr'e devant la maison que lui avait signal'e de loin Juve, et `a l’une des fen^etres de laquelle il venait d’avoir la surprise, soudain, d’apercevoir M meGarrick…
French, sentant la victoire proche, la victoire d'ecisive, s’affolait :
D'ecider cette femme `a revenir en Angleterre… Le pourrait-il ?…
En somme, French s’en rendait parfaitement compte, il n’avait aucun argument pour forcer M meGarrick `a le suivre…
Et, de moins en moins, French pensait pouvoir compter sur l’appui de Juve…
Le d'etective, toujours embusqu'e dans le fourr'e, r'efl'echit de longues minutes, surveillant M meGarrick qui, 'evidemment, loin de se douter de sa pr'esence, tranquillement humait l’air pur de la matin'ee…
Clac… clac…
French venait d’avoir une inspiration subite ! Tirant son appareil photographique, il avait pris deux instantan'es de M meGarrick, et il songeait :
— Qu’elle vienne ou qu’elle ne vienne pas, j’aurai toujours ainsi une preuve de son existence…
Mais il fallait qu’elle vienne…
Et, sortant du fourr'e, se d'emasquant, French s’avanca, appelant :
— Madame Garrick, madame Garrick.
D’un haut-le-corps, la jeune femme qui r^evait `a sa fen^etre s’'etait redress'ee.
Qui donc dans cette campagne recul'ee, pouvait l’appeler de ce nom ?
Qui ? cet homme ….
La malheureuse jeune femme, soudain p^alie, fixait maintenant le policier d’un air hagard, elle articula d’une voix tremblante :
— Qui demandez-vous, monsieur ?
Mais French affecta de ne rien comprendre `a ce d'esaveu implicite. Il insista :
— Madame Garrick, j’ai trois petits mots `a vous dire… voulez-vous m’accorder la faveur d’un entretien ?
M^eme jeu :
— Vous demandez, monsieur ?
Et French, toujours tr`es froid, affirma :
— Madame Garrick, je vous en prie nous n’avons pas une minute `a perdre. J’ai besoin de vous parler…, il faut que vous me receviez… vous m’entendez bien, madame ? il le faut…
Et French pesait de telle facon sur ce mot
— C’est bien, monsieur, veuillez m’attendre une seconde. Je descends vous ouvrir…
***
Tandis que French, renseign'e par Juve, arrivait `a rencontrer l’'enigmatique 'epouse du docteur Garrick, d’autres 'ev'enements se pr'ecipitaient, qui avaient bien leur importance.
`A neuf heures, Bobinette 'etait sortie de la maison pour se rendre au village.
Or, comme la jeune femme d'ebouchait d’un petit sentier formant raccourci, en plein champ, elle n’avait pas 'et'e peu surprise de s’entendre h'eler :
— Mademoiselle Bobinette ?…
Bobinette en se retournant apercut un vieux mendiant qui de loin lui faisait des signes amicaux, tout en l’appelant encore :
— Mademoiselle Bobinette ?…
Mais soudain, comme ce vieillard `a barbe blanche arrivait pr`es d’elle, Bobinette joignit les mains, effray'ee :
— Vous ?…
— Mais oui, moi, Bobinette… vous allez bien ?
Bobinette, toujours immobile :
— Vous ici ?…
— Cela vous 'etonne donc bien ?
Bobinette 'etait terrifi'ee, en effet.
— Que voulez-vous ? questionna-t-elle nerveusement, que faites-vous ici ?… Monsieur Juve… monsieur Juve, j’ai peur, j’ai peur…
Juve, car c’'etait en effet Juve, qui, tirant de ses poches tout un arsenal qui ne le quittait jamais, avait, en quelques minutes, apr`es le d'epart de French, r'eussi `a se donner l’aspect d’un vieux mendiant, Juve souriait :
— Peur ? fit-il, et pourquoi donc ? Vous ^etes folle, ma pauvre enfant… Et d’ailleurs je ne comprends pas que vous soyez si surprise de me voir ici alors que lady Beltham est `a deux pas…
— Lady Beltham… quoi… vous savez ?…