Le pendu de Londres (Лондонская виселица)
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`A sa grande surprise, nul ne broncha : la profession exerc'ee par Garrick en dehors de celle de dentiste, n’int'eressait 'evidemment pas le proc`es ; il n’y avait donc pas lieu de s’en pr'eoccuper…
C’est dans le m^eme esprit que l’on n’avait pas cit'e Francoise Lemercier comme t'emoin. Elle avait 'et'e jug'ee « innocente » de l’infanticide qu’on lui avait reproch'e, on ne l’avait pas accus'ee de complicit'e dans l’assassinat de M meGarrick reproch'e au dentiste, on ne la faisait donc pas venir…
— Parbleu, grommelait en lui-m^eme le journaliste francais, si la Justice est exp'editive en Angleterre, les instructions m’ont l’air d’y ^etre faites d’une dr^ole de facon.
Il revenait machinalement par la pens'ee au sous-entendu qui l’avait intrigu'e :
Que diable pouvait ^etre cette seconde profession de Garrick sur laquelle on se mettait d’accord pour ne pas en parler ?..
Le journaliste eut beau interroger ses voisins, ceux-ci n’en savaient rien, et d’ailleurs n’y attachaient aucune importance.
L’attention de Mirat fut encore une fois captiv'ee par l’intervention dans l’affaire d’un vieil homme `a lunettes d’or qui, d’une voix chevrotante, s’'etait lev'e pour lire un document.
C’'etait l’'equivalent du greffier de nos cours d’assises, le Clerk of the Court, personnage charg'e de la lecture de l’acte d’accusation.
Le document 'etait bref, contrairement `a ceux que r'edigent les bureaucrates francais, et contenait l’expos'e aussi succinct que possible des faits reproch'es `a l’inculp'e :
Le mercredi 17 avril les inspecteurs de la police du District de Londres recueillaient, dans le quartier de Putney, des bruits vagues et singuliers qu’ils faisaient pr'eciser, interrogeant les fournisseurs, les domestiques et les voisins.
Il r'esultait de ces bruits qu’une certaine dame Garrick, 'epouse de M. Garrick, m'edecin-dentiste, avait subitement disparu de chez elle, sans en avoir inform'e qui que ce f^ut. Cette disparition causait de la surprise dans le quartier et aussi une certaine 'emotion, car M meGarrick 'etait fort sympathique `a son entourage. Il n’en 'etait pas de m^eme de M. Garrick, homme aux apparences rudes, myst'erieuses et brutales.
L’enqu^ete effectu'ee par les d'etectives 'etablissait rapidement que M. Garrick entretenait, dans le centre de Londres, des relations adult'erines avec une artiste du music-hall, une Francaise, 'epouse s'epar'ee d’un Canadien.
Lorsque l’interrogatoire du docteur Garrick fut d'ecid'e et que le d'etective charg'e de l’effectuer se rendit `a son domicile, il d'ecouvrit que le docteur Garrick 'etait absent.
Ce d'epart co"incidait avec celui de sa ma^itresse.
Il 'etait d’autant plus suspect qu’il avait toutes les apparences d’une fuite pr'ecipit'ee, ayant pour but de se soustraire aux recherches de la police et aux questions des magistrats.
Les d'etectives parvenaient n'eanmoins `a savoir quel 'etait le lieu de refuge qu’avait provisoirement choisi le docteur Garrick.
Celui-ci s’'etait embarqu'e le m^eme jour que sa ma^itresse, `a bord du steamerVictoria qui se rendait au Canada.
Si le docteur avait pu d'ebarquer en Am'erique en d'epit des bonnes relations qui unissent le Royaume-Uni de Grande-Bretagne avec la R'epublique Canadienne, l’arrestation du pr'esum'e coupable aurait donn'e lieu `a de nombreuses complications. Mais, gr^ace `a la t'el'egraphie sans fil, on put savoir que le docteur Garrick 'etait `a bord duVictoria et gr^ace `a la rapidit'e du TransatlantiqueMajestic , le pr'evenu put ^etre rejoint en mer par un inspecteur de police charg'e de l’appr'ehender.
Entre temps, au cours des investigations faites au domicile du docteur Garrick, des vestiges humains 'etaient d'ecouverts dans sa cave.
Ceci tendait `a prouver de la facon la plus formelle que le docteur inculp'e du meurtre de sa femme, M meGarrick, avait ensuite fait dispara^itre le corps de sa victime par des proc'ed'es chimique connus de lui, et dont les experts ont d'etermin'e la nature.
Le docteur Garrick, arr^et'e `a bord duVictoria, a d'eclar'e au d'etective charg'e de son arrestation, ne rien comprendre aux faits qui lui 'etaient reproch'es.
Cet acte d’accusation, tel qu’il vient d’^etre lu, a 'et'e d'eclar'e valable par le grand jury, si'egeant `a huis clos.
En foi de quoi Garrick a 'et'e renvoy'e devant laCentral Criminal Court pour y ^etre jug'e.
On avait 'ecout'e la lecture de cet acte qui en r'ealit'e ne faisait que r'esumer des choses connues de tout le monde, et dont l’'enum'eration s`eche contrastait 'etrangement avec les r'ecits circonstanci'es et dramatiques que les journaux, `a l’'epoque, avaient consacr'e `a ces 'episodes.
Au milieu du silence, lord Pilgrim s’adressant `a Garrick lui demanda, conform'ement `a la loi :
— Que plaidez-vous, Garrick, coupable ou non coupable ?
Si l’accus'e avait r'epondu coupable, l’audience aurait 'et'e aussit^ot lev'ee, on n’aurait m^eme pas constitu'e un jury et le juge aurait sur-le-champ, ne consultant que lui-m^eme, prononc'e la peine qu’il aurait estim'e devoir ^etre appliqu'ee.
Mais Garrick r'epondait :
— Je plaide non coupable.