La mort de Juve (Смерть Жюва)
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— C’est admirable, c’est effrayant, c’est du Fant^omas.
— Oui, Juve. C’est du Fant^omas.
— Quoi d’autre Fandor ?
— Juve, si j’ai bien compris ce qui s’est pass'e, – et je crois ^etre dans le vrai en disant que le myst'erieux voleur de l’avenue Niel faisait dispara^itre les documents qui se trouvaient dans le bureau du courtier maritime en les aspirant, au sens propre du mot, – il est un autre point que je n’ai pas pu 'eclaircir.
— Ce que tu viens de me dire, Fandor, est rigoureusement exact. L’appareil ne se contentait pas d’aspirer, il refoulait aussi, ce qui explique le fameux ouragan d'echa^in'e un certain soir dans le cabinet de travail uniquement pour jeter l’'epouvante. Mais je te vois venir et tu vas me demander comment il se fait que le coupable qui faisait manoeuvrer l’appareil, choisissait le bon moment pour le mettre en action, et pourquoi il n’aspirait qu’`a coup s^ur ?
— D'ecid'ement, Juve, vous avez toujours, vous avez m^eme plus que jamais une admirable perspicacit'e. Oui, j’allais vous poser cette question.
— Notre homme se contentait d’'ecouter aux portes.
— Aux portes ?
— C’est une facon de parler, poursuivit Juve, car, en r'ealit'e, le voleur, le criminel ne se tenait pas dans l’appartement d’Herv'e Martel, mais bien dans le garage, `a c^ot'e du moteur, ainsi que tu l’as d'ecouvert. Il 'ecoutait ce que l’on disait dans le cabinet de travail de l’appartement de l’avenue Niel. Mieux encore, il entendait comme s’il se f^ut trouv'e dans la pi`ece. Comment ?
— Comment ?
— Voyons, le t'el'ephone.
— Mais le t'el'ephone d’Herv'e Martel n’est pas dans son cabinet, il est `a l’autre bout de l’appartement.
— D’accord pour le t'el'ephone d’Herv'e Martel, mais celui de Fant^omas est encore dans le bureau.
— Vous avez peut-^etre raison, fit soudain le journaliste, j’ai remarqu'e en effet dans le garage un poste t'el'ephonique plac'e tout `a c^ot'e du moteur, mais je ne vois pas o`u il pouvait aboutir.
— H'elas ! fit Juve, je l’avais pourtant indiqu'e `a L'eon, et le malheureux garcon aurait pu te le dire, s’il n’avait 'et'e victime du terrible accident qui lui co^ute un oeil. Vous avez fouill'e tout l’appartement, sond'e les murs du bureau de travail, je parie que vous n’avez pas d'emoli le plancher.
— Non.
— Eh bien, dit Juve, c’est ce qu’il fallait faire et vous auriez certainement trouv'e la plaque r'eceptrice dispos'ee par Fant^omas entre le parquet de la pi`ece et le plafond de l’appartement du dessous. C’est pour cela, poursuivait Juve en s’animant, que j’avais recommand'e `a L'eon et `a Michel de prononcer `a haute voix certaines phrases caract'eristiques, de facon `a pr'evenir, si je puis m’exprimer ainsi, l’adversaire inconnu. Mon proc'ed'e a r'eussi, puisqu’`a peine venaient-ils de dire ce qu’il fallait que l’appareil d’aspiration s’est mis en mouvement et a trait'e si brutalement d’ailleurs mon infortun'e coll`egue. Hein, qu’en penses-tu, Fandor ?
— Vous m’avez emp^ech'e de parler.
— Dis ce que tu veux dire :
— Il y a deux points qu’il faut 'elucider. Puisque vous ^etes si merveilleusement renseign'e sur ce que nous appelons les myst'erieuses affaires de l’avenue Niel, et qu’en somme c’est vous qui, de votre lit, avez dirig'e les enqu^etes, pouvez-vous me dire si vous avez des renseignements sur la personnalit'e de cette jeune fille qui 'etait dactylographe chez le pseudo courtier d’assurances, Herv'e.
— Fandor, elle s’appelle H'el`ene.
— Eh bien ?
— Eh bien, poursuivit Juve, cramponne-toi au fauteuil, si tu ne veux pas tomber `a la renverse, parce que je vais t’'etonner.
— C’est fait, Juve.
— Cette jeune fille je la connais donc tr`es bien, puisque, gr^ace `a l’intervention de nos amis Nalorgne et P'erouzin, je dois l’'epouser prochainement.
— Vous devez 'epouser la dactylographe ?
— Je pourrais d’ailleurs faire plus mal, car elle est fort jolie.
Le policier tira de dessous ses couvertures un portefeuille o`u il prit une photographie qu’il tendit au journaliste.
Fandor se pr'ecipita.
— H'el`ene, cria Fandor, c’est elle, la fille de Fant^omas !
— Eh oui, Fandor, eh oui.
En proie `a une 'emotion inexprimable, `a une nervosit'e presque inqui'etante, Fandor arpentait la chambre de Juve avec une extraordinaire f'ebrilit'e.
— Mais c’est une plaisanterie ? Vous n’allez pas 'epouser la fille de Fant^omas ? Mais 'etait-ce bien elle qui se trouvait avenue Niel en qualit'e de dactylographe ? Oh Juve, inutile d’essayer de me convaincre, c’est fait depuis longtemps. Si je doute absolument de votre projet de mariage, je suis convaincu que la malheureuse H'el`ene est bien la myst'erieuse dactylographe qu’employait `a son service le pseudo courtier Herv'e Martel.
— Fandor, interrompit Juve, voil`a deux fois que tu viens de dire le
— Parce que Fant^omas, c’est le courtier Herv'e Martel.
— C’est idiot, Fandor. Herv'e Martel existe r'eellement. C’est une personnalit'e connue `a Paris, il est titulaire de sa charge depuis pr`es de dix ans.
— Possible ! s’'ecria Fandor, mais nous savons que Fant^omas n’en est pas `a un crime pr`es, et il est parfaitement capable d’avoir assassin'e le v'eritable Herv'e Martel, pour se substituer `a lui. Juve, souvenez-vous du magistrat de Saint-Calais, tu'e, remplac'e par l’Insaisissable.
— Tu te trompes, Fandor.
— Non, la meilleure preuve, c’est qu’apr`es l’attentat dont vient d’^etre victime le malheureux L'eon, le courtier, le « pseudo courtier » je maintiens mes dires, a brusquement quitt'e Paris et s’en est all'e, soi disant, `a Cherbourg.
— `A Cherbourg, en effet, d'eclara Juve, rien n’est plus logique. Sa pr'esence est n'ecessaire dans ce port de mer `a l’entr'ee duquel est venu sombrer un cargo boat dont la cargaison l’int'eresse au plus haut point.
— Juve, H'el`ene a disparu avec lui.
— Non, interrompit encore Juve, elle a simplement, en employ'ee fid`ele, suivi les instructions de son patron, c’est-`a-dire qu’elle s’est rendue 'egalement `a Cherbourg o`u le courtier maritime peut avoir besoin d’elle.
— En ^etes-vous s^ur, Juve ?
— Oui.
— Eh bien je pars pour Cherbourg. Je veux en avoir le coeur net. Demain, je saurai si Herv'e Martel est bien Fant^omas, comme j’en ai la conviction.