La mort de Juve (Смерть Жюва)
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Nalorgne, `a son tour, s’avanca :
— Nous vous demanderons une huitaine de jours pour l’enqu^ete, Monsieur.
Le mot de la fin, ce fut Charley qui l’eut :
— Il doit y avoir des maisons hant'ees.
Mais l`a-dessus, Irma de Steinkerque poussa de tels cris, que Charley se tut.
Seuls Nalorgne et P'erouzin, qui s’estimaient tr`es forts d’avoir pens'e `a se d'eguiser pour arriver apr`es tout le monde sur les lieux, gardaient le sourire. Ces deux garcons 'etaient des esprits forts.
4 – SUR LA PENTE SAVONN'EE
Dans leur modeste cabinet de la rue Saint-Marc, Nalorgne et P'erouzin se promenaient de long en large, se frottant les mains, 'echangeant des clins d’yeux satisfaits, des sourires entendus.
Nalorgne et P'erouzin exultaient. Quelques instant auparavant, en effet, il 'etait pr`es de huit heures du matin, ils avaient 'echang'e une derni`ere poign'ee de main avec leur excellent ami Prosper, l’ancien cocher d’Herv'e Martel. Prosper avait d^u leur parler d’affaires importantes et, en tout cas, leur donner de bonnes nouvelles. L’ex-cocher 'etait ce matin-l`a rev^etu d’un uniforme d’encaisseur des grandes banques.
— Mon cher, disait Nalorgne, arr^etant, en le prenant par le pan de sa jaquette, son associ'e qui fr'en'etiquement d'eambulait dans le cabinet de travail, mon cher, plus de doute.
— Et par cons'equent notre devoir est ?
— De conclure le plus vite possible une enqu^ete qui fera grand honneur `a notre 'etude.
— Je crois, reprit Nalorgne, qu’il n’y a pas deux facons d’op'erer. Vous allez vous rendre, mon cher P'erouzin, au commissariat de police, vous pr'eviendrez le commissaire de ce qui se passe, et moi, pendant ce temps, j’irai chercher le principal t'emoin. De la sorte, quand notre homme reviendra, nous n’aurons qu’`a le cueillir. H'e, h'e, je ris d’avance en imaginant sa surprise.
Il en riait encore quand retentit un coup de sonnette.
— Un client ! Rappelez-vous, P'erouzin, que les affaires am`enent les affaires. L’argent am`ene l’argent. Nous sommes en train de conclure une enqu^ete tr`es importante, je ne serais nullement 'etonn'e que, nos travaux termin'es, nous en ayons d’autres imm'ediatement.
En v'erit'e, c’'etait le courrier.
— O`u est l’ouvre-lettres ?
L’ouvre-lettres enfin retrouv'e, P'erouzin, avec une solennit'e pompeuse, annonca :
— Mon cher Nalorgne, je vais vous lire le courrier.
Ce courrier n’'etait compos'e que d’une lettre assez courte m^eme, mais dont la voix de P'erouzin souligna, d'etailla tous les passages :
Messieurs,
Je ne suis pas connu de vous, mais cependant, sur les bons rapports qui me sont faits relativement `a votre agence, je ne doute pas que nous puissions arriver `a nous entendre.
On m’a dit que vous vous occupiez de mariages riches.
Je suis c'elibataire, j’ai cinquante ans et je serais tr`es bien conserv'e pour mon ^age, si r'ecemment un accident f^acheux n’avait occasionn'e une paralysie presque compl`ete des deux jambes. Mon infirmit'e, toutefois, n’alt'erant en rien mes traits et 'etant largement compens'ee par ma fortune, (j’ai pr`es de dix mille francs de rente), je songe `a me marier. Connaissez-vous quelque jeune fille, quelque employ'ee, jolie, jeune, de caract`ere doux et aimant, susceptible de comprendre que l’affection d’un homme de mon ^age vaut mieux que les folles ardeurs d’un godelureau ? Si vous connaissez une jeune fille r'epondant `a ces conditions, je serais heureux de vous parler quelques instants. Peut-^etre pourrions-nous alors organiser une rencontre.
J’attends l’honneur et le plaisir de vous lire, et vous prie de me croire
Votre respectueusement d'evou'e
Louis Ronier,
rentier `a Saint-Germain.
— C’est m^eme encore une grosse affaire, car nous pourrions demander une commission importante. Mais voyez-vous, Nalorgne, dans nos relations, une jeune fille susceptible de plaire `a ce monsieur ?
Nalorgne allait r'epondre, lorsque, pour la seconde fois de la matin'ee, la sonnette tinta :
— Je vous parie que c’est encore un client.
— Hum, c’est bien improbable.
Ils coururent en m^eme temps, cette fois `a la porte, et demeur`erent ravis en apercevant une toute jeune fille debout sur le palier, et semblant fort 'emue.
— Vous demandez, Mademoiselle ?
— L’'etude de MM. Nalorgne et P'erouzin.
— C’est bien ici, Mademoiselle. Entrez donc.
Pr'ec'edant la visiteuse, Nalorgne l’introduisit, puis se pr'esenta :
— Je suis M. Nalorgne et voici mon associ'e, M. P'erouzin. Vous ^etes ici dans notre cabinet, Mademoiselle. Parlez sans crainte. Qu’est-ce qui vous am`ene `a notre porte ?
— Mon Dieu, Messieurs, commencait la jeune fille, je viens vous trouver pour une affaire importante.
— Eh bien, Mademoiselle, de quelle affaire s’agit-il ?
— Du vol qui s’est produit dans le bureau de mon patron, M. Herv'e Martel, et la suite.
D'ej`a P'erouzin avait bondi.
— Nalorgne, c’est le dossier 1738, hein ?
— Voyez au r'epertoire, mon cher ami, je ne me rappelle plus trop.
— Il n’est peut-^etre pas n'ecessaire de retrouver le dossier, je venais simplement vous demander si vous aviez du nouveau. Vous continuez les recherches, n’est-ce pas ?
— Voyez plut^ot.
Triomphalement, Nalorgne exhibait un 'enorme dossier bourr'e de documents :
— Voyez plut^ot. Malheureusement, nous n’avons rien de nouveau. Vous n’aviez que cela `a nous demander. Mademoiselle ? C’est dommage. Vous ne d'esirez pas, par exemple, que nous nous occupions de votre mariage ?