Le pendu de Londres (Лондонская виселица)
Шрифт:
— Capitaine Hill, je n’ai plus faim…
— D'esol'e…
***
Le d'ejeuner s’achevait.
Entra^inant Mr. Higgins et lady Puffy sur la passerelle de commandement, le capitaine Hill lancait vers le ciel bleu les savoureuses bouff'ees d’un superbe havane, et d'esignait du doigt `a ses passagers un couple qui, accoud'e au bastingage causait amoureusement, les yeux perdus `a l’infini de l’horizon :
— Les voil`a, vous voyez qu’ils ne se doutent de rien…
D`es le soir m^eme – le troisi`eme jour de la travers'ee du steamer – le Majestic'etait entr'e en communication avec le Victoria.
Et c’'etaient d’incessants cr'epitements sur les antennes…
Le capitaine Hill c^ablait :
« Je marche `a vitesse r'eduite, forcer vos feux pour nous rejoindre au plus vite. Tout va bien `a mon bord. Les Normand ne se doutent de rien…
Et le Majestic, d’heure en heure, r'epondait :
« Nous filons `a pleine allure, mer calme, vent arri`ere. Vous rejoindrons demain `a midi. Attention `a 'eviter que les deux individus suspects ne se tuent de d'esespoir. »
Quelle allait ^etre l’issue de l’extraordinaire poursuite que le policier de Scotland Yard avait engag'ee `a travers l’Oc'ean, et qui devait se terminer, suivant toute esp'erance, en plein Oc'ean ?…
***
— Armez la baleini`ere… bien, envoyez les filins… hep, de l’ensemble, garcons… un quart tribord, l’homme de barre… en panne, les machines. Hop ! hisse garcons… ca va, laissez filer… c’est bien… quittez… allez… tout ! bon !
Au flanc du superbe steamer Majestic, immobilis'e `a quelques encablures du Victoriaqui, lui-m^eme, avait mis en panne, en plein Atlantique, sans que rien ne v^int rompre l’harmonie de la ligne d’horizon, une baleini`ere descendait des porte-manteaux…
Le quartier-ma^itre qui en avait le commandement compl'etait la manoeuvre ; d’un coup de sifflet, il avertissait les hommes demeur'es `a bord du steamer :
— Attention ! larguez !
Puis, se tournant vers ses matelots :
— Vous autres… avant partout ! pousse !
Les huit avirons, en cadence, se levaient et s’abaissaient, la baleini`ere que le Majesticd'etachait vers le Victoria, coquille de noix qui semblait encore plus petite de voisiner avec les deux grands courriers, s’'eloignait `a force de rames…
`A bord du Majestic, tous les passagers, mass'es, s’appuyaient aux bastingages, criant : « Bonne chance ! », poussaient des « hurrah » en l’honneur de la vieille Angleterre… `A bord du Victoria, pareillement, tous les passagers sur le pont, au comble de l’'emotion attendaient…
Et seul, peut-^etre, de tous ceux qui vivaient ces minutes, un homme demeurait calme, qui se tenait debout, au centre de la baleini`ere, un homme qui 'etait sangl'e dans un complet noir, tr`es correct… le d'etective Shepard.
Shepard, au sortir du bouge de Old Fellowavait devin'e bien des choses. Une enqu^ete rapide lui en avait appris d’autres encore et, comme sa baleini`ere allait joindre l’escalier de la coup'ee du Victoria, un sourire flottait sur ses l`evres… Le d'etective pensait toucher au but…
Par une manoeuvre savante, le quartier-ma^itre avait r'eussi l’accostage, le sifflet aux dents, les matelots du Victoriarendaient les honneurs, des gaffes accrochaient l’embarcation, Shepard, lestement, sautait `a bord du Victoria…
— Le capitaine Hill vous attend dans son carr'e… dit l’officier.
En haut de l’escalier, Shepard, qui suivait son guide, trouva la foule des passagers accourus sur son passage, et le d'evisageant curieusement :
— Dommage ! murmura le d'etective. Tout le monde sait 'evidemment qui je suis, et pourquoi je viens `a bord… Ce capitaine Hill doit ^etre un bavard…
Il allait continuer, lorsque soudain il sentit que quelqu’un lui frappait sur l’'epaule. Shepard se retourna :
— Dieu divin ! fit-il, sur un ton de stup'efaction absolue, vous ? Tom Bob ?… ici ? sur le Victoria ? mais je r^eve ?…
— Parbleu, d'eclarait-il, mais c’est bien vous, Shepard ? en v'erit'e mon ami, je croirais que mes yeux me trompent… que diable tout cela veut-il dire ?… et pourquoi…
— Vous ne le savez pas ?
— Nullement !
— Vous n’^etes donc pas ici pour l’arr^eter ?
— Arr^eter qui ?
— Mais Garrick !
— Vous dites, arr^eter Garrick, Shepard ?
— Je dis Garrick, Tom Bob, Garrick ? le docteur Garrick ?… voyons ?…
Devant le d'etective Shepard, le gentleman qui r'epondait au nom de Tom Bob, recula de trois pas.
— Ah ca, faisait-il d’un ton de voix qui trahissait son ahurissement absolu, vous pr'etendez arr^eter Garrick ?… mais savez-vous qui c’est Garrick ?…
— Parfaitement, je sais que c’est un des passagers de ce steamer, et qu’il se fait appeler Normand. Il est accompagn'e de sa ma^itresse…
Shepard allait continuer `a fournir des explications, lorsque d’un mouvement impr'evu, Tom Bob, lui posant les mains sur les 'epaules, l’entra^ina rapidement loin des passagers qui ne comprenaient rien au colloque des deux hommes.
— Bont'e divine, s’exclama Tom Bob… il me semble que je suis le jouet d’un cauchemar… Shepard… que se passe-t-il, pour l’amour de Dieu ?… Mais vous ne comprenez donc pas que le docteur Garrick, master Normand, c’est…