Le Voleur d'Or (Золотой вор)
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Les battants avaient craqu'e sinistrement, la foule qui grossissait sans cesse dans la galerie voulut p'en'etrer derri`ere le magistrat.
Celui-ci s’y opposa :
— Que personne n’avance ! dit-il, je veux ^etre ici seul avec les agents !
Avisant M. Marquiset, le commissaire de police demanda :
— Voulez-vous ^etes assez aimable, monsieur, pour vous mettre sur le seuil de cette porte, pour emp^echer de passer ?
Le magistrat s’'etait bien adress'e en sollicitant de M. Marquiset ce service.
M. Marquiset 'etait, en effet, dans cette foule de domestiques, le seul ma^itre ; il 'etait bien certain que nul, malgr'e sa curiosit'e, n’oserait passer outre.
Un des agents 'etait all'e ouvrir les rideaux du cabinet de travail. Lorsque la lumi`ere se fit dans la pi`ece, le commissaire ne prof'era pas de cri, mais il tordit nerveusement sa moustache et grommela :
— Oh ! oh ! C’est grave !
Quant `a M. Marquiset, qui avait regard'e dans la pi`ece, lui qui n’avait pas l’habitude devint bl^eme et poussa une exclamation.
— Un assassinat !
Le magistrat cependant venait de se pr'ecipiter vers un angle du cabinet de travail o`u se trouvait le corps d’un homme 'etendu, baignant dans une marre de sang.
Un poignard gisait `a terre `a c^ot'e, la lame 'etait toute rouge, le malheureux avait 'et'e frapp'e `a la gorge, et il 'etait vraisemblablement tomb'e raide mort entre le bureau et la chemin'ee.
C’'etait en vain, d'esormais, que M. Marquiset emp^echait les gens d’entrer, ceux-ci se ruaient, forcaient la consigne… Les deux agents durent intervenir, cependant que le commissaire de police inventoriait imm'ediatement la pi`ece, afin de relever un d'etail quelconque, qui p^ut lui donner le secret de ce qui s’'etait pass'e…
Caroline toutefois, b'en'eficiant des droits que lui conf'erait sa qualit'e de domestique de la maison, voulut entrer dans le cabinet de travail.
M me Drapier, s’accrochant `a elle, fit quelques pas mais, se rendant compte que le commissaire 'etait pench'e sur un corps immobile, elle n’osa regarder.
— C’est mon mari, n’est-ce pas ? interrogea-t-elle d’une voix rauque, 'etrangl'ee.
Imm'ediatement, le commissaire la rassurait.
— Je ne crois pas, madame ! Veuillez vous approcher… me dire si vous connaissez la victime ?
En m^eme temps le magistrat se reculait, M me Drapier vit tout d’un coup le corps inerte d’un homme tremp'e de sang.
Elle poussa un cri 'epouvantable, battit l’air de ses bras, tomba en arri`ere. Il fallut l’emporter dans la galerie, la malheureuse femme avait une crise de nerfs.
Caroline, cependant devenue toute p^ale, conservait un peu de pr'esence d’esprit.
Ses dents claquaient d’'emotion, elle faisait le signe de croix sans discontinuer et cette fois, `a l’interrogation du commissaire de police, elle finit par r'epondre :
— Ah mon Dieu ! le pauvre homme ! Si c’est possible, tout de m^eme, dire que je l’ai vu bien vivant hier au soir, ah ! je comprends qu’il n’a pas r'epondu quand j’ai 'et'e l’appeler ce matin, au septi`eme ! Pauvre de nous, tout de m^eme ! Dire que chacun est expos'e…
— Enfin, interrompit le commissaire impatient'e, dites-moi qui c’est, puisque vous le connaissez ?
Et alors Caroline r'etorqua, croyant que le commissaire avait devin'e, s’imaginant que tout le monde devait ^etre au courant :
— Mais, monsieur, c’est Firmain, le nouveau domestique, le valet de chambre qui est entr'e hier au service de madame et de monsieur !
— Le valet de chambre est assassin'e !…
La rumeur se r'epandait aussit^ot dans la galerie.
Et les femmes de chambre qui soignaient M me Drapier s’empressaient `a le lui dire, d`es qu’elle ouvrait les yeux.
— Ce n’est pas le mari de madame !
Elles ajoutaient avec une cruaut'e na"ive :
— Ce n’est que le domestique !
M me Drapier reprenait connaissance, elle fit un effort supr^eme pour se tenir debout.
— Mon mari, hurlait-elle, mon mari, o`u est-il ?
Le commissaire questionnait M. Marquiset :
— Ce M. Drapier qui habite ici, n’est-ce pas le directeur de la Monnaie ?
— Mais parfaitement, monsieur le commissaire ! Peut-^etre ce dernier est-il `a son bureau `a l’heure actuelle ?
Caroline, qui d'ecid'ement avait de la pr'esence d’esprit, se pr'ecipitait au t'el'ephone, demandait la communication.
M me Drapier, toute chancelante, se tra^ina jusqu’`a l’appareil.
Elle eut le temps de regarder le cadavre de Firmain.
— All^o ! all^o ! c’est toi, L'eon ? interrogea-t-elle, angoiss'ee.
Elle eut un soupir de soulagement lorsqu’elle entendit la voix s`eche et nerveuse de son mari qui r'epondait `a l’autre bout du fil.
— C’est moi ! qu’est-ce que tu veux ?
— Ah ! L'eon ! L'eon ! poursuivait M me Drapier dans le t'el'ephone, c’est 'epouvantable ! C’est affreux ! mon Dieu !…
— Mais qu’est-ce qu’il y a ? Qu’est-ce qui se passe ? interrogeait de son bureau, `a la Monnaie, le haut fonctionnaire que cet appel t'el'ephonique intriguait certainement au plus haut point.
M me Drapier semblait incapable de fournir une explication et le commissaire lui prit l’appareil des mains ; ce fut lui qui r'epondit.