Le Voleur d'Or (Золотой вор)
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Alors, la rage au coeur, baissant la t^ete et d'evorant les sanglots qui l’'etouffaient, J'er^ome Fandor se r'esigna :
— Trop tard ! pensait-il. Fant^omas vient d’'echapper, je ne puis plus esp'erer le rejoindre.
J'er^ome Fandor, abandonnant toutes poursuites, qui d'esormais ne pouvaient plus gu`ere avoir de r'esultats, se dirigea vers la maison d’habitation, pensant rejoindre sa m`ere, et fr'emissant encore en se demandant quelles seraient les explications qu’il pourrait lui donner de la disparition de son p`ere.
Or, comme le jeune homme, `a pas lents, se rapprochait de la maison, il s’arr^eta brusquement, stup'efi'e, pr^etant l’oreille.
Que se passait-il donc encore ?
J'er^ome Fandor venait de remarquer qu’il entendait depuis quelques instants un bruit extraordinaire, comme un v'eritable ronflement, un ronflement formidable, qui semblait s’accompagner de cr'epitements, d’effondrements aussi.
— Bon Dieu, qu’y a-t-il donc ? se demanda-t-il.
Il soufflait encore ; pourtant, il reprit sa course, un pressentiment le tenait haletant en effet.
Et J'er^ome Fandor, quelques instants plus tard, devait concevoir une nouvelle horreur.
Qu’'etait devenu Fant^omas ? Qu’avait-il fait ? Ah ! d'esormais, le journaliste ne le savait que trop ! Fant^omas avait d^u se pr'ecipiter en toute h^ate dans la direction de la maison. Le crime qu’il avait commis alors, il avait d^u le pr'em'editer depuis longtemps, il avait d^u m^eme le pr'eparer.
J'er^ome Fandor, au tournant d’une all'ee, apercut soudain la maisonnette o`u sa m`ere dormait, qui flambait.
Une fum'ee noire, ^acre, la fum'ee que produit le p'etrole en br^ulant, se d'egageait de l’incendie. Par moments, on ne voyait qu’elle, en d’autres, des flammes immenses s’'elevaient vers le ciel bleu, comme de terribles langues de feu qui claquaient au vent.
— Ma m`ere !… ma m`ere ! hurla Fandor…
Et le journaliste fonca vers le brasier.
Il n’avait fallu qu’un instant `a Fant^omas, en effet, pour commettre l’abominable forfait.
Fant^omas, depuis de longs jours, s’'etait dit qu’assur'ement le r^ole qu’il jouait lui craquerait dans les mains. Juve et Fandor, certainement, l’obligeraient `a se d'emasquer.
Et c’'etait dans la pens'ee de cet in'evitable 'ev'enement que Fant^omas avait pris ses pr'ecautions, qu’il avait invent'e la ruse derni`ere de l’incendie.
Depuis de longs jours, Fant^omas transportait myst'erieusement dans les caves de la maisonnette des bidons de p'etrole dont il aspergeait les murs. Il avait entass'e un peu partout des provisions de ce terrible liquide. Il lui avait donc suffi de jeter une allumette pour que l’incendie s’allum^at, comme il avait suffi de quelques secondes pour qu’il pr^it une intensit'e formidable.
Mais pourquoi Fant^omas br^ulait-il ainsi la maison de M me Rambert ? Pourquoi voulait-il la mort de cette pauvre femme, qui avait toujours 'et'e sa victime et qui ne pouvait pas ^etre pour lui une ennemie dangereuse ?
Fant^omas agissait-il par un simple besoin de cruaut'e, dans le simple d'esir de torturer Fandor ?
`A la v'erit'e, Fant^omas avait c'ed'e, en incendiant la maison, `a de pressants motifs.
Une fois encore, en effet, il avait tranquillement raisonn'e, tranquillement r'efl'echi, tranquillement conclu ce qu’il importait de faire.
Le bandit connaissait en effet la t'enacit'e de Juve et de Fandor. Il savait que ceux-ci ne lui laisseraient point la paix, que, lanc'es sur une piste, ils le poursuivraient sans tr^eve ni r'epit, s’il ne les forcait pas `a s’occuper de tout autre chose.
Et Fant^omas, qui peut-^etre `a cet instant nourrissait un colossal dessein, peut-^etre m'editait un crime effroyable, ourdissant une de ces intrigues t'en'ebreuses dont il aimait `a d'enouer les fils, Fant^omas, qui avait besoin de ne pas ^etre talonn'e par Juve et par Fandor, inventait de mettre le feu `a la maison de M me Rambert, en se disant :
— Assur'ement, ils perdront ma trace, ils s’occuperont de la morte, j’aurai le temps de dispara^itre !
Fant^omas ne se trompait pas, en v'erit'e. D`es la minute o`u il apercevait le terrible incendie, d`es l’instant ou il prenait conscience du danger que courait sa m`ere, J'er^ome Fandor cessait de s’acharner `a la poursuite de Fant^omas pour ne plus songer qu’au p'eril qui menacait celle qu’il venait enfin de retrouver.
Fandor n’h'esita pas.
Il foncait vers le brasier comme il avait fonc'e sur Fant^omas. Le vent projetait la fum'ee de son c^ot'e, il crut vite qu’il allait 'etouffer, asphyxi'e par l’atmosph`ere suffocante.
Mais qu’importait, grand Dieu, puisqu’il courait vers sa m`ere, puisqu’il s’agissait de sauver sa m`ere ?
Le jeune homme, traversant les flammes, sentant ses habits roussir sur lui, se br^ulant aux pans de bois qui commencaient `a s’'ecrouler, s’'elancait bient^ot `a l’int'erieur de la maison en flammes.
Des paysans d'ej`a 'etaient accourus. Il y avait des cris, des hurlements.
Comme dans un r^eve, J'er^ome Fandor crut comprendre que toute une foule lui conseillait de ne pas entrer, hurlait dans une folie d’'epouvante qu’il allait `a la mort.
La lueur de l’incendie 'etait aveuglante `a l’int'erieur de la maison. La chaleur qui y r'egnait e^ut suffi `a faire l’air irrespirable.
J'er^ome Fandor crut que sa poitrine 'etait en feu. Chaque aspiration entra^inait dans ses poumons des gaz asphyxiants et surchauff'es ; un vertige commencait `a faire tourner sa t^ete. Ses joues saignaient, il avait un bras horriblement br^ul'e. Il avanca encore…
`A ce moment, J'er^ome Fandor n’agissait plus qu’`a la mani`ere d’un automate, incapable de raisonner et de r'efl'echir.